14/11/2011
La vie d'artiste.
Belle conversation à trois ce week-end, à Eloise, sur les différentes représentations qu’on avait, Eric, Gérard (Védèche) et moi. Je n’exclus pas Christine par sexisme, juste parce qu’on peut aussi, le plus naturellement du monde, se placer hors de la nécessité de créer. Gérard est un guitariste très talentueux qui a travaillé avec des professionnels tout au long de son parcours et qui s’est consacré à ma musique, en travaillant à temps partiel, en accommodant son existence, également. Les sphères des artistes se confondent souvent : s’il doit partir en résidence ou en tournée, on ne lui demandera pas d’être ailleurs à composer avec une vie sociale, voire personnelle. C’est un sacrifice que l’on fait à son art et c’est en cela que la conversation a convergé, entre la littérature et la musique. Savoir quels étaient les temps, les places, les moments. La musculation de son art, également : j’écris tous les jours, je m’y oblige. Ce n’est pas toujours conséquent ni efficace mais ça me permet de ne pas chercher les mots quand j’ai besoin d’eux et de jouer avec la contrainte plutôt qu’elle ne s’impose à moi. Gérard joue beaucoup, se lève plus tôt que les autres et fait quelques accords mais réussit, dit-il, à oublier la guitare quelques jours consécutivement. Jusqu’à ce que le manque le rattrape. Que le corps, le sommeil, le bien-être le nécessitent. J’ai vu Eric jouer de mieux en mieux depuis que leur amitié de vingt ans s’est transformée en collaboration. Avec laquelle Gérard ne transige jamais : le 3 décembre, jour de présentation de « Trop Pas ! » à la Casa Musicale, il s’agit d’apporter quelque chose au public, pas de lui imposer un bœuf sympathique. Gérard transpose les morceaux, les réinvente pour trio, cherche jusqu’à ce qu’il trouve la bonne option. Jusqu’à ce que ça sonne et que ça monte, puisque la configuration ne permettra pas de reproduire ce qui se passe sur disque. Eric suit, ce n’est pas lui faire injure, au contraire. Il est souvent question, entre eux, de ce qu’ils étaient il y a vingt ans, justement, à la Fac de musique de St Etienne. J’ai compris que rien, individuellement, ne les prédestinait à être qui un compositeur de talent, l’autre un soliste qui a son propre son, son univers. Mais que tout les appelait, un jour, à se retrouver, à condition qu’ils aient un projet à servir. Que j’en ai été, partiellement, l’instigateur me comble de joie. Je parlais d’embellie dans la note d’hier, effacée, mais c’est le cas. Et des instants de bonheur intense comme ceux que j’ai vécus ce week-end, ma vie en redemande, parce que ce sont des renaissances, des fulgurances qui vous convainquent, malgré les doutes et les découragements, que c’est la seule démarche possible pour être dans le vrai. Dussions-nous avancer par tout petits pas. Dans la vie comme dans les jardins de « l’Ecole Buissonnière ».
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13/11/2011
l'Embellie.
Rien de plus insupportable, disais-je, qu'une note qui s'efface d'elle-même parce qu'elle n'a pas été enregistrée. Je reparlerai, quand H&F sera moins capricieux, de l'esprit d'Eloise, toujours vérifié, à chaque visite, de cette session d'enregistrement pleine de surprises et de promesses.
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12/11/2011
Work in progress.
Je les ai vus par la fenêtre. Quand Charlotte m’a demandé d’aller surveiller la cuisson sur le carré de pelouse devant le cottage, j’ai obtempéré, comme un maître de maison. Je me débattais avec un saumon se délitant dans sa papillote mal fermée, sur la grille noircie du vieux barbecue, j’ai levé la tête et, par la fenêtre de la cuisine et sa perspective sur la grande table de la salle à manger, je les ai vus. Charlotte, qui s’affairait à préparer les assiettes – les aubergines d’un côté, de l’autre les pois gourmands qu’Ana avait ramenés d’Espagne– dans la cuisine, et les quatre autres, autour de la table basse, qui devisaient de façon très générale pour la raison qu’ils n’avaient, pour l’instant du moins, rien à se dire.
Charlotte a ce don d’inviter chez elle des personnes qui ne se connaissent pas ; elle avait trouvé idéal de profiter de ce week-end, le plus particulier de tous ceux qu’elle avait passés dans la ville depuis qu’elle était venue habiter Londres, un an et demi auparavant. Ana, Julie, Adrian et Gaëlle étaient venus souper ce samedi-là, convaincus, chacun de leur côté, que Charlotte les recevrait dans sa configuration familiale, mari et enfants inclus. Ce ne fut pas le cas quand elle leur ouvrit à chacun, qu’elle les invita à entrer, les priant de bien vouloir attendre les autres pour commencer. Des autres qu’aucun d’entre eux ne connaissait, pas plus qu’ils ne surent qui j’étais au moment même où, harassé par le voyage que je m’étais imposé, je fis mon entrée et les trouvai là, un verre à la main, se demandant sans rien dire si j’étais Vincent. Le mari. Dans ce cas précis, le premier verre n’est pas seulement désiré, il est essentiel. J’en étais à mon troisième quand Charlotte a consenti m’en dire plus.
16:51 Publié dans Blog | Lien permanent
11/11/2011
Va, ma mémoire...
est inflammable, disais-je jusque là. J'ai fait quelques captures d'images aux aurores, à la Croix-Rousse. Voir les manèges de la Vogue des Marrons, immobiles, dans la pénombre et la brume, est une expérience à vivre. J'ai aimé me faire ejecter par un forain des auto-tamponeuses alors que j'en étais à ma troisième prise de vue. Je voulais prendre des images pour "le Café des Ecoles", cette énième fausse bluette sur la mémoire et le temps détruit, nizanien. J'étais pourtant de très très bonne humeur ce matin: les aubes sont souvent équivalents aux promesses, sans jeu de mots, on a un peu l'impression d'être un élu dans ces moments-là. Et pour tout dire, côtoyer des gens fatigués qui vont se coucher quand on a soi-même bien dormi, c'est un privilège. A l'heure où j'écris, je suis en studio, à écouter Eric et Gérard Védèche mettre en place les morceaux de "Trop Pas!" pour le 3 décembre. Je suis en retard, déjà, dans l'envoi du mail de présentation, mais je demande à tous, dans un rayon acceptable de huit cents kilomètres de la Casa, de venir soutenir notre projet, et repartir avec votre (superbe) objet, qu'on n'ait pas l'impression d'avoir investi, artistiquement, dans le vide.
Je disais: ma mémoire est inflammable. C'est hautetfort, mon hébergeur, qui me le rappelle à l'instant: j'ai usé 95% du potentiel de ce blog. La question de confiance ne s'est jamais autant posée.
19:39 Publié dans Blog | Lien permanent
10/11/2011
trop-pas.com
Le site est encore un peu in progress mais il nous servira de moyen de communication pour ce "Trop Pas!" dont on attend la livraison sans doute pour la semaine prochaine, avant la grande soirée du 3 décembre à la Casa Musicale. Il vous permettra de profiter du générique, déjà, de "l'Ecole Buissonnière" et de "l'inverse du choix", un de ces morceaux qu'on imaginait intermédaire mais qui s'avère essentiel. Vous y trouverez les articles que je (et d'autres) consacre(nt) au projet sur le blog, quelques photos et une revue de presse dont on espère qu'elle s'épaissira bientôt. Et le moyen de commander le livre-disque à distance. Des clips en tournage s'y ajouteront, également: je vais aller prendre quelques images du côté du Boulevard de la Croix-Rousse puis de Bellegarde, demain matin, aux aurores. Tout cela, c'est ici et c'est trop bien.
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09/11/2011
Les légions d'anges heureuses.
Pauline Hostettler, 15 ans, de l'autre côté du miroir.
LES LEGIONS D'ANGES HEUREUSES
Quand on demande à Pauline Hostettler si ça lui a coûté, cet été, d’interpréter la Marjo’ de la comédie musicale que son père a composée - cette fille du même âge que le sien confrontée à la séparation brutale de ses parents et aux affres de sa vie amoureuse à elle - elle répond « non » et reprend son portable pour envoyer un SMS à la vitesse de la lumière. C’est ainsi, l’adolescence : l’âge de tous les dangers mais peu d’inclinaison pour l’analyse que les vieux leur en proposent. Il n’empêche, c’est bien elle, et ce malgré la présence de chanteurs reconnus comme Evelyne Gallet, la mère, Stéphane Jardin, inénarrable proviseur, Kenzy Boufedji (de Emynona) dans le rôle d’Esteban, le bel Argentin débarqué dans la classe de 2nde de Marjo et dans sa vie, parallèlement, qui crève le disque, avant l'écran. Et le père de Pauline, Eric, qui interprète son père de fiction, également, facile, ça, Pauline ? « Pas compliqué, non. On connaissait les chansons, il a fallu régler le duo, c’est tout. C’est lui qui s’inquiète, pas moi ! ». Eric ne dément pas, lui qui a bien failli ne jamais enregistrer cet album-là et qui savoure d’autant plus le cadeau qu’ils se sont fait mutuellement : lui en restant en vie, elle en gravant ses 15 ans dans le marbre de ceux de Marjo’. Qui ne vieillira pas quand Pauline avancera sur le chemin de sa vie. Une illumination, cette « comédie musicale lycéenne » ? Pauline en est fière, elle a hâte que l’objet sorte pour le montrer à ses copines. Pas d’angoisse là non plus. Elle sait que ceux qui voudront critiquer ne se gêneront pas, elle sait surtout qu’il n’est pas donné à tout le monde d’avoir fait ça, à son âge. Eric raconte qu’en studio, c’est le 3ème jour que sa voix a vraiment donné ce que toute l’équipe attendait. Sans ciller, alors, elle a repris les quatre chansons qu’elle avait déjà mises dans la boîte les deux jours précédents et a recommencé. Passant de la bluette mélo au rythme cubanisant sans problème, durcissant un peu sa voix sur le générique pour couvrir le chœur des enfants , assénant un « je n’laisserai personne dire que la vie est facile ! » en regardant si le vernis de ses ongles a séché. On n’en saura pas beaucoup plus sur elle, sur sa vie à Eloise, petit commune limitrophe de Bellegarde sur Valserine, entre l’Ain et la Haute-Savoie. Parents pas du tout décomposés, petite sœur virtuose du dessin (deux de ses illustrations sont dans le livret du livre-disque), des amis un peu partout, un peu tout le temps et des écrans d’ordinateur à foison. Quand elle est venue enregistrer, à la Casa Musicale, elle rentrait sagement le soir chez sa tante quand ceux qu’elle avait laissés en studio passaient leurs nuits à debriefer et à se demander s’ils avaient bien vécu ce qu’ils avaient entendu. A peine ose-t-on lui demander si c’est aussi difficile d’aimer pour elle, à 15 ans, que pour Marjo’. Elle plante son regard un peu fardé dans nos yeux inquiets, remonte la mèche qui abrite un peu de sa lassitude et dit que c’est pour tout le monde pareil. Dans sa classe, dans la vie. A quinze ans et sans doute à plus. Quand, dans « l’Ecole buissonnière », elle chante « on a le temps pour nous, j’ai sa main dans la mienne », les plus anciens, ceux qui sont autant ciblés par « Trop pas ! » que les adolescents, se remémorent les plus beaux instants de leur vie. Il y a de la mélancolie dans les paroles de ces chansons, contrecarrée par des rythmes pop parfois endiablés : c’est bien parce que la vie des adolescents n’est pas le fleuve héraclitéen qu’on voudrait garder en mémoire que ce projet-là revendique haut et fort de ne pas les prendre pour des idiots. Eric dit que son auteur a même disséminé « des petits bouts d’Hamlet » dans les chansons, puisqu’il est aussi question d’une mère devenue belle-mère, sans rien déflorer du récit. Puisque récit il y a : ce coffret « à la française » (coffret 13X18,6 contre-collé, livret 48 pages) alternant des extraits du Journal de Marjo’, des conversations MSN avec ses copines Clém&So et des scènes dialoguées. On y trouve tout ce qui menace les jeunes gens dans leur vie à venir : l’usure d’un couple, son absence de communication, qu’on regrettera une fois l’irréparable avenu. Alex, le père, écrit des chansons d’amour pour celle qu’il a perdue, rien d’original, mais Marjo, les découvrant par effraction, va tenter, à l’aide de ses amies et, donc, du bel Esteban, d’inverser le cours des choses. Pour que le choix, comme le dit la chanson d’avant le duo final, soit pris en conscience de son contraire. Tiens, du Kierkegaard, après Shakespeare ? Et tout ça dans une « Boum » moderne, comme indiqué en 4ème de couverture ? Pauline s’en fout (carrément), elle n’a pas encore l’âge de ces références et il ne lui tarde pas que ça lui arrive. Elle sait juste que ce que Marjo’ a vécu, elle le vivra en n’en prenant que le bon, puisque le poulailler familial high-tech laisse augurer un ancrage terrestre conséquent. Les écueils qu’elle va connaître, les verra-t-on dans un tome II de «Trop Pas » ou dans un album que son père consacrerait à ses vingt ans, par exemple, elle s’en fout (également). Elle qui a traversé le public, nombreux, d’une librairie, récemment, pour interpréter une des chansons de « Trop Pas ! » lors d’une présentation d’un roman de son auteur - sans se départir d’une réelle assurance et d’une morgue un peu boudeuse qui n’est pas sans rappeler de glorieuses ainées – chante quand on lui demande de chanter et ne veut pas en dire plus. On lui souhaite d’être largement diffusée et entendue, parce que les chansons qui s’enchaînent sont toutes aussi signifiantes les unes que les autres. Elle s’est posée au piano, entame « le Café des Ecoles », chantée sur le disque par Alex-Eric, le père. Les doigts échoppent un peu, mais elle sait se rattraper. Contresens, néanmoins ? Ce n’est pas à elle de chanter ce morceau, bilan nostalgique d’endroits et d’amours disparus. « C’est juste que je l’aime bien et que ça m’embête de pas la chanter », rigole-t-elle. Quand dans le même temps, l’amant déchu, dans la chanson, ne peut que répéter qu’il s’interdit de pleurer. Il n’y a pas de place pour la complaisance, dans l’adolescence, et c’est très bien. Si tous les enfants grandissent, sauf un, on gagnerait tous à se souvenir de ce qu’on voulait faire de notre vie quand nous avions quinze ans. La mèche se fait rebelle, encore, du coin de l’œil elle sollicite son père pour savoir si l’interview est terminée. C’est oui. Elle se lève, salue et prend son portable. Avant même qu’elle ait quitté la pièce, deux ou trois de ses copines sauront ce que s’y est dit. LOL. Pascal Tantiède.
"Trop Pas!", une comédie musicale
de Laurent Cachard
& Eric Hostettler
Sortie du livre-disque le 3 décembre
à la Casa Musicale (69)
vente par correspondance et en librairies.
Plus d'informations sur: http://trop-pas.com/
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08/11/2011
Le premier café-crème, à St Germain.
Il faut croire que c'est la fatigue qui me gagne, ou une saturation de mémoire, les deux étant compatibles, si, si, je vous assure: en tout cas, dans la note d'hier, il fallait lire purgatoire plutôt que damnation, et même si la nuance est faible, l'auteur de cette classification y tient. Ce n'est pas moral parce qu'il devrait lutter contre mon envoi aux enfers mais que voulez-vous, comme d'autres, il trouve que c'est une bonne chose que j'y aille, persuadé que j'y trouverai l'inspiration. Je ne retrouve pas l'article que j'avais écrit pour le CDT sur la condition des écrivains et c'est dommage, parce qu'il y avait matière à me défendre un peu, quand même. Mais soit. Puisqu'il me faut écrire pour ne pas tomber, alors j'écrirai. J'ai un beau rendez-vous avec "mon" historienne dans un endroit insolite, je vous raconterai ça quand je l'aurai vécu. Dans le même temps, j'ai ressorti des tiroirs, après quelques nouvelles, le roman évoqué hier qui, depuis samedi, a gagné un autre titre, terriblement efficace et enthousiasmant. Que je garderai pour moi pour des raisons industrielles, vous le comprendrez aisément. Dans un monde parfait, écrivais-je récemment, j'abattrais une besogne considérable et arriverais au bout de mes projets sans ciller. Là, contingences aidant, je prends un peu de retard. Gabrielle, bouclée en 96h, m'aura un peu tuer, finalement. Mais je vais rebondir. Ou pas. Il suffirait de presque rien, comme dans la chanson.
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07/11/2011
Intimité.
Je me souviens de ce superbe film de Chéreau, j'en ai fait un élément d'un roman que la soirée de samedi m'incite à reprendre, pourquoi pas en parallèle d'un Aurelia Kreit que j'ai imaginé en plusieurs tomes, aujourd'hui. Si j'arrive à faire que la réalité ne me rattrape pas, je reprendrai ces six personnages invités à un dîner auquel la maîtresse de maison les a conviés sans qu'ils se connaissent entre eux et à qui elle assène une pensée inavouable. Un exercice de psychologie et de dialogues, ce que je n'ai encore jamais tenté. Je redisposerai sur mon tapis les fiches biographiques de chacun de mes personnages, Ana, la sévillane qui a quitté sa noble famille pour suivre un guitariste à Londres, Julie, chargée de la protection rapprochée de l'hôte du soir, Laure. Qui reçoit l'homme qu'elle a aimé il y a dix ans de ça pour la première fois. Gaëlle, Adrien...
Oui, je pourrais faire ça. Accepter de ne plus vivre pour vivre doublement. On n'est pas sur Terre pour être bien, disait Hippo dans "Un monde sans pitié". Mais lui a été sauvé : la damnation sur Terre, c'est du Cachard, paraît-il. Cpafo. Lol.
20:14 Publié dans Blog | Lien permanent