17/04/2025
Girafe lymphatique - Épisode 2.
À ce stade, le portrait est-il encore valable ? me demande-t-il. Le rêve de tous les peintres, c’est d’inscrire un portrait dans un paysage. À l’écrit, c’est le caractère qu’on recherche, le trait dans son autre acception. Je crois que tu la tiens, oui, mais n’est-ce pas à cet instant que tu la perds ? À quelle distance met-on sa propre esquisse, c’est difficile de le dire. En pein- ture, le moindre mouvement est complexe : si on l’inscrit trop, on n’est que dans la représentation du mouvement, pas dans le mouvement lui-même. Ta Clara, on la voit venir, on sent bien qu’entre son père et elle, il y a mi- métisme, qu’ils agissent dans l’absence l’un de l’autre comme s’ils s’étaient donné le mot. C’est de la connivence, mais je préfère garder la distance avec ceux que je représente : je ne veux pas les laisser entrer. Sec et économe, c’est le pacte. Je te surveille. Mais tu nous donnes envie d’en savoir plus, quand même. Comment ça se construit, un être, sur une absence injuste. J’y mettrais quelques touches sombres, un jeu de lumières et d’ombres sur le visage, puisqu’elle n’aime pas qu’on la regarde. Ses bulles de temps, j’en laisserais une crever, l’éclabousser, juste pour la voir constater ça avec sa distance un peu hautaine. Là, tu vois, ça donne une profondeur au person- nage. Parce que c’est dur à représenter.
Girafe lymphatique, le Réalgar, 2018
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