21/01/2012
Traumatisme.
J’écris une scène de mon Aurelia, que je ne peux pas repousser plus longtemps. Pas le roman, la scène. Sans rien dévoiler du récit, elle s’inspire des premiers pogroms du début du XX°s et narre le lynchage par des bandits ukrainiens d’un des protagonistes. Avec mise en abyme garantie : l’homme se fait massacrer, littéralement, sous les yeux de sa femme et d’un de ses amis, qui ne peuvent rien faire de peur de subir le même sort. Cette scène, je l’ai vécue indirectement il y a plusieurs années en regardant un documentaire inédit de Michaël Prazan sur les Einsatzgruppen, sur le font de l’Est. Des images terribles d’un homme hébété par le sort qu’on lui réserve, par la mort à venir. Comme Anton, qui la voit de ses yeux, j’ai écrit cette scène parce que je n’ai jamais pu me l’enlever de la mémoire. Ecrire n’est jamais facile.
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20/01/2012
Chute.
Je sais quelle est la vérité : nous sommes tous des aliénés, mais on a des vies bien calmes.
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19/01/2012
Serpillo-thérapiste en onto-flemmatologie.
Quand je suis de passage dans un hôpital, je prends toujours les escaliers plutôt que l’ascenseur. Pas seulement par crainte des maladies nosocomiales, mais plutôt pour savoir s’ils sont correctement nettoyés. Un vieux réflexe du temps de mes années de serpillo-thérapie, quand j’ai compris, assez jeune pour le coup, qu’il valait mieux bien travailler dès le matin plutôt que de devoir repasser dans l’après-midi. Rien de moraliste dans ce constat, sinon la parabole du semeur, dans un texte de Alain sur le travail, qui répond au philosophe qui lui demande pourquoi il passe trois fois quand deux suffiraient pour creuser le sillon, qu’il le fait une troisième fois comme on signerait une œuvre. La touche finale. Dans ces escaliers de l’hôpital, je refuse de me dire que j’avais ce type de pensée il y a près de trente ans. Qu’un jour, je les descendrai, qui sait, dans la position de ceux que je descendais quand je suis passé du ménage au brancardage. C’est plutôt ça, le cycle de la vie, pas les âneries beuglées chez Walt Disney. A quelqu’un qui me disait hier encore comment me comporter, je rétorquai que j’avais sans doute une conscience accrue de ce qu’était l’existence et que j’étais finalement plus adapté à son absurdité que lui, qui prétendait la connaître. Je veux bien faire les efforts nécessaires pour descendre de mon petit rocher, mais faudrait pas pousser mémé dans les orties. Ou dans les escaliers. Fussent-ils propres.
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18/01/2012
Peut-on le quantifier, l'amour?
La vie avance. Il s'est passé un siècle entre la première version de Quantifier l'amour, chez "Jules & Jim" et celle-ci, samedi dernier. Mais les mots ont ceci de supérieur aux hommes qu'écrits avec passion, ils ne déçoivent jamais. On peut passer son chemin si on n'aime pas, mais ce sont ces hommes qui m'accompagnent à chacune de mes sorties et à moi, ils plaisent.
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17/01/2012
Tiré par les cheveux.
Quand son supérieur la surprit échevelée, sortant de l'hôtel particulier de son principal concurrent, elle eut toutes les peines du monde à lui faire croire qu'en tant que responsable des sinistres, elle avait dû mimer les procédures d'évacuation du Costa Concordia.
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16/01/2012
Darkvadorisé.
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15/01/2012
C'est qui, ce Baudelaire?
Un très bon moment, hier, à l’espace Baudelaire de Rillieux-la-pape où, à l’invitation de Cécile Dérioz et de Marie-Claude Douot, je suis venu présenter « le Poignet d’Alain Larrouquis ». Enfin, plus exactement, l’ensemble de mon œuvre, tant il fut autant question, in fine, des deux autres romans que du dernier. Parce que quand Cécile Dérioz me présente, elle raconte à quel point « Tébessa, 1956 », que j’aurais dû présenter là-bas en 2008, déjà, les a marqués, elle et tous ceux à qui elle l’a fait lire. Elle me présente via mon activité, ce qui a toujours, sans coquetterie, tendance à m’impressionner et confie à l’auditoire (une trentaine de personnes quand même) le plaisir d’accueillir et de découvrir des auteurs « pas encore célèbres ». Je note l’euphémisme et en souris, j’attends le moment – s’il se confirme – de mon entrée dans les manuels scolaires pour me confronter de mon vivant à ma propre postérité. Ces charmantes responsables de l’Espace Baudelaire sont bienveillantes, mais timides et peu bavardes, ce qui fait que rapidement, on me confie le micro et on me laisse me débrouiller seul. J’avoue que je ne sais pas forcément toujours pas quoi commencer, je reste debout, adossé à la table, je prends l’auditoire à la gorge comme il m’arrive de le faire dans d’autres domaines et voilà que je parle de moi. Justement pour chasser le narcissisme, l’autofictionnel. Je parle de la proximité des romans, de la maldonne qu’elle peut entraîner chez ceux qui me découvrent, de mon entrée dans l’édition, de la fameuse lettre de Claude Raisky. De Lettres-frontière passé, de Grignan à venir. Je confie à des lecteurs la fierté d’être reconnu par eux, avant d’être reconnu tout court. Je parle des thèmes du Larrouquis, de l’identification, de la distance du tireur, de l’Espagne, de Somosierra. Je regarde ces visages à l’air intéressé, pense en moi-même que j’y prends goût, une semaine après le Cabaret Poétique, que ma vie est là et que eux n’en doutent pas. Pas comme la société, je veux dire. Je parle d’une vie d’écriture qui est la mienne et leur attention la valide. Après un premier temps où l’on n’ose sans doute pas m’interrompre, on m’interroge sur la portée historique de Tébessa, je retrouve les questions qu’on m’a posées en 2009, j’y réponds. Par la mécanique des places, par l’écriture simplifiée. Je parle pour la première fois publiquement des portraits de mémoire, j’en vois dans l’assemblée qui sourient parce qu’ils en font partie. Un monsieur très cultivé – qui viendra par la suite me parler de la métrique des chansons – me demande si l’actualité pourrait inspirer le romancier que je suis, je lui réponds en philosophe, arguant du fait que mon engagement à moi est esthétique mais qu’on peut poser des problématiques actuelles en écrivant un dialogue de 1906. Aurélia, donc. Pour la première fois aussi, je ne respecte pas la dissociation en évoquant mon autre métier pour répondre à une question sur la nécessité d’avoir fait des études de Lettres pour écrire. Ce qui est évidemment faux, sauf, peut-être, pour boucler un Dom Juan en vers en une quinzaine de jours… Bref, je m’amuse bien, je crois tenir l’auditoire, il est donc temps de le lâcher. Je présente la partie musicale du projet, mon travail d’auteur au sens large, raconte un peu la genèse et laisse la place à Eric et Gérard, dont les répétitions le matin même m’avaient enchanté, pendant que je repassais ma chemise dans la pièce à côté. Quelques pains, pour reprendre un terme du milieu, un dobro peut-être pas assez fort, un ou deux oublis de texte (Eric confiera la difficulté d’entrer tout de suite dans le sujet, après une heure d’écoute de l’autre), mais la magie opère, je crois. La relation entre eux est palpable, en tout cas, je ne m’en lasse pas. C’est sublime et touchant d’entendre ces chansons dans des lieux aussi inédits pour le genre. « Au-dessus des eaux et des plaines » fait donc son retour, comme annoncé, je sais aussi qu’elle clôt la rencontre à chaque fois. Nous nous quittons à regret, après une séance de dédicaces finalement assez nourrie, des retrouvailles avec de vieux amis de trente ans, d’autres qui s’annoncent par des démarches singulières, je signe autant de T. ou de CC que de PAL (vous notez l’aspect pratique de mes titres ?), je regarde des gens partir avec tout Cachard sous le bras et, plus tard, dans leur vie. Cécile Dérioz m’a appris hier qu’un enseignant de collège avait choisi Tébessa pour travailler avec ses 3èmes et qu’une rencontre serait bientôt organisée avec les classes. Il ne me fallait pas moins que l’assurance de revenir pour que je puisse partir en toute tranquillité.
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14/01/2012
Mémoires différentes.
Une discussion inattendue avec Alain Larrouquis, hier matin. Plus je parle avec cet homme et plus je suis heureux de l’avoir gardé lui comme héros de mon adolescence, quand tous les autres se sont défaits. Je lui avoue avoir ri aux larmes en lisant dans les mémoires du président de l’Elan Béarnais d’Orthez qu’il a failli causer un incident diplomatique majeur lors d’une rencontre contre une équipe chinoise, en présence de nombreux diplomates… en bottant les fesses du meneur adverse qui lui avait piqué trois fois consécutivement le ballon en s’en excusant d’un petit salut que lui avait pris pour du mépris. Un sanguin, Larrouquis, qui quitta le rassemblement de l’Equipe de France en 1983 parce qu’on lui préférait de moins bons joueurs que lui. Il rit lui aussi de ces souvenirs, reconnaît qu’il a parfois dépassé les bornes mais surtout, surtout, n’en regrette rien. Ce n’est pas un homme de Mémoires, par ailleurs. Il m’avoue se sentir décalé quand autour de lui, de vieilles gloires comptent réunir les souvenirs et les relier. Mon roman, sans doute, une fois la phase de surprise passée, l’a aidé, en validant sa différence. Celle qu’il a toujours revendiquée, annonçant d’autres rebelles plus médiatiques encore, Cantona, McEnroe… Des noms magiques, mais pas plus que le sien, qu’on n’arrive pas plus, je l’ai constaté, à écrire, qu’on le faisait dans les 80’s : un r, deux, faut-il prononcer le –isse ou pas… Des considérations sur la gloire, le besoin des vieilles du même nom d’être encore reconnus une fois leur carrière terminée, le projet de faire ensemble, si les contacts aboutissent, une interview pour « l’Equipe magazine », le salon du livre d ’Orthez ( !) et deux-trois échanges bien sentis sur le port du maillot vert, quel qu’il soit. De quoi renforcer, et c’est bien, le plaisir infini d’avoir associé mon nom au sien : le sien en grand, le mien en petit.
NB : je rentre de Baudelaire. CR demain, là, on lâche un peu prise, permettez.
En cadeau, une photo du Cabaret Poétique de dimanche dernier. Merci à Josette Vial & Frédérick Houdaer.
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