05/05/2012
Oingt oingt.
J'ai mangé cet après-midi, à la boutique de la Picolette, des nounours à la guimauve d'antan, des soucoupes avec de la poudre dedans, des souris caramel chocolat, des boules de coco et un collier de bonbons à croquer et il ne s'est rien passé! Ou si, j'ai dû prendre du poids. Ce Marcel Proust n'aura été, je le subodorais, qu'un vieil affabulateur. Qui aura sans doute mal digéré son cookie.
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04/05/2012
La Sévigné & Moi (4)
Je ne savais pas non plus, en écrivant la première partie de ce « cache-cache » si particulier, que le personnage le plus dense serait, à mon sens, celui d’Emilie. Parce que si l’élan d’écriture m’a été donné par Jean, c’est bel et bien dans la transformation d’une émotion en évidence romanesque que se jouent, souvent, les ressors dramatiques. Itérer d’un accident (la noyade d’Emilie) un récit qui se fonde déjà sur une chute, c’est périlleux, sans jeux de mots. Ou plutôt avec. C’est de là, ou de très loin, je ne sais pas, que s’est construite, également, la damnation des personnages et par là-même celle de leur entourage. Sur la citation de Machado maintes fois donnée ici, également, sur les lâches. Je ne savais pas non plus que je devrais l'appliquer à d'autres participants de ma partie de cache-cache à moi.
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03/05/2012
Vlan!
Les maisons d’édition, aujourd’hui, se servent du courriel pour dire le plus vite possible aux impétrants qui sollicitent une publication de ne rien attendre d’elles. Je comprends, c’est écologique, davantage que cette tonne de papier noirci pour rien, et ces lettres de refus lasses et obligées. Mais qu’elles le fassent aussi rapidement, à peine – quelques heures - l’enveloppe reçue, me paraît d’une violence insigne, et difficile à vivre pour un auteur. Je sais que la déception est l’essence de l’écrivain, mais quand même.
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02/05/2012
La Sévigné & Moi (3)
Passé le temps de l’inspiration initiale, il m’a fallu un événement, qui fasse matière. Je n’avais aucunement l’intention, pour cette « partie de cache-cache », de reconstituer l’enfance de Jean à partir de ses souvenirs, mais de lui en inventer une, putative, à partir de mes impressions. Retrouver, en filigrane, l’enfant qu’il a été. La chute d’une falaise, dont je ne sais plus comment il lui est venu de m’en parler, m’a paru l’élément le plus juste : Jeannot, le personnage, et à travers lui les deux autres, plus, par extension, tous ceux qui les entourent, y compris les adultes, seront sur une corde raide. En déséquilbre permanent, entre la chute et la rédemption. En me racontant ça, il a donné le ton à la partie. Et confirmé son issue : il ne pourrait y avoir de chance pour tout le monde.
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01/05/2012
Camille, dernière!
Déjà plusieurs années que je parle de ce projet. Mais les enveloppes sont prêtes, demain, elles partiront. En 2008, déjà, j'avais souhaité que Stefan Petrier fût de la partie, je l'ai déjà dit, aussi. Vous vous rendrez compte par vous-même, via cette bande-annonce, de ce qu'il a apporté au projet. Reste maintenant à ce que des éditeurs soient convaincus et surtout que la distribution soit à la hauteur des attentes. Je la laisse partir, Camille, puisqu'elle ne m'appartient plus, qu'elle ne m'a jamais appartenu. Je l'ai juste retenue un instant à mes côtés, comme tous les autres. C'est définitivement à Aurelia, maintenant, de jouer.
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30/04/2012
Des bulles de temps.
On dit depuis l’Antiquité (et accessoirement dans le fabuleux « Rois & Reine » de Desplechin) que les femmes passent de bulles en bulles – qui doivent être des bulles de temps – quand les hommes vivent sur une droite, pour mourir qui plus est. Dans « Grand huit », d’Isabelle Kaufmann, chacune de ces bulles de temps est sondée narrativement jusqu’à ce qu’elles se croisent. Dans l’action fondatrice – et force perturbatrice à la fois – Kitz arrête sa Bugatti le long d’une route : une femme est étendue sur la chaussée, morte ; dans son véhicule à elle, il y a un nouveau-né, qu’il prend. Dans le même temps, sa femme l’a quitté pour son plus proche collaborateur, ils l’ont trahi et lui prend une revanche, ce faisant, sur la vie. Il élève David, qu’il adore ; en retour, David l’aide, de son point de vue d’enfant précoce et ingénieux, à concevoir les jouets qu’il crée, du ramoneur à pipe au manège lumineux de vie. Le tableau est idyllique jusqu’à ce qu’on enlève David et que son ex-femme - menaçant de tout révéler - lui demande, plutôt qu’une rançon classique, de restituer le temps qu’elle a perdu. A chaque fois par tranche de huit ans, en hommage, certainement, aux arabesques qu’elle aimait dessiner et dont elle a fini par faire un modèle d’existence, adorant telle patineuse artistique, vénérant l’anamorphose parfaite proche, allongée, de l’infini. Le nœud gordien de « grand huit » ne s’arrête pas à sa dimension policière : les apparences sont trompeuses, les ravisseurs ne s(er)ont pas forcément qui on croit qu’ils sont. Il y a aussi deux scientifiques qui touchent au but puisqu’il ne leur manquait qu’une personne prête à tout –renoncer au cartésianisme – pour leur servir de cobaye. Au hasard des errances de Kitz, Isabelle Kaufmann nous fait croiser Einstein, par le biais de sa théorie récente de la relativité générale. Exeunt Euclide - sa géométrie aux trois axes droits et à la lumière rectiligne - et le bon sens - chose au monde la mieux partagée – Kitz consulte les savants-fous (Schweich et Reinhardt) en même temps qu’une voyante bulgare qui possède, dit-elle en lui jouant de la cornemuse, un divan sur lequel s’est assis Frédéric Chopin. D’apparence loufoque, dans le rythme des chapitres et dans les portraits de ses figures, « Grand huit », une fois la surprise passée, fonctionne comme roman parce qu’il plonge le lecteur dans l’interrogation centrale, la plus inextricable de toute métaphysique : comment faire, dans l’urgence, pour rattraper le temps perdu, le concéder, qui plus est, à quelqu’un qui nous en veut ? J’ai déjà écrit ici, récemment, sur la mythologie d’une linéarité du temps, cité Grégoire XIII à qui l’on doit le 15 octobre 1582 comme lendemain du 4, par exemple. Mais Kaufmann va plus loin encore puisqu’elle mêle l’angoisse du – faux – père à la quête absolue d’une éternité qu’il faudra trouver pour la céder. Les histoires s’emmêlent, on retrouve Odile, sans la linéarité d’existence exposée au départ, le lecteur passe d’une sphère de narration à l’autre en se demandant ce qui peut bien les relier : c’est donc un exercice réussi, même si je dois concéder une certaine impatience avant qu’il ne m’accroche. Tiens, une impatience, encore une marque de temps dont on aimerait qu’il passe plus vite ! Ou qu’il rejoigne les assurances sur lesquelles, souvent, on se repose. Kaufmann interroge même le sujet de la femme pensante, Marie Curie et quelques rares autres exceptés ; les figures féminines sont elliptiques, dans « Grand huit » : Llena, Claudia, des personnages in absentia ou doublement factices. A chaque arabesque – mise en abyme – supplémentaire, on cherche une réalité qui en cache une autre, systématiquement dissimulée. Et révélée à la fois : par les prédictions de la cartomancienne, par Odile, présentée dans la 2ème partie du roman comme on ne l’avait pas suffisamment perçue au début : mi-ange mi-démon, aux pouvoirs surnaturels et au regard bleu acier. Kaufmann se plaît à faire entrer son lecteur dans les circonvolutions, les volutes, les rouleaux des vagues que son héroïne a érigés en modèles d’existence. Elle remonte le cours des enfances de chacun, introduit tel ou tel repère temporel qui n’empêche pas le contemporain de sourire, tel le secret – que je tairai – de l’origine du nom Haribo, voire de celle de la Recherche. Du temps perdu, évidemment. Elle reconstruit les souvenirs, la mémoire, point par point, et les misérables petits tas de secrets passés à la moulinette freudienne, dont le premier, ici, est fondateur d’un édifice du mensonge. Intègre nos duplicités – gémellités - dans des rebondissements romanesques qui laisseront le lecteur pantois ou exsangue, mais pas indifférents. Avec l’infini en soi et en perspective. Quand Schweich s’interroge sur ce que Bergson dit du temps du physicien plutôt que de celui du philosophe, Kaufmann laisse le lecteur réfléchir mais a déjà choisi. Son dénouement sera magistral, à coups d’équations vitales à une seule inconnue revendiquée mais à beaucoup plus que cela en fait. Genre x = 5+8. Qu’elle se mette en huit et qu’elle coupe les cheveux par le même chiffre, son roman schizophrène n’y va pas par huit chemins pour emporter l’adhésion.
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29/04/2012
La Sévigné & Moi (2)
Un jour que j'étais dans la maison de Jean Frémiot et que nous confrontions nos habitudes de citadin et de campagnard, j'ai lancé comme un défi que je pourrais écrire un roman sur lui, sur la façon dont je l'imaginais enfant. En ce temps-là, j'avais déjà écrit ce qui deviendrait "Tébessa", mais je n'étais pas dans une perspective d'édition, ou alors d'auto-édition, avec des petits livrets plastifiés qui accompagnaient les premières expo de Jean ou de Jean-Louis Pujol, les premières scènes de NADA aussi, dont on ne savait pas qu'il n'y en aurait plus. Je dis ça à Jean Frémiot donc, avec un peu de provocation, et la question que je lui pose immédiatement après, c'est : est-ce que tu avais un ennemi quand tu étais petit? Et là il me répond tout de go Richard D., avec un nom en deux syllabes que je ne saurais répéter ici, pas plus que je n'ai pu l'utiliser pour le roman. Cette inimitié, si spontanément exprimée, a donné le premier élan au récit. Il s'agirait d'une tragédie et les deux enfants seront rivaux. Il restait à dégager un enjeu, qui sera donc Émilie. Laquelle aurait pu s'appeler Sabine, puisque j'ai aussi demandé à Jean s'il se souvenait, a contrario, d' une jeune fille qu'il aimait bien et qu'il m'a répondu Sabine. Mais Sabine Heudebert. Or, donner le nom d'une marque de biscottes à un personnage de roman n'est pas le meilleur moyen de commencer. Et j'avais une idée en tête. Dont je ne savais pas, néanmoins, qu'elle m'empêcherait pendant des années d'en poursuivre l'écriture...
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28/04/2012
La Sévigné & Moi.
J’ai quatorze jours pour préparer ce que je vais dire à Grignan sur le thème du deuxième roman. Je parlerai, je l’ai dit, des deux autres romans sélectionnés, avec « la partie de cache-cache » et « Du domaine des murmures », déjà chroniqué. Ce sera une rubrique unique, comme un feuilleton, qui n’intéressera sans doute personne mais comme personne n’écoute, comme dit Miossec, eh bien je le ferai quand même. Et ceux qui auront suivi jusqu’au bout auront droit, comme dans les meilleurs films américains à gros budget, à une fin alternative du roman ! Mais comment vais-je pouvoir expliquer qu’au même titre que – je donne cette thèse du sociologie Bernard Lahire à chacune de mes interventions – un auteur qui n’est pas rémunéré pour le travail qu’il fournit est obligé d’en prendre un autre (un second, qui devient de fait le premier), mon rapport à « la partie » comme deuxième roman va être difficile à expliquer dans la mesure où c’est un roman dont j’ai interrompu l’écriture. Définitivement, le croyais-je alors. Pour compenser cette déchirure qu’entraîne un tel renoncement, de roman, j’en ai écrit un autre. Pour m’amuser. Sans savoir, là non plus, que ce roman, mon deuxième, de facto, encore, deviendrait mon troisième dans l’édition. Rien de linéaire là-dedans, alors. Demain, la génèse.
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