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01/11/2014

Hors les Murs.

Femme-muraille, devant ces murs qui prétendent enfermer jusqu’à ce que tu représentes, ton geste, l’hypnose de tes bras, comme une gitane dont l’esprit se confondrait avec le feu, est une rédemption, il ré éclaire l’état dans lequel l’homme s’est condamné à être celui qu’il n’aurait jamais dû être. Les cerbères qui te délimitent ne sont plus imposants que par ce qu’ils ont enfermé, les âmes qu’ils ont confisquées, les vies, les phénomènes : à leur pied, tu deviens LA vie, tu rayonnes, tu es à la fois la féminité et ses incidences. A mi-chemin entre l’ombre et la lumière, tu cherches l’improbable issue, tu es celle qui part, celle qui redessine les contours que les huis jamais franchis de chacune des pierres qui font les murs avaient à jamais intégrés et définis. Dans la cambrure de tes reins, le galbe de tes hanches, il y a l’espoir qui se tend, dressé vers un infini plus haut encore, plus lointain dans l’âme que l’obstacle infranchissable. Le geste est authentique, comme le sera l’enjeu, quand derrière l’élément, tu te donneras à celui qui te fera l’amour pour recommencer, réinventer l’état de nature : alors, l’imposant édifice rendra les énergies, il épousera le rythme de tes mouvements, la pierre retrouvera de sa majesté ; d’un coup un peu moins glacée, elle aura l’écume de tes tempes qui se serrent… L’équerre des murs qui te font face n’est plus autoritaire, elle est soumise, elle semble indiquer la direction qu’elle a longtemps refusée, et la volupté que tu ressens à l’idée de t’y engager n’est rien par rapport à l’immensité du temps que tu libères, que tu recrées, après qu’il sera détruit. Temps réel, temps maîtrisé, aimé et materné, ton hymne est à la femme et à l’amour, il oriente, considère le sens qu’il va donner à la marche et la conscience de son contraire. Sisyphe sans absurde, tu deviens le cours et sa justification, jusque dans la douleur. Comme une reine, une égérie. La pierre se fissure, elle libère les interdits, les âmes de ceux qui y vivaient reclus, elle te porte, tu deviens l’immensité de ce que tu as réalisé, une cime parmi les sommets. La nudité t’épargne, ton corps est un rempart, il crée une distance attractive, toutes les ondes s’y retrouvent, comme dans un champ magnétique. Tu parviens même à faire de la dissymétrie des murs un équilibre parfait, que l’arête de ton dos fige, que ton vol suspend. L’estampe japonaise qu’on ferait de ton image appellerait un haïku, circonstanciel:                

 J’entends tes silences Et devine tes conflits Je ne dirai rien

mais c’est le chant de la terre et de ses barrières naturelles que tu entreprends de réécrire, et d’aimer à nouveau, la liberté qui n’est plus qu’elle-même, délivrée de son illusion. Libre, tu concours à la liberté des autres, tu la façonnes, la malaxes comme tu le ferais de l’argile, qui s’insère, gagne du terrain sur le roc, et, paradoxalement, gagne en justice ce qu’il perd en solidité. Nous sommes déjà ensemble, moi derrière le mur, toi qui le franchis et le ruine ; mais quand nous le serons vraiment , regarde moi à chaque seconde comme si c’était la dernière fois, que nous ne verrons pas venir, puisque nous serons ensemble… Alors seulement, la pureté de ton geste nous reviendra et nous éprouverons de la mélancolie, celle des nuits d’Espagne, auxquelles renvoie ta danse, la liane de tes bras. Nous pourrons nous dire que nous n’avions pas fini de nous aimer, que les murs qui enferment ne sont que les projections de toutes nos vies cassées, nous prendrons la mesure de ce qui nous reste à réinventer. Nous serons nous, vraiment, pas ceux que nous aurions dû être. Quoiqu’il nous arrive désormais, tu sais maintenant que pour moi, il est écrit que ceux qui se sont aimés comme ceux qui se sont défaits, finissent,  forcément, par se retrouver.

 Le Mur, ainsi, devient liaison, il relie, s’il est entre, c’est pour mieux assembler : c’est pour ça que tu donnes l’impression de l’épouser, de rentrer dedans, comme un spectre pour qui rien n’est infranchissable. Mon champ d’amour pour toi n’est plus paradigmatique, mais syntagmatique : un horizon, un infini. 

Voilà. Hors les murs, notre vie existe de nouveau ; ils sont des épreuves plus que des obstacles, ils se passent. La pierre ne s’envisage plus en hauteur, elle forme des couloirs, sert le labyrinthe dans lequel se perdra et ton corps et le souvenir que je m’en fais, ta nudité et l’effet qu’elle a sur le regard. La confusion est grande, grande est aussi la tentation d’être l’endroit où tu te montres dans la plus absolue de ta prude impudeur : soudain je me métamorphose, mes jambes, mes bras deviennent de pierre, je me fige, je m’emmure et te regarde danser. Je n’ai pas ton altruisme, et désire te garder pour moi, à jamais. Je deviens la sentinelle du temps qui te valide : l’impression d’avoir à reconstruire constamment le peu que nous avons édifié est à la fois excitante et éprouvante, mais si tu me laissais le choix entre partir et t’oublier, je choisirais de t’oublier, parce que ça ne m’engage en rien, puisque ce n’est pas possible… Toi à la danse, moi à l’édifice, tu m’accompagnes déjà, comme une contrainte libératrice; car si j’ai enfin le courage et l’envie d’ouvrir cette brèche que je sens nécessaire à mon bonheur, c’est avec toi que j’aimerais l’explorer pas à pas, comme un voyage intérieur. Vers la lumière.

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31/10/2014

Sans rien dire.

Le monde est plat, dit un passant, je le sais de douce sûre. Toutes les sources sont sûres, répondit un témoin, dubitatif. Oui, eh bien vous verrez, assura l'autre, vexé. Un troisième fit circuler l'information, sans préciser de qui elle venait. Ceux qui l'entendirent trouvèrent confirmation auprès du premier, arrivé inopinément, que les autres ne reconnurent pas. C'est bien cela, alors, dirent-ils en choeur. Bon, tout ça ne nous dit pas si le concert de Morrissey au Radiant est maintenu ce soir, ou si...

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30/10/2014

Susciter l'engouement.

Dans moins d'une semaine, je pars en Ukraine. Comme à mon habitude, rien n'est prêt, surtout pas mon esprit, qui ravive cette impression étrange d'y aller pour rien et de n'aimer, du voyage, que le retour. Mais j'y travaille, pas à pas, et je débarquerai dans un univers totalement étranger: une bonne solution pour échapper aux lourdeurs de ce monde-là. 

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29/10/2014

Ré Mi.

C’est un beau jeune homme, aux idéaux ancrés dans la  crinière échevelée : un des ces post-adolescents qui se donnent des airs plus vieux parce qu’ils se laissent pousser la barbe, mais dont les beaux yeux clairs témoignent d’une absolue nécessité de vie. Une vie qu’il ne se laissera pas dicter : il a fait des études un peu décalées, dans un lycée agricole, une formation après le Bac en Gestion et protection de la Nature, il sait que les débouchés sont rares, mais peu importe : ce qui lui plaît, c’est d’être en harmonie, à contre-courant de tout ce qui motive la jeunesse de son époque et ceux qui les ont élevés. On dira qu’il se cherche, mais si on le dit, c’est parce qu’on n’a plus l’âge de le faire, et que les concessions qu’on a faites, nous, aux idéaux de notre jeunesse, sont légion. On peut regimber, arguer de quelque permanence, mais il n’empêche : notre temps a passé, est devenu, sans prévenir, celui de ceux qui nous ont suivis, à qui on a donné vie, qu’on regarde s’engager avec fierté, et crainte. On parle beaucoup trop de lui, ces jours-ci, en oubliant l’essentiel, pourtant : un jour viendra où tout se fera silence et peine, et c’est là qu’on saura vraiment qu’il manque au monde qui l’aura sacrifié.

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28/10/2014

Dawn's early light.

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27/10/2014

On choisit pas sa mémoire.

Caillau, Caillau, Caillau! Luminaires, répondit l'écho.

15:49 Publié dans Blog | Lien permanent

26/10/2014

Zeugma.

Il souffrait d'apopathodiaphulatophobie mais il est mort de honte et d'un manque de papier toilette.

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25/10/2014

Retranscrire des émotions.

L’abscisse Charlotte-Julie ne tenait pas compte de ses ordonnées : Julie renvoyait son amie aux pires moments qu’elle lui avait confiés pour éviter qu’elle en provoque d’autres. A cet instant, je me sentis plus proche d’elle que de n’importe qui à cette table, Charlotte incluse : une telle marque d’amitié, quitte à passer pour la plus revêche de tous demandait une abnégation telle que je pensais à la scène sublime des « Poupées russes » de Klapisch, quand Kathy Reilly énonce à un Romain Duris interdit les raisons pour lesquelles elle l’aime lui dans toutes ses imperfections. Une scène de gare comme nous en avions connu quelques-unes, Charlotte et moi. Mais dans la vie réelle, il n’y a pas d’autre bande-son, pour ces cérémonies des adieux, que le haut-parleur hésitant des sociétés de chemin de fer. Là, alors même que l’action se passe à Moscou, c’est la voix de Beth Gibbons et son « Mysteries » qui m’a plus d’une fois renvoyé dans la ville où je n’avais jamais voulu revenir depuis que Charlotte y habitait. Jusque à aujourd’hui. « I’ll be there anytime ». Les dix années pendant lesquelles, immanquablement, la moindre bluette m’avait renvoyé à elle s’effondraient dans une discussion de salon que personne, encore, n’avait décodée. Julie mettait son amitié en opposition entre le passé de Charlotte et une permanence qu’elle m’avait reconnue en un regard.

- Ah, la nature humaine ! enchaîna Adrian, enchanté de pouvoir reprendre un peu le cours de la conversation. C’est quand même étonnant que nous soyons sur ce point plus optimistes que vous, les Latins !

- Moi, je crois aux gens, protesta Ana. Si je n’y avais pas cru, je ne me serais jamais trouvée ! Je n’ose pas penser que des gens ne croient pas en eux-mêmes !

- Paul y parvenait très bien, dans mes souvenirs.

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