13/09/2025
SimplextIIval.
Je savais d’expérience qu’il allait me piéger, à annoncer ma note de blog à l’aube alors même qu’on quittait à peine l’InterVal de Vaugneray où venait de se dérouler le 2e Simplextival, festival du label du même nom, spécialisé dans la production et la réédition locale, en vinyle, exclusivement. La 2e session n’était pas si étrangère à la 1ère, puisque Danilo ouvrait pour tout le monde, lui dont la pop sucrée mérite qu’on s’y attarde, à condition qu’on arrive à temps au concert, ce qui n’a pas été notre cas, les 17km se transformant en 2h de route, ce qui ne fait rêver personne. Killdozer, le groupe qui suivait, c’était celui de Robert Lapassade, cet homme devant lequel, en toute fin de soirée, en lui dédicaçant un Noz d’émeraude - à sa demande- je me suis trouvé dépourvu, heureusement, de tout cynisme et sarcasme tant il représente à lui seul près de 50 ans de rock et de blues, avec Yves Rotacher à la batterie, par exemple, qui ne fut rien d’autre que l’ingé son des deux premiers albums des Noz - j’ai avoué l’analogie que son groupe m’a inspirée avec le E-Street Band, dans sa structure. Le Simplextival a cela de particulier qu’il met toujours en lien trois groupes qui n’ont rien à voir dans le temps et le genre, mais qu’il défend bec et ongle. Il a raison, à son âge. Et quand les Noz lui ont proposé de jouer le Signe, in extenso, l’album qu’ils ont sorti en 1992 - 6 ans après qu’ils ont rejoué Opéra à Rillieux - il n’a pas rechigné non plus; l’Inox, dût-il prendre le risque d’un anachronisme fort, tant l’album est peut-être le plus daté du groupe, dans ce qu’il visait d’international et qu’il n’a pas touché. C’est facile, quand la même frange du public est présente, toujours - t-shirts à l’appui pour certains - pour les encourager contre vents et marées. Jouer un album dans son intégralité, c’est accepter que des morceaux soient faibles, dans l’écriture, surtout - Mange le monde ou Querelle - mais mieux chantés qu’ils l’étaient il y a 30 ans, avec un clavier qui prend une place qui n’existe plus maintenant mais qui fait mouche quand Thierry Westermeier, revenu de nulle part, se met au diapason et éclaire les mêmes notes d’une tonalité différente. Le reste, à près de 3h alors que mon portable est resté dans la voiture de Guillaume, ça n’est que du souvenir, d’un concert vu, d’abord, des tribunes - puisqu’il était tard, quand même - puis de la fosse, d’abord peu nourrie puis copieusement garnie : ce groupe a un truc en plus, dans ce qu’il dégage, dans la capacité de son chanteur d’avoir de nouveau appris des chansons qu’il ne chantait plus depuis longtemps, dans le son cristallin de la Gretsch d’Emmanuel Perrin, la session rythmique - et les choeurs - d’Aldo & John Mc Clapot, dont le fils dira qu’il a trouvé bien le morceau Un 30 avril sur les quais, cet instrumental en mano a mano - E.Perrin/E.Clapot - qui dit tout de ce que fut le son des Noz et de ce qu’il continue d’être : un m mélange de virtuosité et d’impact, dans la note, un morceau où deux musiciens sur un tabouret, déclinant à eux seuls l’histoire des Noz, occupent un spectre musical qui emplit l’InterVal. C’est fort, très fort, et Emmanuel Perrin, s’il est parti et si son successeur a trouvé autre chose, c’est le son du Voyage, depuis 30 ans. 1992, c’est cette année charnière au cours de laquelle la vie professionnelle de pas mal de gens présents hier s’est décidée; c’est l’année où géopolitiquement, la Yougoslavie aurait pu taper la Dream Team à Barcelone, la face du monde en eût été changée. Marie-Ophélie n’était pas au concert hier, elle n’a pas entendu le chanteur - qui n’a rien dit pendant le concert, sauf nous avouer que sa voix était prise, ce qui ne s’est pas entendu - dédier ce concert à Éric, le Grand, qui faisait le catering, l’année d’avant, encore, et… me remercier pour le livre que j’ai écrit sur eux. C’était gênant, un poil, mais je prends. Juste avant, il venait de jouer Près du vide, ce morceau qu’il joue encore de temps en temps en solo, pour faire valoir ce vers sublime - c’est peut-être de l’amour à l’envers - mais qui est repris ici, dans un jeu d’ombre, par le groupe entier, nous laissant trente ans en arrière, quand le concert se termine. Ces moments-là, s’ils se succèdent, c’est qu’ils n’ont pas de prix. 30 ans que le monde attendait le Signe; il n’est pas impossible qu’il nous soit parvenu pile hier, en pleine conscience.
11:44 | Lien permanent
Les commentaires sont fermés.