25/09/2013
Dans les transports en commun.
Je prends le métro et le bus tous les jours, désormais, sans aucune impression d'être relégué, socialement: j'ai gagné une heure vingt de lecture par jour - le dernier Mingarelli m'a pris quatre voyages - et j'ai dans les oreilles (concession obligatoire) des musiques qui me transportent, ou des chansons que, parfois, j'ai moi-même écrites. On fait pire.
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24/09/2013
Crimes et achattiments.
Dans "Souvenirs de la Maison des Morts", Dostoïevski démontre que, quoi qu’il ait fait, un assassin est toujours un homme. Dans ses morts à lui, qu’il met en scène dans "l’A. des V.", Christian C., toujours lui, finit par démontrer, avec les deux derniers personnages qui survivent à sa fresque naturaliste, que les vivants sont redevables des morts autant que l’inverse. Si un roman russe me vient en analogie, immédiatement, c’est parce que le choc de la lecture fut rude. D’abord par son privilège, et son support : lire, à sa demande, le manuscrit d’un ami écrivain avant la parution du livre, est une belle marque de confiance. Que j’ai failli trahir. Il y a quelques mois, je n’en avais ni le courage, ni la capacité, et l’histoire naissante, qui s’annonce exhaustive dès les premières lignes, de Charlemagne – oui – dans une campagne qu’on situera entre Roanne et Lyon, en plein XIX° siècle, m’a un peu effrayé, je dois concéder. Jusqu’au moment où je m’y suis plongé, sans pouvoir la lâcher, retardant, comme l’auteur – comme il l’écrit lui-même au lecteur, concluant un cycle d’insères récurrentes – la fin de l’histoire. Qui lâche Charlemagne, sa famille de pauvres hères faibles et dégénérés à peu près à sa moitié, quand on s’imagine qu’il va durer tout du long. Quand le récit se clôt, je l’ai dit, sur les deux derniers vivants, les deux rescapés, un de la vie qu’il s’est créée, l’autre de celle qu’il a subie. Je ne raconterai rien, puisque le livre s’offrira au public bientôt ; j’ai même préempté l’animation de la rencontre au Tramway, sur proposition de Romain, intrigué par mon enthousiasme. Parce que l’affaire des vivants, selon moi, est d’abord un grand livre par sa grande qualité d’écriture : voilà, en plein XXI° et résurgence de l’autofictif, un auteur qui va mêler les analyses sociétales naturalistes aux meilleures descriptions des univers qu’il dépeint. Puisque Charlemagne naît dans une ferme défréchie, c’est la campagne profonde, ses rites et ses saletés que l’auteur va décrire ; puisqu’il s’élève très rapidement à la force de ses bras et de son intelligence mêlés, c’est le monde de l’industrie, des premières toiles cirées, du commerce du tissu et de la bourgeoisie qu’il restitue. Les descriptions sont profondes, précises et permanentes : quand Joseph-Antoine Pajaud se présente à la boutique, ce n’est pas Alma – future parti de Charlemagne – sur laquelle on focalise, mais l’uniforme de celui-ci. Dont on se doute, au fur et à mesure qu’on nous en présente la coupe rectiligne, que celui qui l’habite ne l’est pas autant. Une scène et voilà convoquées tous les misérables petits tas de secrets que sont les hommes en conquête ressurgissent. Magnifiquement mises en abyme : les plus misérables ne sont pas ceux que l’on montre comme tels, même si la société et la justice des hommes finissent toujours par les désigner. Dans « l’A. des v. », on trouve des termes obsolètes, « plicaturé », « déjetaient » ou précis « arbres raffaux », « algides »… « Chitine », « cilices », « hétaïre », qui renvoient le lecteur à son élévation (dictionnaire) ou sa paresse (canapé). Ou au lexique en fin d’ouvrage, qui éclaire les « copurchic » et le désormais fameux « achatti » - qui aime les douceurs, comme les chats – qu’il nous demande de faire circuler. Chose faite. Dans le même temps, puisqu’une telle entreprise ne saurait être verbeuse, on recrée à l’identique, à l’écrit, le parcours des visiteurs de l’Exposition Universelle de Lyon, en 1872 ou celui des clients d’un bordel découvrant leur première négresse (mot remis dans le contexte en index, moins péjoratif, dit Littré, que noire). On suit l’évolution des personnages, le lien ou celui qu’ils ne formulent pas, la transmission, on continue in abstentia avec de belles personnes qu’on ne voit pas ou plus – Louis, et surtout Jeanne, qui m’a émue – on croise l’épigone de Louise Michel puis Louise Michel elle-même, on traverse les guerres – à chaque génération la sienne et la façon d’en revenir – les conquêtes et les déchéances, les procès, l’homosexualité, la naissance de l’automobile. A la lecture, je pense au « Dans la marche du temps », de Daniel Rondeau, remarquable roman du XX° fondé sur les mémoires d’un père très âgé et de son fils d’une cinquantaine d’années, qui retrace plusieurs conquêtes, révoltes et acquis sociaux de haute lutte (la révolte des vignerons en 1911 pour commencer). Ici, moins de lyrisme, même dans le parcours remarquable de Charlemagne : la rudesse n’est jamais loin, autant ne pas s’y attarder, mais une précision, comme toujours chez C., un sens du détail entomologique. Si j’avais à trouver une nuance, je dirais que Charlemagne disparu, le roman retombe un peu (un peu), mais ce n’est même pas un reproche, puisque c’est lié à la personnalité, velléitaire, d’un personnage qui n’a pas – ni dans l’histoire, ni dans sa narration – son charisme. La fin lui vient en aide, néanmoins, par la surprise qu'elle réserve.
Si ce livre m’a coupé le souffle, à sa lecture, c’est aussi parce qu’il est dans la tonalité et la démarche que je cherche encore pour mon « Aurélia Kreit ». Parce que c’est un roman russe de Mérives. Le livre d’un auteur dans sa pleine maturité. L’avantage, avec lui, c’est que je n’ai pas le temps de le jalouser, tant je suis heureux de chacune de ses pépites. Après « J’habitais Roanne », dont l’écriture a dû l’aider pour celui-ci, c’est la nouvelle démonstration que l’écriture n’est pas toujours là où on nous dit qu’elle est. Une diffusion nationale de « l’A. des V. » est totalement méritée, et attendue : il faut espérer que le public ne paressera pas.
PS : dans nos parcours parallèles et réversibles, je trouve cet amour de Hugo. Dont nous avons tous deux déclamé « A Villequier », un jour. Ironiquement, je trouve dans ce roman des références, une connivence récurrente au Grand Homme, les mêmes dont j’ai usé dans les premières pages de mon roman russe à moi. Celui qui verra peut-être le jour quand je serai prêt, dont l’importance m’apparaît plus encore depuis que la voie m’a été montrée.
NB: cette note a été éditée, titre et nom de l'auteur ont disparu. Ils reviendront vite, promis, quand le livre sortira. Dans ce milieu, il faut être prudent, et un poil superstitieux.
15:11 Publié dans Blog | Lien permanent
23/09/2013
Alcibiade mineur.
J’explique les passions de l’âme à mon fils, qui regimbe (mais prend des notes, pas folle, la guêpe!). Pas parce qu’il ne comprend pas, mais parce qu’il sait que chaque minute passée avec un philosophe le compromet davantage encore sur le chemin de la connaissance et, qu’à choisir, il reprendrait un peu d’ignorance. La vraie, la douce, la protectrice, celle dont on se convainc qu’elle est une bonne compagne, pas la plus belle du lycée, mais une de celles qui durent, quoi. Raté.
20:17 Publié dans Blog | Lien permanent
22/09/2013
Moi j'étais alors...
Je disais : si les 4 millions de téléspectateurs qui s’apprêtent à regarder, ce soir, l’Equipe de France de basket-ball tenter de conquérir le titre de Champion d’Europe avaient la bonne idée de commander « le Poignet d’Alain Larrouquis », ça me donnerait une forme de liberté que je prendrais volontiers. Blague à part, nonobstant un résultat dont je me fous à peu près, je ferai partie des 4 millions parce que le crissement des chaussures sur le parquet rappelle toujours à ma mémoire que du temps a passé et qu’il était bien, quand même. Qu’en plus de ça, il m’a mené, il y a bientôt un an – j’y reviendrai – à la Moutète, un des lieux fondateurs de ce qui a fait le basket français. Dans le PAL, par ailleurs, j’évoque le modèle – vite oublié – des chaussures d’un ancien international qui a montré par la suite qu’il avait bien d’autres qualités que celles qu’on accorde aux sportifs, un peu vite. Cet homme a ouvert un blog, récemment, et j’aime le consulter : l’écriture est vive et souvent touchante. A parcourir, ici.
17:54 Publié dans Blog | Lien permanent
21/09/2013
Understanding Poetry.
Je mets en page mon premier recueil de poèmes, que je compte destiner, dès cette semaine, à des éditeurs – un, surtout – dont le travail et la démarche me plaisent. Je m’aventure, un an à peu près après mon passage sur la scène du « Cabaret Poétique », sur un domaine qui n’est pas le mien, mais que j’explore de façon classique, puisque c’est le mode qui me convient : j’alterne dans ce recueil quelques aphorismes en prose et des poèmes, plus ou moins longs, dont « Etretat », en alexandrins ou en octosyllabes. Je surveillerai avec attention et flegme, promis, les retours de ces éditeurs-là – surtout un. Je suis prêt à assumer mon anachronisme et mon inadaptation au monde contemporain de la poésie, que je connais principalement par Houdaer, dont je parlerai vendredi. Mais il faut avancer et pour le moment, c’est le langage qui me vient.
17:52 Publié dans Blog | Lien permanent
20/09/2013
Contemplatif.
Parfois, lâcher la plume et aller faire un tour, dehors : retrouver les ambiances particulières de la mi-septembre, ses découvertes, ses rencontres, ses recommencements. Aller chercher dans la vie de quoi la retranscrire. Ne plus se soumettre à aucune espèce d’urgence.
15:53 Publié dans Blog | Lien permanent
19/09/2013
Sauts de mémoire.
"Tébessa, 1956" a beau avoir - déjà - cinq ans d'âge, qu'on continue de le découvrir et de l'apprécier me comble de joie. D'ici quelques mois, je pourrai - enfin - proposer la version de "l'Embuscade" que j'espère de tout mon coeur, avec Eric, Gérard et Clara. D'ici là, je joins à ce billet les mots de mes amis de "La Maison Vieille", dont j'ai beaucoup parlé, qui permettent à des auteurs comme moi de croire encore en la librairie. Qu'ils me collent, sans que j'aie rien demandé, avec des auteurs que je vénère comme Nancy Huston - à qui je me suis promis d'envoyer un jour "la partie de cache-cache", elle, l'habitante du Boischaut Sud - et Pierre Jourde - qui, lui, est parti avec quand il m'a précédé, dans la maison de Roiron - me gonfle non pas d'orgueil, mais de remerciements.
17:41 Publié dans Blog | Lien permanent
18/09/2013
Souffre-douleur.
On rit moins de ses mésaventures conjugales, au bureau, quand on apprit que l’air ravi affiché au matin ne venait pas de la nuit qu’il venait de passer, mais des milliers qu’il allait s’offrir après validation de sa veine de cocu à la Française des Jeux.
16:33 Publié dans Blog | Lien permanent