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12/03/2015

Paroles & Musique (6/7).

Puisqu’on parle bien d’une autobiographie musicale, et qu’il est acquis que je ne pourrai pas mettre tout le monde, mon avant-dernier choix s’impose de lui-même, au bout, néanmoins, d’un parcours complexe : voilà un homme qui, une fois qu’il est passé du rock dur à la chanson française, passant pour un renégat pour certains (« Libé » et « les Inrocks » l’exècrent), m’a conquis par ses textes, sa façon de mettre la musique à leur service, en assumant le côté littéraire de l’exercice. A ce stade de ma vie, je rêvais d’être Philippe Djian, pas pour ce qu’il écrivait lui, mais parce qu’il écrivait, des romans et des chansons pour Stephan Eicher (tiens, comment ne pas mettre « Tu ne me dois rien », sans doute une des plus belles chansons du monde ? Mais bon…). Et lui est arrivé dans ma vie, avec ses rouflaquettes et son accent lyonnais. Je connaissais tous ses textes par cœur, la répétition de ses petits sketchs entre deux chansons… J’allais le voir partout où il passait à proximité, même dans les coins les plus improbables. J’ai assisté à un concert « pirate » dans un tout petit lieu à Villefranche, à l’invitation de son cousin… Je me suis réjoui du succès de « Quelqu’un de bien », qui le consacrait en tant qu’auteur. Et puis je me suis lassé, peut-être parce que j’entrais moi-même dans mon univers. J’ai trouvé ses discours pseudo-branchés et un peu moralistes. Je n’ai jamais autant souhaité qu’un artiste se contente de chanter à ses concerts. C’était démesuré, je me suis dit que j’allais attendre que le désir revienne. J’attends encore, en fait, mais l’année dernière, il a sorti un album en piano/voix, et ce texte absolument sublime et rimbaldien, une version aboutie de son "Rire en dedans" de jeune homme. Pour tout ce qu’il reste pour moi, je le mets dans ma liste.

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11/03/2015

Paroles & Musique (5/7).

Je sens monter, à 5 sur 7, la tension propre à chaque liste, les reproches que je me fais déjà d’avoir oublié telle ou telle chanson, tel ou tel artiste. Mais la règle du jeu était claire, et j’ai beau faire, en choisir sept, c’est renoncer, d’office, à des milliers d’autres. Sans compter celles de mes amis qui m’accompagnent au quotidien, qui connaîtront (eux ? leurs chansons ? peu importe, après tout) le destin de ces textes dont je me remémore la moindre intonation, ces textes qui m’ont guidé dans mon apprentissage d’une langue plus qu’usuelle, celle de la fonction poétique, du mot choisi plutôt qu’un autre, une obsession qui fait que j’aspire davantage à être Claude Lemesle ou Jean-Loup Dabadie, puisque c’est lui qui a écrit « Et puis », que Reggiani lui-même, ou Moustaki, puisque le beau Georges a beaucoup écrit pour le beau Serge. Moustaki, je l’ai rencontré au théâtre de la mer de Sète, Reggiani, je suis allé le voir quand j’avais dix-huit ans, et la force de l’interprétation, la théâtralité du spectacle m’avait impressionné. « Et puis » cette chanson… Ce bilan de la vie, à tous ses âges, le rêve de la permanence plus que de la longévité,  cet amour qu’il décrit, ça n’a beau exister que dans les chansons, on le rêve tous pour soi et quand on l’a eu, qu’on l’a perdu, elles permettent de le revivre un peu, de ne pas oublier qu’on a aimé et qu’on a été aimé. Quand on aura fait la vie, dit-il. Il y a quelque chose d’obsessionnel dans l’idée de ne pas passer à côté de sa vie, dût-elle, cette obsession, générer l’erreur et le regret. Serge aura attiré les plus grands auteurs sur sa voix et son charisme. Pas mal pour un apprenti-coiffeur, premier métier qu’il aura partagé avec Fabrice Luchini : aux cheveux bien coupés, la Beauté n’attend pas le nombre des années.

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10/03/2015

Paroles & Musique (4/7).

Je ne peux pas dire combien de fois j’ai écouté cette chanson, les compteurs de mes ordinateurs successifs ayant renoncé à les chiffrer. Une chanson écrite à la première personne du singulier, mais en mode féminin, par un élégant « surprise », un « régulière » antinomique, au vu du premier titre du morceau, initialement composé pour Jeanne Moreau, sans doute en réponse, plus de trente ans après, à son « Tourbillon de la vie ». Le ménage à trois, celle qui est choisie, pas seulement aimée (la nuance est de Gide, qui n’y connaissait rien en femmes, mais en amour, oui), c’est le thème sous-jacent de la chanson, qui trouvera un titre définitif « à la Murat », puisque « la chanson de Dolorès » n’est justement pas sur l’album du même nom. C’est sur la scène qu’il l’a chantée, en 1998, jamais – ou rarement – depuis (c’est drôle, je sais qu’en écrivant ça sur ce blog, des alertes vont sonner chez des Muratiens qui s’empresseront de répondre et de corriger…). Il n’empêche, ce morceau devenu mythique du répertoire du Bougnat est un sublime équilibre de mots simples et rebattus, qui fonctionne : peut-être parce que les oiseaux derrière (qui remplacent le public dans « live in Dolorès ») signalent à ceux qui écoutent ça qu’il faut aimer, parce que tout ce qui est éphémère dure, dans ce domaine. A ce jour, Murat n’a jamais rien écrit sur cette femme-là, maintenant, sur ce qu’elle pense de son choix, rétroactivement. Modestement, je l’ai fait, moi : un texte, « Indifférentiste », que je considère toujours, quinze ans après, comme le plus beau texte que j’aie jamais écrit. Qui souffre hélas d’une malédiction dont je parlerai un autre jour, peut-être.

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09/03/2015

Paroles & Musique (3/7).

De Léo, je garderai, à vie, le souvenir de ce vieil homme claudiquant, demandant au public de le laisser partir sans bruit, sur les derniers accords de « Avec le temps », cette antiphrase dont il aura souffert, jusqu’au bout, qu’elle ne fût pas comprise comme lui l’entendait. Mais c’est « Lorsque tu me liras », cette supplique, une de plus, qu’il adresse à Christie, alias Marie-Christine, ou Marie, plus rarement Maria-Cristina, de son vrai nom, fille de Jesus et Juanita Diaz Alfonso, qui ont traversé les Pyrénées à pied en 1947, leur bébé dans les bras, pour fuir le franquisme. Léo avait trente ans de plus qu’elle et pourtant, c’est elle qui l’a rasséréné, lui a donné des enfants, l’a fait passer de « Il n’y a plus rien » à « l’espoir » (dans les ventre des Espagnoles…). Il oppose dans la lettre qu’il lui dédie le silence qui est le sien aux paroles qu’il lui adresse, se bat avec ses démons, s’accroche aux futurs qu’il revendique, se bat comme il s’est toujours battu, avec la honte, la solitude, la joie triste, éternel oxymore de la chanson française. La dette qu’il faut payer au monde, le difficile (quelle prononciation !), seul chemin selon Kierkegaard. On aura tout dit de Ferré, son anarchie caviar, sa mégalomanie et son complexe mêlés, ’heure peut sonner, l’examen de Minuit est largement passé.

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08/03/2015

Paroles & Musique (2/7).

J’aurais pu choisir, dans la discographie de cette artiste singulière, la chanson qui m’aura inspiré la nouvelle de ma bibliographie que je préfère, cette histoire faussement légère qu’elle dédie à son grand-père et moi aux histoires dont on ne sait pas, avant la dernière seconde, si elles auront lieu ou pas. Rose, en 2006, est apparue avec « la liste » et « Ciao Bella » (donc). Décemment, je ne peux pas passer ma vie à lui piquer des titres, mais j’emprunterais bien celui-ci, aussi, par sa façon sublime de détourner la bluette pour décliner le lait de la tendresse humaine, puisque je ne suis pas le seul à m’inspirer d’autres. Toujours la mémoire en mode déclinée : après l’adresse au grand-père, Rose, auteur-compositeur-interprète, trouve les mots des amours terminées, fait le constat de la perte, toujours plus prégnante chez les êtres sensibles que les états qui découlent d’elle, fussent-ils meilleurs que ce qui les a précédés. La voix est fragile, dans l’élégie, mais l’accompagnement folk la soutient, et le susurrement final m’incite à penser que les sept jours que vous allez passer avec moi ne vont pas forcément vous donner le moral. Mais c’est un principe, chez moi : il faut passer par le très triste pour savoir que son chagrin n’est pas aussi exclusif qu’on le croit.

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07/03/2015

Paroles & Musique (1/7).

Puisque mon rapport à la chanson va être évoqué à Fleury, la semaine prochaine, j’ai envie d’écouler les sept jours restants en donnant corps à ce que n’importe quel écrivain de la contrainte adore faire : des listes. Une liste de sept, c’est court, quand on aborde un domaine aussi vaste que la chanson (française, je vais pas en plus m’imposer d’autres crises !), et puisque choisir c’est éliminer, que n’importe quelle liste (dont celles en marge de ce blog) est regrettée par son auteur au moment même où il l’a terminée, je ne vais pas trop réfléchir, et assumer après : c’est mieux comme ça. Comme j’entendis le « Message personnel » de Françoise Hardy (chanson écrite par Michel Berger) tout à l’heure à la radio, je me remémorai une autre de ses chansons, écoutée en boucle – ce sera le principe, ainsi que le fil mémoriel de cet autoportrait en chanson – « la question », dont elle a écrit les paroles sur une musique de Tuca, une brésilienne qu’elle vient de rencontrer, en 1968 (tiens…), qui finira par composer, arranger et diriger un album éponyme, qui reste le préférée de Françoise Hardy, preuve vivante qu’elle ne dit pas que des bêtises quand elle parle de musique. « La question », c’est un de ces textes qui reste à vie, une complainte, celle de la rupture et de l’étouffement. Plus un suspens inouï en fin de phrase, une respiration qui reste, un souffle d’une beauté ahurissante. La voilà.

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06/03/2015

In extremis semper.

Le nombre de fois où les conditions m'auront forcé à écrire que je ne peux pas écrire vaut confidence, assurément (note sans wifi, note toute pourrie).

22:31 Publié dans Blog | Lien permanent

05/03/2015

Rien (de plus).

- Tu n'as pas d’idée pour ton billet du jour?

- Non, pas plus que Chavassieux, sur Kronix.

- Tu ne vas pas leur refaire le coup du billet qui raconte que tu n'arrives pas à écrire un billet, hein ?

- Non, non, bien sûr que non. Je l'ai déjà fait, comme tu dis. Je ne veux pas paraître comme ça, paresseux.

- Tu n'es pas paresseux.

- Oh si, je le suis. Je le revendique, même : les paresseux sont ceux qui savent se mettre au travail quand celui-ci en vaut la peine.

- Tu as préparé ton interview par Christian, le 14, à Fleury ?

- Non. Je souhaite juste que lui l’ait préparée mieux que j’ai préparé la sienne en octobre : j’ai le sentiment d’être passé à côté de plein de choses.

- ça se passera bien. Et ton atelier de la fin mars?

- L’atelier? Ah oui, il faut que j’en parle avec Nicolas (Couchepin), qu’on trouve le moyen de croiser nos récits…

- Tu peux parler de Aurélia, de Paco... Je ne sais pas, tes chantiers en cours.

- Aurélia, je n’en parlerai plus avant qu’il paraisse, s’il paraît. Je pourrais parler de mon asséchement littéraire, mais ça ne se fait pas trop.

- Tes lectures ?

- J’aime bien l’exercice de la critique littéraire, et je suis toujours heureux de chroniquer les livres des gens que j’aime. Mais je ne veux pas être réduit à ça, ça m’éloigne de ce que je suis réellement : un auteur avant tout. Ou un ex-auteur, qui sait ?

- Faut pas dire ça. Tu as des priorités, c'est tout

- En ce moment, elles sont ailleurs, oui...

- Et la musique ? Tu peux parler de « Littérature & Musique », du quatre titres qui va peut-être voir le jour, de l’association flamenco/violoncelle que tu envisages…

- Je pourrais, oui, mais si c’est pour être déçu, encore…

- Et la lecture de « Trois-Huit » par Thierry Mortamais, ça tu peux en parler, non ?

- Oui, ça, peut-être... Mais tant que ce n’est pas fait, là aussi…

- Est-ce que tu as parlé de ton projet avec Sandro, la mise en musique d’une nouvelle, des chansons qu’elle t’a inspirées ?

- Pas encore, c'est prématuré.

- De la présentation de « Tébessa » aux collégiens de la Croix-Rousse? De la lettre que tu as reçue de cet homme qui l’a lu et qui t’a parlé de ses parents, tébessiens estimés, enterrés à la Croix-Rousse ? De ton recueils de nouvelles à partir de chansons de Guillo, Vitas, Fergessen et autres ? De « Charlotte sometimes », ce roman que tu aimerais reprendre ? De la revue Brasiko Folio ? D’une année sans édition, mais d’un paysage qui va changer ? De ton fils qui va avoir vingt ans, de ce voyage à Cuba que tu envisages avec lui ?

- Le problème, tu vois, c'est qu'il ne se passe pas grand chose dans ma vie.

NB: les passages en italique sont repris de la note de Christian, tels quels.

15:38 Publié dans Blog | Lien permanent