05/12/2010
Le Tango des joyeux bouchers.
Rien de spécial du côté de la Vilette, enfin, je ne sais pas, mais dans les rues pavées du vieux Sancerre, superbe ville qui domine ses plants de vigne, il y a une librairie qui vaut singulièrement le détour, entre le nom qu’elle a donc gardé sans l’afficher, « la Boucherie », sa devanture aux petits carreaux verts, son comptoir, et Olivier, le libraire, ce grand calme qui s’est installé là il y a deux ans et commence à imposer sa marque : des livres choisis, défendus, divers. Bon, pas « la Boucherie des amants » de Gaétano Bolan mais c’est un oubli qui sera vite pallié. Des portraits d’auteur disséminés un peu partout, de la poésie, du théâtre, toujours signes d’une qualité autre que mercatile. Et « la partie de cache-cache » qui s’y est posée hier, le temps d’une rencontre qui a bien failli ne jamais avoir lieu. Quitter Lyon ne fut pas simple, affronter les routes du Berry a également découragé, visiblement, les meilleures volontés. Restait le premier cercle et ce fut très sympathique. Les Ripoux étaient là, dont Laurent Quillerié, mon premier éditeur, qui le suit et donne confiance ; on discute, on passe du thé au Sancerre et je me demande, vers 18h30, s’il est bien utile que je prenne la parole. Mais je le fais, j’interromps les discussions des uns des autres et leur raconte un peu la genèse de l’histoire, son ancrage dans une région qui est la leur. Mais curieusement, je leur parle davantage de Tébessa que de cache-cache : il y a aussi, quand même, des personnes qui ne me connaissent pas et qui doivent savoir quel a été, depuis trois ans, mon activité d’auteur. Je jongle alors, et poursuis collectivement la réflexion qu’on a menée, Olivier et moi, sur la place de l’écrivain dans la société, sur ce qu’il faut mettre en place pour que ce qu’on a à faire se fasse, simplement.
Il y a, comme au Tramway et comme chez « Jules & Jim », ceux qui l’ont lu et ceux qui le liront, je dois présenter mes trois héros sans déflorer l’action. Je dis la tension, le drame qui monte. Plus j’en parle et plus je me dis que la construction du roman s’est apparentée à la structure d’une tragédie, en trois actes par contre. L’amoureux, le rival, la promise, ils sont là les personnages classiques. Je parle une petite demi-heure, je veux en profiter parce que, pour l’instant, c’est ma dernière rencontre de la trilogie (tétra puisqu’il y eut les 3 Gaules), parce que je sais que le moment du travail va venir. Celui que je n’ai pas encore organisé mentalement : le Dîner, Camille, Larrouquis, oui, mais dans quel ordre ? J’avoue que les rencontres récentes m’ont un peu troublé. Je voudrais satisfaire les attentes de chacun mais j’ai cette angoisse qui monte de décevoir. La soirée d’hier fut épique, comme à chaque fois que je monte dans le Berry : signe de bien-être, tout le monde a suivi chez Martine. Pizzas et Sancerre, amitié et projets naissants : je sais que je dois rendre à Jean Frémiot « l’insecte et le sacré » que je lui ai promis. C’est pour janvier, je crois. Quoi, le janvier qui suit le décembre dans lequel on est déjà ?
Ah, oui. En fin de matinée, hier, je suis allé avec Jean chez M.Teilllier, un producteur de Ménetou-Salon. Il a dans ses crus une Mlle T. dont nous avons bu, Jean et moi, la dernière bouteille de 2008 le jour de notre arrivée à Chartres. Un cru épuisé, officiellement. M.Tellier nous a chaleureusement accueillis et a montré beaucoup d’enthousiasme devant mes projets d’écriture. J’ai voulu lui offrir un roman, qui ne récompensait, déjà, que maigrement la qualité de son accueil. Il n’a pas voulu en rester là et c’est avec un rare cru de 2003 que je suis reparti de chez lui. Un cru qui clôturera, tout à l’heure, mon séjour ici. Avant que je revienne, très vite, peut-être pour une présentation à Bourges intra-muros, chez Pictura, pour un retour aux sources?
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04/12/2010
A la Une du Berry Ripoublicain!
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30/11/2010
Bonne Espérance - Décodages
Dans « Bonne Espérance », en dehors de l’analepse initiale qui fait que le protagoniste du même nom est revenu d’un royaume des morts tels qu’on les figurait dans les mythologies celtes, il y a un éternel retour, du « Happy End » au « Happy Ending », avec une issue empreinte d’une lueur dont il faudrait demander à Pétrier s’il s’agit de la finitude réelle des choses ou d’une allégorie proche de la Caverne. Bonne-Espérance est revenu de nulle part chercher sa sœur Thelma, qu’il aime infiniment, depuis l’enfance, depuis les pactes qu’ils ont passés derrière le mur. Il s’en est échappé, de l’Autre-monde : revenu des enfers, il a parcouru les mers dans des bateaux de fortune et de brigands, cherché l’Arcadie, évité le monstre qui a emporté le frère qu’ils ont eu et qui revient solliciter leur mémoire par bribes de choses déjà vécues et enfouies. La réminiscence, dans « la Tempête » est apocalyptique et amoureuse, ce qui revient au même ici puisqu’on touche à des amours incestueuses. Bonne Espérance revenant habiterait donc deux identités, la sienne propre et celle d’un double qui le déterminerait dans ses choix et dans ceux qu’il compte faire. Déjà mort, il ne peut que survivre à l’opprobre qui s’annonce dans le village de la campagne écossaise qui leur a déjà coûté un père, qui n’est pas resté, et une partie de leur mère, dont la raison n’a pas survécu. Il ne peut que survivre et renaître en ne poursuivant qu’une seule quête : arracher Thelma des griffes de l’homme qui l’a épousée et qui ne se déteste de l’avoir battue qu’une fois qu’il l’a battue. S’extraire également du mariage qu’il a lui-même contracté avec Maureen Mc Kenzie, diaphane et fataliste, qui n’a comme tort que celui de n’être pas celle que Bonne-Espérance avait déjà choisie dans une vie antérieure et qu’il serre dans ses bras le jour de leur mariage. Maureen qui monte sur le toit, entend les bruits de fêtes de ses propres noces et qui sait qu’elles ne sont que de façade, qu’elles ne comptent que pour cette vie, et encore.
Bonne-Esp’ est porté, en plus de son propre dédoublement, par les esprits du frère disparu, qui le fait revenir de toutes les vies qu’il a vécues et perdues, l’autorise à fréquenter Edgar Poe dans une taverne interlope, entre autres. Les temps des verbes sont à explorer : l’imparfait désigne la vie d’avant, l’ambition avortée de marcher sur Rome, le futur simple celle d’après. Tautologie ? Sauf que la vie de Bonne Esp’ se dédouble de celle qui le meut et qui n’est pas la sienne : celle qui fait qu’il se réveille deux, dans une confrontation permanente avec le fantôme qu’il porte. Et que c’est dans la vie d’avant, révolue, que Bonne-Espérance devra chercher sa libération, fût-ce par la mort. Laquelle n’est rien pour qui l’a déjà vécue, puisqu’elle signifie la fin de la damnation. Le théorème des amours qui se perdent, qu’il s’acharne à résoudre est éloquent à ce titre : c’est un monde parallèle qu’il voit s’incarner devant lui, empli de gens qu’il ne comprend pas, d’autres qui lui sont hostiles, comme les cousins d’Inverness (la cohorte) qui savent qu’il vaudrait mieux éliminer le problème à la source pour que les secrets ne soient pas éventés. Ils retiennent sa sœur, qu’il voit lui parler sans entendre ce qu’elle dit. Lui fête les divorçailles de Thelma le jour même de la cérémonie : c’est l’amalgame des temps superposés et l’imminence de sa fin réelle. Il n’a qu’un temps restreint pour sortir Thelma de son autre monde à elle et l’emmener dans le sien. Dans les récits de chevalerie, on trouve de ces prouesses irrationnelles, les fleuves qu’il faut retraverser avant l’échéance sous peine de rester enfermé à jamais dans ce monde-là et d’y dépérir en ayant échoué : Edinburgh est dans la Brocéliande et Holyrood Park – qui n’est donc pas allégorique ! – pourrait être le val de non retour de la fée Morgane. Maureen n’est pas choisie, mais n’a pas la possibilité, par exemple, de sortir de ce monde auquel elle appartient : pour elle, pas de salut, ni dans la mort (le suicide) ni dans la vie. Bonne Esp’ l’a aimée dans cette réalité-là, mais l’amour qu’il lui a porté ne peut égaler celui qu’il porte à Thelma puisque celui-ci est à la fois intemporel et source de leur pérennité. L’a-temporalité de Bonne Esp’, dont la naissance même côtoie la mort en la surmontant, est un postulat du récit qu’a imaginé Pétrier : il est l’esprit errant condamné à errer entre deux mondes en en portant les malédictions antérieures. Son essence n’est pas maléfique, pourtant on le pourchasse : les mortels, d’un côté, veulent l’empêcher d’atteindre son idéal, le priver de son immortalité ; de l’autre, il y a le Each Uisge, esprit maléfique des Lochs d’Ecosse qui leur défend toute sortie. Entre les deux, le grand mur, comme l’orée du bois et le petit ru des récits arthuriens. La geste pétrienne est sybilinne, le labyrinthe multiple, jusqu’à la confrontation finale avec ce monstre qui incarne tout ce qui les empêche de revenir en arrière et retrouver le temps parallèle dans lequel ils ne sont rien d’autre que des amants qui vont se marier. Dans un de ces futurs simples de l’indicatif du Pétrier.
On ne sort pas de « Bonne-Espérance » avec les réponses aux questions qu’on se pose en l’écoutant et heureusement : c’est ce qui en fait la force. Il n’y a pas de salut non plus pour les deux personnages, mais Bonne-Espérance lui-même ne s’en offusque pas, une fois la tempête (onirique ?) passée, la mer reprise, dans une autre vie, encore, dans laquelle ils vivront jusqu’à ce que la cohorte (de la morale, du moyen-terme ?) les retrouve et les pourchasse encore. Les damnés de la mer en périple infini, qui se recréent un monde dont les nuits sont étoilées (« alleeeeeeeeeez ! ») et dans lequel la seule règle qu’ils se sont toujours fixée est de ne jamais se lâcher la main. Il faudrait reparler des influences, des images qu’on retrouve empruntées à tel ou tel ouvrage, tel ou tel film dans la narration de cet album remarquable, qu’il faudrait retrouver sur grand écran. A la condition expresse qu’on en confie la réalisation à Pétrier : pour qu’on n’y comprenne pas grand chose de plus que ce qu’on en a déjà saisi en nous.
http://www.levoyagedenoz.com/index.html
http://www.bonne-esperance-the-story.fr/
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29/11/2010
De la critique.
C'est une correspondance privée que je traduis ici, mais je ne peux garder pour moi ce que mon "vieux" (il me pardonnera l'usage) professeur d'université m'a envoyé après qu'il a lu "la partie de cache-cache". Tout y est, nonobstant le plaisir qu'il me fait à soigner mon égo : les réserves qu'on m'a déjà formulées sur le décalage supposé entre l'enfance et le discours qu'elle tient dans le roman; l'abord plus intelligible que sensible, même s'il ne m'avait pas sauté aux yeux, à moi. Je les traduis ici, ces beaux mots là, qui rappellent qu'autrefois on s'écrivait.
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28/11/2010
Quantifier l'amour à Cluses.
Petit comité vendredi chez « Jules & Jim », au bout du compte : la neige qui tombe, le froid qui gagne jusqu’à la librairie, mais a contrario de tout cela, une chaleur humaine jamais démentie tout au long de l’heure et demie passée à discuter de la « partie de cache-cache ». Avec un public restreint certes, mais déjà lecteur du roman, donc disposé à en débattre, et pas toujours sous le même angle. On s’est donc interrogé sur la nature profonde des personnages, sur la jouissance que Jean prenait à mener le bal, sur l’absence de réaction d’Emilie quand Grégoire semble prendre le dessus. Chacun y est allé de sa réaction, également, sur la lecture au sens propre : il y a ceux qui l’ont lu sans pouvoir le lâcher, les autres qui ont eu – on les comprend – d’espace de respiration. Une grande qualité d’écoute et d’analyse, donc, et les questions de Christelle, qu’elle n’aura pu poser qu’au tiers de ce qu’elle voulait faire et avait préparé, sans doute. La faute de l’intarissable bavard que je suis ? Fabienne et Cécile Massarotti, les fidèles de Vougy et Marignier sont venues, il y a même dans l'assemblée quelqu'un qui peut prétendre m'avoir vu jouer à cache-cache il y a plus de trente-cinq ans sans m'avoir revu depuis! L’impression est agréable de savoir que des lecteurs nous suivront quoiqu’il arrive, si les petits cochons ne nous mangent pas, dit l’adage. On réagit, la parole est libre, j’essaie de ne pas l’accaparer. Même s’il m’est curieux de chercher en même temps qu’eux les interprétations possibles qu’on peut donner à cette absence d’innocence, que je continue de revendiquer : il me semble qu’on donne à l’enfance la pureté qu’on a conscience d’avoir perdue en tant qu’adulte sans qu’on puisse vraiment se rappeler si la pureté des enfants est réelle, ou purement fantasmée.
Le travail d’écriture et d’édition est évoqué, je répète la filiation qui me lie à Claude Raisky, l’important travail de refonte et de relecture que « cache-cache » a subi depuis 2004. Son abandon à cette date pour cause d’écriture trop douloureuse, le roman de substitution que j’ai écrit alors. Et que la maîtresse de maison - après que sa collègue Hélène a magnifiquement lu le début du premier chapitre de cache-cache, rendant à Jeannot et au récit une anxiété que je n’avais plus perçue depuis longtemps – m’a demandé de présenter, reproduisant ainsi, en conscience, le serment de Vougy puisque lire des extraits d’un roman dit en préparation (ici en retravail puisqu’il est terminé) engage ceux qui assistent à ça à attendre naturellement que le roman sorte… Je lis le début du « poignet d’Alain Larrouquis », donc, puisque mes priorités, celles des trois vies dont j’ai besoin pour tout faire, ont changé. Je lis, retrouve la distance (6,25m) que revendique cet ouvrage-là, en reconnais la musicalité ; mais rien n’a changé depuis la fin d’ «Un monde sans pitié» : «P…, va falloir trimer !»
Eric enchaîne, mais le froid nous gagne un peu et la neige qui s’amoncelle au dehors nous rappelle qu’il ne faudra pas arriver trop en retard au restaurant. On introduit notre comédie musicale, Eric présente la petite dernière, « quantifier l'amour» , ci-jointe. Le petit impromptu surprise du « tourbillon de la vie » aurait mérité un avant-propos plus conséquent : je n’ai nullement l’ambition de me substituer à mon chanteur magnifique, c’était juste une tentative de reproduction de la scène du film, à usage interne. Au restaurant, la discussion reprend, autour d’Emilie, principalement. La nuit sera longue et agitée, mais on itère (avec un peu de retard dans le compte-rendu, allez, quoi, 24h ?) d’une unité la pile déjà conséquente des souvenirs essentiels. Et fondateurs.
"Quantifier l'amour" (Cachard/Hostettler)
envoyé par cachardl. - Regardez plus de clips, en HD !
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25/11/2010
Jules, Jim, cache-cache & "Indignez-vous!", de Stéphane Hessel
22:09 Publié dans Blog | Lien permanent
24/11/2010
Phénoménologies
Il s'en passe de drôles, sur Haut & Fort. Je mets en ligne, un peu par paresse, il y a quelques mois, les premières lignes retravaillées de mon "poignet d'Alain Larrouquis" et voilà que, depuis peu, des lecteurs réclament la suite, des libraires me demandent d'en lire certains extraits et, potentiellement, des éditeurs s'intéresseraient à ce roman iconoclaste, dont, finalement, je reprends les épreuves. En trouvant ça solide. Pas dans la lignée de Tébessa ni de cache-cache, mais dans un autre genre, indéfinissable puisque se mêlent, dans l'histoire, je l'ai dit, la mythologie, l'histoire, le polar et autres occupations humaines. Ce qui est fascinant, c'est de penser qu'on puisse en fait être ramené malgré nous à quelque chose qu'on a écrit. Je n'avais pas, il y a peu, la même nécessité de voir ce livre édité que je l'avais pour les autres, mais maintenant que les autres sont là, le voilà qui a sa place, naturellement. C'est d'autant plus aisé dans le retravail du texte: je me restreins, me resserre, m'amaigrit sans même m'en vouloir. Confortable. Je souris beaucoup, m'amuse de cette histoire qui vous en dira autant sur la vie à mi-distance que sur le Col de Somosierra.
Hélène, de chez "Jules & Jim", en lira publiquement quelques extraits vendredi soir à Cluses. De quoi rendre naturel, pour ceux qui rentreront chez eux après la rencontre, le fait que cette histoire s'incarne entre leurs mains dans quelques mois. Et vous savez quoi? Eh bien maintenant, moi aussi, j'ai hâte.
23:11 Publié dans Blog | Lien permanent
21/11/2010
The never ending cache-cache Tour, part I.
Je ne sais pas pourquoi je souris béatement de l’intérieur. Peut-être parce que la librairie du Tramway était pleine de monde hier soir pour la présentation de « la partie de cache-cache ». rien de narcissique là-dedans, juste la satisfaction de rendre aux libraires le risque qu’ils courent à inviter des auteurs émergents. Je me suis donc retrouvé une nouvelle fois, comme lors de cette magnifique année dernière, face à des lecteurs qui m’envisagent désormais comme j’ai toujours souhaité qu’on m’envisageât, pas parce que ça fait bien, mais parce que c’est ma réalité. Romain, à qui je dois cette invitation, m’a questionné, sans complaisance et avec un petit peu de malice. Je regardais dans le public les visages connus qui ont peuplé mon existence et ceux qui en écriront peut-être la suite. Plus à l’aise qu’aux 3Gaules - où, nonobstant l'accueil chaleureux, je me sentais davantage hôte qu’invité - je suis allé un peu plus en avant dans la présentation, livrant quelques clés de ce « petit roman » si « difficile ». En présence de Stéphane Pétrier, auteur d’un « Bonne Espérance » dont j’attends impatiemment la sortie pour y déceler les analogies, j’ai parlé de cette enfance que les adultes mythifiaient jusqu’à n’en garder que l’illusion de l’innocence, écrasant les lourdeurs, les secrets, les terrains déjà minés sur lesquels ils jouent sans ignorer que chaque jeu se double d’un enjeu. J’ai dégagé quelques interprétations du livre sans en déflorer l’issue, évidemment, rendu visage humain à ces figures monstrueuses que sont Jean, Emilie et Grégoire. Défendu la métaphysique que je leur prête, réfuté l’argument selon lequel on ne pourrait pas, à onze ans, être mu par de telles pensées. Je me suis aussi dédouané de tout exercice autobiographique, une nouvelle fois : ni les lieux, ni les actions ne sont les miens, et si j’ai quelque point commun avec le regard distancié qu’ils portent sur le monde, c’est parce que je m’y suis habitué très tôt, à la distanciation. On me demande en quoi mes deux romans se rejoignent, j’associe les deux lâcher-prise de Gérard devant la violence de l’embuscade et le final de « cache-cache ». Dont je ne dirai rien ici.
Eric est venu en configuration électro-acoustique avec Vincent, son guitariste. Le set resserré est une merveille, je reçois aujourd’hui des félicitations et des enthousiasmes dont je me réjouis d’autant plus que je n’y suis pour rien, même si mes mots frappent plus encore quand ils sont dits par lui. « L’Embuscade », ne cesse-t-il de me répéter, c’est un grand saut dans le vide à chaque fois ; « L’Eclaircie », c’est la marque de nos dix années passées de Ouessant jusqu’à l’embarcadère du départ ; « l’Ecole buissonnière », titre-phare de la comédie musicale qu’on sortira, de quelque façon que ce soit, en 2011, reste en tête longtemps ; « Quantifier l’amour », jouée pour la première fois hier, est superbe. « Au-dessus des eaux et des plaines », je l’ai écrit mille fois ici, c’est MA chanson. La voix, le rythme, l’équilibre entre les pistes, tout progresse à chaque fois que je l’écoute : c’est un don rare et je suis heureux d’en bénéficier.
Vendredi, nous serons chez « Jules & Jim », à Cluses. J’invite ici, une fois encore, tous mes ami(e)s de Haute-Savoie et alentours à venir et à nous amener des amis. Je voudrais que la très belle librairie de Christelle soit trop petite pour qu’on y tienne tous. Ça ne fait rien, on se serrera.
21:26 Publié dans Blog | Lien permanent