05/11/2014
Un roman à l'envers (2).
Antoine appelle l'Ukraine "l'Afrique blanche", au regard d'une certaine nonchalance qui la caractériserait. Quatre années d'expatriation ici, le temps de tomber amoureux d'une Russe, pas au bon moment, pas au bon endroit. Il y a hiatus, historique et inextinguible, entre l'Ukraine et sa mère partie dont elle refuse la maternité, la jugeant inclusive et autoritaire. Des poètes ont payé cette émancipation de leur vie, de leur exil. Antoine n'en est pas là, ni dans la vie, ni dans la poésie. Mais il a vu la ville se transformer en champ de bataille, témoigne de l'odeur du sang, encore, dans certains quartiers. Il a été là où l'histoire s'est jouée, en a tiré une méfiance plus grande encore envers la façon occidentale de constamment la réécrire. On a parlé de ça, de foot et de tennis. J'ai gagné une soirée de vie et d'apprentissage: le pain est noir, ici, mais j'ai commencé par le blanc.
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Un roman à l'envers (1).
Il suffit de tomber sur une horde de retraités français, bruyants et potaches, pour détester les voyages. Mais le seul survol du Bosphore, le souvenir heureux et incarné auquel il me renvoie, m'a redonné le sourire en arrivant à Istanbul, passager très spécial en transit, comme disait l'autre: non que j'aie changé de statut, d'un coup, comme ça, mais sur les dizaines de milliers de voyageurs, dans cet aéroport, combien sommes-nous à partir au bout du Vieux Monde, suivre les traces de personnages de papier? 2044km au compteur, affiche fièrement l'écran, dans l'avion, et quelques heures, encore, quelques autres milliers de km, avant que je débarque en Ukraine. Ce projet si irréel, ce parcours pratique à restituer par écrit, je vais l'éprouver, avec des inconnues qui, dit-on quand on n'y est pas, en font le charme. La première difficulté - se débrouiller pour rejoindre sa location de l'aéroport, dans un pays où la langue, écrite et orale, est totalement étrangère - est levée, d'ores et déjà: grâce à un ami d'enfance, un chauffeur m'attend là-bas. Pas de quoi me faire perdre la tête non plus, tout juste une concession. Et ce même rapport au monde, en décalage: pour le remercier de cette attention, je lui ai apporté des livres.
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04/11/2014
Faute de (petite) frappe.
Paix à son arme.
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03/11/2014
Fortune.
C'était pourtant une belle idée littéraire, cette somme de péripéties heureuses, cette chance qu'on sollicite et qui répond, à chaque fois, jusqu'à la fin, ce moment où elle présente la note.
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02/11/2014
Les moments Jules & Jim.
Rien à voir avec une éphémère participation au blog d'une librairie éponyme, mais tout avec cet instant, dans le roman d'Henri-Pierre Roché et le film de François Truffaut, où la vie de deux des protagonistes se voit suivre un autre chemin que celui qu'elle aurait pu prendre s'ils s'étaient retrouvés au rendez-vous fixé, si lui n'avait pas quitté le café dans lequel, pensait-il, elle ne le rejoindrait pas, si elle n'était pas arrivée avec une heure de retard à ce rendez-vous là. Quelque chose de l'ordre de la phénoménologie, mais tout n'est pas intelligible, dans ce monde.
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01/11/2014
Hors les Murs.
Femme-muraille, devant ces murs qui prétendent enfermer jusqu’à ce que tu représentes, ton geste, l’hypnose de tes bras, comme une gitane dont l’esprit se confondrait avec le feu, est une rédemption, il ré éclaire l’état dans lequel l’homme s’est condamné à être celui qu’il n’aurait jamais dû être. Les cerbères qui te délimitent ne sont plus imposants que par ce qu’ils ont enfermé, les âmes qu’ils ont confisquées, les vies, les phénomènes : à leur pied, tu deviens LA vie, tu rayonnes, tu es à la fois la féminité et ses incidences. A mi-chemin entre l’ombre et la lumière, tu cherches l’improbable issue, tu es celle qui part, celle qui redessine les contours que les huis jamais franchis de chacune des pierres qui font les murs avaient à jamais intégrés et définis. Dans la cambrure de tes reins, le galbe de tes hanches, il y a l’espoir qui se tend, dressé vers un infini plus haut encore, plus lointain dans l’âme que l’obstacle infranchissable. Le geste est authentique, comme le sera l’enjeu, quand derrière l’élément, tu te donneras à celui qui te fera l’amour pour recommencer, réinventer l’état de nature : alors, l’imposant édifice rendra les énergies, il épousera le rythme de tes mouvements, la pierre retrouvera de sa majesté ; d’un coup un peu moins glacée, elle aura l’écume de tes tempes qui se serrent… L’équerre des murs qui te font face n’est plus autoritaire, elle est soumise, elle semble indiquer la direction qu’elle a longtemps refusée, et la volupté que tu ressens à l’idée de t’y engager n’est rien par rapport à l’immensité du temps que tu libères, que tu recrées, après qu’il sera détruit. Temps réel, temps maîtrisé, aimé et materné, ton hymne est à la femme et à l’amour, il oriente, considère le sens qu’il va donner à la marche et la conscience de son contraire. Sisyphe sans absurde, tu deviens le cours et sa justification, jusque dans la douleur. Comme une reine, une égérie. La pierre se fissure, elle libère les interdits, les âmes de ceux qui y vivaient reclus, elle te porte, tu deviens l’immensité de ce que tu as réalisé, une cime parmi les sommets. La nudité t’épargne, ton corps est un rempart, il crée une distance attractive, toutes les ondes s’y retrouvent, comme dans un champ magnétique. Tu parviens même à faire de la dissymétrie des murs un équilibre parfait, que l’arête de ton dos fige, que ton vol suspend. L’estampe japonaise qu’on ferait de ton image appellerait un haïku, circonstanciel:
J’entends tes silences Et devine tes conflits Je ne dirai rien
mais c’est le chant de la terre et de ses barrières naturelles que tu entreprends de réécrire, et d’aimer à nouveau, la liberté qui n’est plus qu’elle-même, délivrée de son illusion. Libre, tu concours à la liberté des autres, tu la façonnes, la malaxes comme tu le ferais de l’argile, qui s’insère, gagne du terrain sur le roc, et, paradoxalement, gagne en justice ce qu’il perd en solidité. Nous sommes déjà ensemble, moi derrière le mur, toi qui le franchis et le ruine ; mais quand nous le serons vraiment , regarde moi à chaque seconde comme si c’était la dernière fois, que nous ne verrons pas venir, puisque nous serons ensemble… Alors seulement, la pureté de ton geste nous reviendra et nous éprouverons de la mélancolie, celle des nuits d’Espagne, auxquelles renvoie ta danse, la liane de tes bras. Nous pourrons nous dire que nous n’avions pas fini de nous aimer, que les murs qui enferment ne sont que les projections de toutes nos vies cassées, nous prendrons la mesure de ce qui nous reste à réinventer. Nous serons nous, vraiment, pas ceux que nous aurions dû être. Quoiqu’il nous arrive désormais, tu sais maintenant que pour moi, il est écrit que ceux qui se sont aimés comme ceux qui se sont défaits, finissent, forcément, par se retrouver.
Le Mur, ainsi, devient liaison, il relie, s’il est entre, c’est pour mieux assembler : c’est pour ça que tu donnes l’impression de l’épouser, de rentrer dedans, comme un spectre pour qui rien n’est infranchissable. Mon champ d’amour pour toi n’est plus paradigmatique, mais syntagmatique : un horizon, un infini.
Voilà. Hors les murs, notre vie existe de nouveau ; ils sont des épreuves plus que des obstacles, ils se passent. La pierre ne s’envisage plus en hauteur, elle forme des couloirs, sert le labyrinthe dans lequel se perdra et ton corps et le souvenir que je m’en fais, ta nudité et l’effet qu’elle a sur le regard. La confusion est grande, grande est aussi la tentation d’être l’endroit où tu te montres dans la plus absolue de ta prude impudeur : soudain je me métamorphose, mes jambes, mes bras deviennent de pierre, je me fige, je m’emmure et te regarde danser. Je n’ai pas ton altruisme, et désire te garder pour moi, à jamais. Je deviens la sentinelle du temps qui te valide : l’impression d’avoir à reconstruire constamment le peu que nous avons édifié est à la fois excitante et éprouvante, mais si tu me laissais le choix entre partir et t’oublier, je choisirais de t’oublier, parce que ça ne m’engage en rien, puisque ce n’est pas possible… Toi à la danse, moi à l’édifice, tu m’accompagnes déjà, comme une contrainte libératrice; car si j’ai enfin le courage et l’envie d’ouvrir cette brèche que je sens nécessaire à mon bonheur, c’est avec toi que j’aimerais l’explorer pas à pas, comme un voyage intérieur. Vers la lumière.
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31/10/2014
Sans rien dire.
Le monde est plat, dit un passant, je le sais de douce sûre. Toutes les sources sont sûres, répondit un témoin, dubitatif. Oui, eh bien vous verrez, assura l'autre, vexé. Un troisième fit circuler l'information, sans préciser de qui elle venait. Ceux qui l'entendirent trouvèrent confirmation auprès du premier, arrivé inopinément, que les autres ne reconnurent pas. C'est bien cela, alors, dirent-ils en choeur. Bon, tout ça ne nous dit pas si le concert de Morrissey au Radiant est maintenu ce soir, ou si...
17:21 Publié dans Blog | Lien permanent
30/10/2014
Susciter l'engouement.
Dans moins d'une semaine, je pars en Ukraine. Comme à mon habitude, rien n'est prêt, surtout pas mon esprit, qui ravive cette impression étrange d'y aller pour rien et de n'aimer, du voyage, que le retour. Mais j'y travaille, pas à pas, et je débarquerai dans un univers totalement étranger: une bonne solution pour échapper aux lourdeurs de ce monde-là.
18:28 Publié dans Blog | Lien permanent