18/06/2015
Mémoire vive.
Cent "Je me souviens" miraculeusement arrachés à leur insignifiance, selon les mots mêmes de Pérec, pour raviver une période longue de vingt-deux ans que je m'apprête à clore: quel exercice d'écriture mais quel constat de vieillissement, quand il faut aller les chercher là-bas, tout au fond!
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17/06/2015
La notion de la dévotion.
Obsédante chanson sur le couple que ce « Pour être deux », de Rose, une artiste à qui je dois mon « Ciao Bella » - qui ressortira sous une forme musicale l’année prochaine – à qui je l’ai emprunté, pour être plus juste. Et idéale façon pour moi de reprendre mes chroniques muratiennes, moi qui ai été privé de ses concerts cette année, parce qu’on n’a pas su se croiser, parce que le « Babel » tant attendu n’a pas sur moi l’effet qu’il semble avoir eu sur certains journalistes dont on se demande si, par effet miroir, ils ne cherchent pas à plaire à Murat plutôt que l’inverse. Et voilà que le bougnat accepte de chanter en duo avec une femme issue de la « variété », qui plus est une chanson qu’il n’a pas écrite. Parce que, selon ses dires rapportés par Didier le Bras, il a trouvé le texte d’une justesse absolue (en ses termes « pas niais pour une gonzesse », il y a de la volupté dans le fait de se faire détester), si juste qu’il n’a pas vu comment il aurait pu ne pas le faire. Si tant est qu’on m’aime… Vingt-quatre ans après le duo avec Mylène Farmer que certains ayatollahs de la Muratie ne lui ont pas encore pardonné, le voilà qui vient répondre d’une voix chaude aux affres qu’énonce Rose avec fatalisme : il est question de la place, toujours, mais pas celle qu’on demande, celle qu’on refuse. Par peur de l’engagement, par l’égoïsme protecteur que la morale réprouve, la société aussi (ça va de pair). Comme s’il se répondait lui-même, vingt-quatre ans aussi (tiens, tiens…) après son « Sentiment nouveau ». « J’ai pas dans les gènes, le don de moi-même » assène Rose dans le premier couplet, avant que le Bougnat n’arrive et lui reproche de ne pas s’en mêler, de le laisser s’emmêler. Paronomase classique de variété, certes, avec quelques chœurs et violons dispensables, mais le sujet est entêtant, et universel. Les douleurs d’en face, y pense-t-on toujours quand on rencontre ? Les habitudes de la solitude, nouveau mal du siècle, alors ? Une forme de complaisance dans l’autosatisfaction, au sens propre, en tout cas : les mots me reviennent de cette femme qui m’a dit qu’il ne fallait toujours compter que sur soi-même, avant de me planter, sur la place, la vraie, la réelle… Quel autre atrabilaire amoureux que Murat pouvait faire résonner ces mots-là, en surprenant, une fois encore : dans cette cérémonie, c’est lui qui est quitté, c’est lui qui souffre et c’est nous qui aimons. Enfin, moi. Pris au dépourvu.
17:05 Publié dans Blog | Lien permanent
15/06/2015
Chroniques d'une arrivée (1).
Ensuite, arrive le moment où les meubles se posent, les bibliothèques se dressent, les cartons se vident et où l'on est surpris de se dire qu'on est chez soi. À peine, puisqu'il faut déjà repartir : l'installation, la vraie, celle de la personne, se fera plus tard, une fois les adieux terminés.
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14/06/2015
Les Noces.
Cette carte postale pour me faire pardonner l'abandon d'hier: une fois le (lourd) déménagement terminé, les amis et la famille partis, je suis allé, enfin, retrouver celle à qui, à chaque fois que je l'ai quittée, je promettais de revenir un jour, pour de bon. Il est temps de laisser le bleu reprendre sa place dans ma vie.
19:35 Publié dans Blog | Lien permanent
12/06/2015
Filiation.
Il est temps que je me mette à écrire ma « Lettre ouverte d’un vieux nizanien à son fils de vingt ans ». Deux cent trente-quatre mois que je reporte.
15:03 Publié dans Blog | Lien permanent
11/06/2015
Divonne hors les murs.
Ils vont suer, samedi, comme moi, mais tandis que je les porterai, les livres, eux tenteront d’en écrire un, un petit, certes, mais avec une vraie histoire, un caractère qui mérite le détour, des interrogations qui me gênent un peu tant je me demande si je ne les ai pas poussés à écrire comme j’aurais aimé l’écrire moi-même, cette histoire. Mais elle sera la leur, et le travail est difficile, avant l’accouchement : les échanges de mails, les discussions, la relecture à chaud, tout cela fait partie de la somme d’un atelier. L’aventure humaine est à ce prix.
18:06 Publié dans Blog | Lien permanent
10/06/2015
Sans matière à discussion.
Isabelle Flaten continue son entomologie des rapports humains, sans faire de bruit, en linguiste cachée. Après avoir exploré les rapports amoureux dans "les noces incertaines", elle fournit, aux toujours pertinentes Editions du Réalgar un livre reposant sur une antiphrase notoire (Se taire ou pas, se demande-t-elle sur 134 pages) et sur une analyse extrêmement fine du langage et de ses incidences. Par micro-récits, elle tisse une anthologie des situations de langage, de ce qui se passe derrière les mots. Ceux qu’on dit, ceux qu’on retient, ceux qu’on a répétés et qui, la situation venue, ne viennent pas, dans le couple, devant une demande en mariage, un chef acariâtre etc. Elle passe par des mots qu’on connaît, d’autres qu’on a un peu perdus de vue : s’arsouiller, patouiller, frétiller du popotin... Prend le point de vue des hommes, souvent taiseux ou amateurs de mots et de situations creuses (les groupes d’amis qui disent tant pour ne rien dire), des vieillards en fin de vie, des enfants, aussi – étymologiquement, pourtant, ceux qui n’ont pas la parole – qui demandent aussi bien ce qu’est la Mort que la sodomie. Des femmes, également, à l’essence venimeuse : tous les mots, dans Se Taire ou pas, sont passés en revue, par aphorismes, par récits un peu plus longs, jamais très. On y trouve au moins une situation déjà vécue, si ce n’est toutes, quand on y est sensible : les pactes entre adultes, les promesses jamais tenues, les humiliations à table ou au bureau devant les mots qui restent coincés et qui étouffent, toutes les façons de se parler, de se dire les choses ou de ne pas les dire. L’antinomie est là, entre le dernier mot qu’on veut avoir, né du premier qu’on n’a pas osé dire. Flaten s’amuse de situations, de zeugmas (« une tarte aux pommes dans les mains et une anomalie dans les yeux ») et de synecdoques (l’homme, ce « coude de flanelle grise »), mais on trouve dans ce livre de très belles scènes, tristes (sous l’Occupation, dans une unité de soins palliatifs…) ou drôles, cruellement, via le lapsus (coût et coït), la langue qui fourche, la parole qui échappe, en réunion ou sur un plateau TV. On croit percevoir, par petites touches, un autoportrait de l’auteur, face à la parole qu’elle domptera mieux à l’écrit que dans la réalité, face aux silences des éditeurs qui laissent penser qu’on en a trop dit, ou trop écrit. L’homme, le sien (celui de la narratrice, qui use de ce possessif), ou d’autres, est passé au crible, l’Homme aussi, qui dit trop pour tout garder, au bout du compte. Les saynètes d’Isabelle Flaten sont des morceaux de vie intelligents, qui posent une autre question que celle du titre (qui n’en est pas une) : comment prendre place parmi les hommes ? Le langage fait de nous un être social, a-t-on décrété, par réversibilité : le mutique sera jugé, le cancre relégué, les beaux parleurs célébrés. On rompt par SMS, désormais, on gazouille en 140 signes. Mais les caractères un peu cassés de « Se Taire ou pas », les roses que l’homme a, toute sa vie, offertes à sa femme sans qu’elle puisse, jamais, lui dire qu’elle préférait les orchidées, sont le signe que Flaten, femme de moins de mots que Merleau-Ponty, tape juste quand elle les écrit.
"Se taire ou pas", Editions Le Réalgar, 14€
17:09 Publié dans Blog | Lien permanent
09/06/2015
Rétro.
En réalité, j'avais commencé un peu avant, puis effacé des notes qui ne servaient pas à grand chose, mais en juin 2008, déjà, la première note de mon blog relatait la première vraie rencontre autour de mon premier vrai roman, dans le premier vrai cinéma de mon quartier d'enfance: au CIFA St Denis, à la Croix-Rousse. L'idée du blog étant de rendre éphémère, chaque jour, la note du jour précédent, je me permets un retour. Avec le bonheur d'entendre Claude Raisky, toujours plus juste que je le serai jamais.
19:33 Publié dans Blog | Lien permanent