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22/11/2013

A la peine.

J’aurais eu le temps et le loisir d’écrire vingt romans sur ma pomme, mon rapport au tennis, la fréquence de mes ennuis gastriques, ma sexualité débridée, les couleurs de l’automne, mon enfance malheureuse, mon inaptitude au bricolage, ma correspondance avec les assureurs, les femmes dont je tombe amoureux dans le métro, mes ex, mes futures, mes possibles, mon désamour du bleu, l’A.S Saint-Etienne, la course-poursuite en mobylette à laquelle j’ai participé quand j’étais à l’armée, l’autofiction, l’existentialisme, l’émulation entre Sartre et Nizan en classe de 5ème, les promesses rarement tenues de ceux qui vous encensent, celles toujours  suivies de ceux qui ne vous aiment pas, sur le calendrier de l’Avent, sur le surendettement des ménages les plus démunis au moment de Noël, sur l’Education Nationale qui se délite, sur Amanda Langlet ou sur Corynne Charby, sur tout un tas de choses au final, mais non, je reste coincé en Ukraine, en 1904, avec des personnages qui n’en sont pas encore partis et qui attendent que j’aie la patience d’aller à la bibliothèque chercher toutes les informations historiques qui me manquent et auxquelles ni Internet, ni ma documentation personnelle ne se substituent.

17:13 Publié dans Blog | Lien permanent

21/11/2013

Avec la sagesse de l'âge.

vitas.jpgJ’ai un rapport compliqué avec ma boîte à lettres : il peut se passer des semaines sans que je l’ouvre, de peur qu’un vague courrier administratif me renvoie à mon inadaptation totale à ce monde-là. J’en étais là, depuis plusieurs jours, quand, n’écoutant que mon héroïsme, je me suis décidé à voir ce qu’elle contenait, tout à l'heure. Et j’ai trouvé - entre un million deux de prospectus, des contingences et un premier document officiel évoquant ma retraite future (!) - une grande enveloppe qui cachait un joli mot d’une écriture que je ne connaissais pas (encore) et deux feuilles A4 griffonnées. Avec des dessins, des ratures, des renvois, des passages entourés : des mots qui se recoupent, qui ne sont pas encore dans l’ordre qu’ils trouveront, deux ans plus tard si j’en crois la datation en haut à droite, sur un album. Ces deux feuilles, ce manuscrit d’une chanson dont l’auteur a l’élégance de m’écrire que c’est ce que j’en ai écrit qui donne la valeur au brouillon qu’il m’offre, c’est celui de « Que restera-t-il de tout ça ? », qui a lancé, il y a quelques temps, ces rencontres avec Vitas, avec Guillo, avec Fergessen. « Que restera-t-il ? », dont j’ai parlé dès que j’ai jeté une oreille, d’abord distraite puis convaincue, sur l’album de Guillo, que j’ai chantée avec Guillo, accompagné par Vitas et Dgé (dont je reconnaîtrais le lapsteel en plein embouteillage à Mexico), à Amou, alors que je quittais Orthez et son cortège d’émotions, il y a un an, à peine. Qui a manqué, visiblement, de s'intituler "Mon petit enfer", ou "Mes anges déçus", on n'en saura jamais rien, et c'est très bien. Nicolas Vitas, en plus d’être une plume de grand talent, est compositeur et interprète : il sait le paradoxe qu’il a posé dans ma vie, à ne pas aimer tout ce qu’il fait mais à le voir défoncer mon Panthéon personnel en y déposant deux chansons, déjà, voire trois, avec le « Pêcheur de centimes » dont j’ai réussi à faire – inversion des obsessions – qu’il pense à moi en la chantant. Ou qu’il me la dédie, comme j’envisage qu’il le fasse bientôt. Il n’empêche, des manuscrits de textes de chansons, indépendamment de celles que j’ai écrites, j’en ai deux, maintenant,  inestimables à mes yeux : « la ballade de Johnny & la Lune », que Fred Vanneyre a écrite, et, désormais, « Que restera-t-il de tout ça ? », la plus belle antiphrase qu’on m’ait jamais offerte. Touché.

17:00 Publié dans Blog | Lien permanent

20/11/2013

Mes aubépines.

Je réponds souvent que l'écriture m'est venue de la prétention d'arrêter le temps, de vouloir qu'un instant, une sensation, une image se prolonge. Dans le même temps, je pense à cette cicatrice que j'ai sur l'avant-bras droit: une belle marque d'une dizaine de centimètres, à partir de laquelle je peux décliner, selon mon auditoire, les récits des combats homériques qui me l'ont infligée. Sans dire qu'à dix ans, je me suis très légèrement écorché sur une ronce, et que la trace est restée, a grandi avec moi. Il n'empêche, ce moment-là, je ne l'ai jamais oublié. Mais je ne l'avais jamais écrit.

17:09 Publié dans Blog | Lien permanent

19/11/2013

Mesures.

« Attends 9 192 631 770 périodes de la radiation correspondant à la transition entre les niveaux hyperfins F=3 et F=4 de l’état fondamental 6S½ de l’atome de césium 133 , ma chérie ! » ne paraissant pas approprié à l’urgence de la situation, l’Académie se résigna à choisir un mot plus simple mais fit bien comprendre qu’on ne lui accorderait jamais le premier rang.

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18/11/2013

Tautologie.

Le temps du livre est court, mais son impact durable.

18:14 Publié dans Blog | Lien permanent

17/11/2013

Conte d'hiver à Culoz.

pieds.jpgJ'aurais dû me méfier d'entrée: croiser, à la gare, Jean-Luc Lahaye chaussé de ses Ray-Ban (en pleine grisaille) était un signe annonciateur. Y a-t-il eu relation de cause à effet, une heure plus tard, un désespéré mettait fin à ses jours et à ma chance d'attraper ma correspondance à Bellegarde. Avec une petite centaine de camarades de galère, nous attendimes patiemment, à la gare de Culoz, que des cars viennent nous chercher. Dans ces cas-là, on discute, on se rassure, on se réchauffe mentalement. J'ai le temps de penser que je suis venu une fois, à Culoz, fêter les trente ans de Mister B, il y à plus de quinze ans... Que rien ne nécessite plus, dans ma vie, que je retourne à Culoz. Ma petite copine d'infortune me raconte ses études d'économie, son avenir dans la banque. Quand elle apprend ce que je viens faire à Thonon, elle s'excuse de ne pas lire mais que ça doit être bien d'être auteur et d'aller rencontrer des lecteurs. Je confirme, même si l'heure tourne et qu'il fait froid. J'appelle Lettres Frontière, je dis à Émilie Pellissier que je serai en retard, que je n'assisterai pas à la cérémonie à la mairie, que j'irai directement au repas. Elle me dit que Virginie Ollagnier est dans la même galère que moi, à la gare de Culoz. Mes oreilles sont engourdies par le froid, j'entends mal, Émilie me dit que Virginie est rousse, mais mon cerveau dérape: après avoir abordé les quatre rousses de la gare de Culoz en leur demandant si elles étaient Véronique Ovaldé, j'ai peur de passer pour un satyre et renonce. Le car nous promène dans les montagnes, arrive à Bellegarde et là, c'est le deuxième TER qui prend 20mn de retard. Peu importe: peut-être est la réminiscence des voyages passés à relire le manuscrit de "la partie de cache-cache" en allant parler de "Tébessa", mais je tombe un chapitre de "Aurélia Kreit", soupire devant le travail de recherches et de vérification qui m'attend, mais je redeviens écrivain. J'aurai mis cinq heures pile pour relier Lyon et Thonon, je suis un peu épuisé mais déjà, dans la salle des Ursulines, défilent les visages connus, prennent corps les rendez-vous pris: Marielle, Delphine, Thomas. Je suis présenté à Virginie Ollagnier, nous partageons le même secret: il y a eu les amants de Vérone, il y aura les écrivains de Culoz. L'ambiance est un peu feutrée dans la salle des fêtes, à l'inverse des éclairages crus. Nous faisons une table d'auteurs, on négocie des bouteilles pour ne pas se lever trop souvent chercher des verres, on participe à la mythologie des auteurs. Delphine Bertholon me fait penser à cette phrase mythique du "Jules&Jim" de Henri-Pierre Roché : "elle tenait le coup dans les cafés, mieux que les poètes". La bonne nouvelle, c'est que personne ne se prend au sérieux, et qu'on rigole beaucoup. Qu'on plaint un peu les comédiens qui lisent des extraits des coups de cœur des vingt sélections: les conditions ne sont pas très bonnes, l'écoute non plus. Il fait chaud, comme prévu, nous sortons régulièrement pour des pauses-cigarettes que j'accompagne. On parle de la condition des salonnards, des différents lieux où nous sommes passés, pour Lettres-Frontière. On regrette un peu que cet anniversaire manque un peu de joie et de lâcher-prise. Appelés à monter sur scène pour nous montrer, on s'exécute, mais le côté comice agricole m'agace. Je prends le micro, demande à mes confrères si quelqu'un veut dire un mot, personne, je sais que je vais regretter mon côté cabotin très à l'aise à l'oral, mais je parle, je dis le plaisir de la saison, des rencontres dans des contrées plus qu'éloignées, la chance pour des auteurs peu connus d'être mis sur le même plan que des auteurs de renom. Même si la chose est blessante de ne pas trouver ses livres sur l'étal d'un libraire qui prend mal qu'on le lui fasse remarquer. On peut regretter que sa collègue qui suivait les rencontres LF au moment où je les ai faites n'ait pas assuré l'achalandage: dans l'esprit, et dans la lettre, la diversité était mieux assurée. On parle d'elle avec Philippe Fusaro, de ses lasagnes, de "Jules & Jim", encore. Le repas se termine sans le champagne attendu, la journée complète des bénévoles de Lettres-Frontière les a sans doute achevés, les tables se vident et se rangent. Thomas Sandoz s'en va, on s'embrasse avec amitié: j'ai pu lancer à la table que "la Fanée" est sans doute un des meilleurs romans que j'ai lus dans ma vie. L'hôtel est à côté, on s'assure, Delphine et moi, un after avec la bande de Gilly, on alterne les blagues de potaches et les réflexions sur l'écriture. Je distribue des "Camille", puisque je n'ai pas de cartes de visite. Delphine rend Grâce (il fallait la faire!), il est près de 2h, on rejoint nos chambres respectives, avec vue sur le lac. 9h plus tard, je termine cette note, dans le TER, sans suicidé, cette fois-ci. Trois rangs devant, Fusaro répond à une interview, parle de ses voyages à Tanger, en Turquie, de son livre à paraître. Et de "Jules & Jim".

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16/11/2013

L'inconnu dans la maison.

Tout à l'heure, je pars pour Thonon-les-Bains, participer aux 20 ans de la famille "Lettres-Frontière", puisque c'est ainsi qu'elle s'appelle. Vingt années d'une sélection dantesque, réunissant - c'est l'exploit majeur - des groupes de lecture de la Suisse Romande et d'autres de Rhône-Alpes, tendance Savoie et Haute-Savoie. En 2009, j'ai été invité une dizaine de fois à venir parler de "Tébessa, 1956", ce livre (et son petit éditeur) qui est arrivé en dernier dans le lot de départ (près de 300 ouvrages) et qui, petit à petit, m'a-t-on dit à l'époque, a grignoté son retard pour s'imposer dans le conclave final. J'ai écrit des pages et des pages là-dessus, chroniqué toutes les rencontres. Hier, j'ai revu des images d'Evian, je n'ai reconnu ni Eric Hostettler, débarqué à Bloye, pour la première, et sommé de chanter "l'Embuscade" sans répétition et sans filets, ni moi-même. Tout à l'heure, au milieu de tous ces noms illustres qui ont fait la légende de LF (Chalandon, Giraud, Gallay...), je retrouverai des personnes qui ont sans doute cessé de me suivre, qui n'ont pas sélectionné "la partie de cache-cache" que d'autres ont primé, c'est ainsi. Je serai content de les voir, je ne les reconnaîtrai sans doute pas, eux non plus. Je me demanderai quand même ce que je fais là, mais j'y serai, puisque c'est ainsi. Et puis, dans ma mémoire immédiate, il y a ceux avec qui je suis resté en contact, Fabienne & Cécile, Marielle, puisque c'est récent. Quand on me demandera ce que je deviens, je dirai oh, moi... et je passerai à autre chose. J'irai boire des coups avec Delphine Bertholon, tiens, puisqu'on se l'est promis.

Pour autant, preuve que de temps en temps, on pense à moi, un article sur mon Robert issu du "Culture Plus", du CRL Bourgogne, finement troussé.

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15/11/2013

Une journée avec Laurent Cachard.

14h30 – Pour bien montrer que l’écriture est une question d’exigence envers soi-même, Laurent Cachard décide de ne pas sacrifier le rituel de la sieste. Compte-tenu de l’exiguité de son appartement, dont il s’excuse auprès de l’équipe de tournage, il demande aux techniciens de l’attendre en bas, le temps, promet-il, d’un premier cycle de sommeil. « L’apanage des grands hommes, comme Churchill ! ».

16h30 – Répondant au 71ème coup d’interphone, Laurent Cachard se réveille et d’un « Ouais ! » peu engageant, ouvre à l’équipe, qui s’impatientait. On décide rapidement de le filmer en pleine création, devant l’ordinateur, parce qu'on est un peu là pour ça.

16h45 - Laurent Cachard répond au téléphone : sa compagne lui demande s’ils se voient ce soir. Il répond qu’il est en pleine écriture et qu’il ne pourra sans doute pas. L’équipe de tournage apprécie son abnégation et lui en veut déjà un peu moins. 

16h47 - Laurent Cachard s’inscrit sur Facebook à l’apéro qu’organise un de ses amis. Ce soir à 19h.

16h50 – Concentré, l’air habité, Laurent Cachard écrit quelques mots. Une caméra filme ses mains en action sur le clavier. Les doigts virevoltent, le grand ballet de la création peut commencer.

16h52 - Laurent Cachard télécharge illégalement « l’Equipe » pour savoir si Saint-Etienne va mieux, question récurrente chez lui depuis 1976. Il participe activement sur un forum à la discussion : « Jean-Michel Aulas est-il un f… de p… ? »

17h30 – Le présentateur, fébrile, demande à voir la création originale qui s’est dessinée sous ses yeux. Sur la feuille, qu’il imprime, cinq mots se détachent : Et si c’était vrai ? A l’impudente remarque du caméraman qui dit que ça a déjà été fait, Laurent Cachard répond sèchement : Oui, mais pas comme moi.

17h32 – Laurent Cachard rappelle sa compagne pour lui dire que non, il ne la verra pas ce soir : il est obligé d’assister à un colloque sur la condition de l’écrivain au XXII° siècle, suivi d’un de ces pince-fesses auquel, tu comprends, mon amour, il est obligé de se montrer.

17h45 - Laurent Cachard fait chauffer de l’eau pour le thé. Qu’il offre aux membres de l’équipe pour les remercier de l’avoir invité à déjeuner. Il ne reste qu’un cookie, qu’il mange, parce que ça favorise l’inspiration.

18h – Le présentateur aimerait bien en savoir plus sur le roman historique qu’il est en train d’écrire. Toute cette frénésie de début de siècle, ce doit être fascinant ! Comment vous y prenez-vous pour les recherches ? Laurent Cachard l’invite dans la bibliothèque, jette habilement sa veste sur les Tout l’Univers et lui montre sa collection impressionnante d’encyclopédies - dont les pages ne sont pas séparées - et l'histoire de l'Union soviétique, de Nicolas Werth, qui trône sur son bureau. Le cadreur, lui, s’arrête sur la réédition reliée en papier molletonné de « l’Alchimiste », préfacée par Nadine Morano, et les mémoires de ce philosophe israëlien qui s’est défenestré dans l’indifférence générale..

19h- Laurent Cachard aimerait bien en dire plus sur le processus de l’écriture et de l’histoire en train de se faire, mais il a un apéro Facebook. Il demande au cadreur s’il a fait le technicien toute sa vie, l’autre lui répond qu’il écrit aussi des livres, mais qu’il fait ce métier pour vivre. Dans l’enthousiasme, il lui donne l’argument de son dernier roman. Prétextant un coup de fil urgent à passer, Laurent Cachard note les idées remarquables du technicien dans un carnet de Moleskine : ça lui permettra de faire patienter son éditeur, d’obtenir des à-valoir conséquents et, cerise sur le gâteau, de faire sa note de blog quotidienne. 

19h15 – L'écrivain regarde sa montre : Laurent Cachard déteste être en retard, annonce-t-il brutalement. Il prend congé de l’équipe, les remerciant de s’intéresser à la culture et aux auteurs émergents. 

Nous remercions Laurent Cachard pour son accueil et pour nous avoir conseillé de faire un reportage sur l'écrivain Christian Chavassieux.

11:33 Publié dans Blog | Lien permanent