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31/10/2012

Pas au vieux singe...

66292_432606043454199_1118204392_n.jpgJ’ai cette impression que plus j’avance en âge, plus ce qui est attendu m’ennuie. Dans les livres et les disques aussi. Alors, même si j’ai mes repères, les artistes et auteurs que je suis depuis longtemps, je me laisse de plus en plus séduire par l’enthousiasme d’un tiers. Quitte à le lui reprocher après, gentiment. Ce ne sera pas le cas, aujourd’hui, tant Philippe Ache - qui écumait, sans qu’on se soit jamais rencontrés, les mêmes petites salles de concert que moi, dans les 80’s - ne s’est pas trompé en me conseillant le EP  entièrement homemade de Lidwine, « No Monkey ». Cinq titres entièrement dédiés à la harpe, l’harmonium et la voix, une voix cristalline perchée entre Björk et Kathe Bush - s’il faut faire des analogies – qui se joue de la prosodie et sert la musicalité des mots. Une voix qui n’aurait pas supporté un mixage approximatif et là encore, c’est heureux : Gizeh Records a bien fait son travail. Les titres s’enchaînent, aériens, Duet for ghosts (Call my name) est une belle déclaration, dans un propos général ancré dans des états passés, toute furie bue et chaos apprécié (« Pardon me for having denied your existence »), des rivages atteints et  (sans doute) perdus. Les cinq morceaux s’accordent, le tout est ciselé, précieux, enregistré, ai-je lu, dans une église gothique parisienne. « Sorry for my insistance », termine-t-elle, dans une demi-lumière et sur un ton victorien: c’est qu’elle voudrait nous voir sourire, en plus de ça, après avoir tout relevé de notre petit tas de misère. Unfair and rude. Qu’elle ne s’inquiète pas, du coup: il est de (tout) petits investissements qui nous rendent de la Beauté au centuple.

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30/10/2012

Le Secret.

Il y a parfois des nouvelles, des avancées, qu'on a juste envie de crier au monde, mais on les garde pour soi, encore un instant, parce qu'on a peur que d'un coup, une tempête au joli prénom ou un piano à queue nous tombe sur la tête. Rien de miraculeux non plus, j'ai encore raté le Goncourt, paraît-il, et je n'ai plus de roman à proposer pour concourir. Mais de l'humain, de l'intense, du spectaculaire, vivant, en plus. Avec des rencontres qui en entraînent d'autres, des parcours qui se croisent, des visages qu'on reconnaît et des émotions passées qu'on remercie. Pour autant, ça m'aura permis de faire une note pour ne rien dire, ce qui en soi est déjà beaucoup. Non?

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29/10/2012

Revival.

La question de mon athéisme se pose à chaque fois que je croise un violoncelliste.

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28/10/2012

Dans ta face!

 

phoca_thumb_l_ma_nue_à_linfini_3052.jpgUne silhouette s'inscrit dans le flot de mes rêves, et je me souviens de celle qui fait danser ma mémoire: le tourbillon de ses pas crée l'illusion de sa présence, mais c'est imperceptiblement, au rythme chaloupé de ses tours sur elle-même, qu'elle s'éloigne, nue, à l'infini. Elle est là, mais elle part, et je ne ferai rien pour la retenir, tant l'impression est grande de n'être qu'une unité, face à l'être pluriel. C'est le conflit d'un homme, que de se sentir double, et la danse qu'elle m'offre multiplie ses visages: ma nue, ma nuit, m'importune et m'importe, je la vois dans le rai d'une lumière diffuse. Mon soleil noir, mon ange déchu, tu tournes dans l'esprit d'un amant qui chavire, et abandonne sa vue au lent reflet trompeur de nos amours rétives. En épousant le vent, tu deviens l'élément, et provoques ma chute, une chute sans douleur, comme celle du chevalier qu'on retient dans un val, sans même qu'il le comprenne.

  Tourmente, Vertige,

Le mouvement de tes hanches

prend le tour qu'on redoute,

et dans la lumière des nues qui se dévoilent,

tes bras,

enroulent, enserrent,

et prennent le pouls d'une âme qui se délie:

Goémon de l'esprit

Quand suivras-tu dans la nuit

 

cette femme,

qui tourne

et tourne

et tourne

et rejoue sans un bruit

la valse

de nos amours

perdues

 Les reliefs de ton corps sont sans retour aussi et ma conscience s'y perd comme s'est perdue mon âme; dans le cercle que tu formes, dans l'hypnose de tes bras, je me perds tout entier et sollicite ma perte. Descends, ce soir, nous dirons au monde que la ronde est ouverte, qu'elle ne cessera pas et qu'il faut la nourrir, que la seule vie possible l'est par cette valse indue. Que nos temps impartis le sont par ta musique, dont chacun de tes pas écrit la partition. On peut voir l'être aimé s'en aller vers la nue et n'être soi-même qu'un infime pan de ciel, capable d'attirer mais pas de retenir; alors, la danse reprend de plus belle, avec pour compagne la part de vertige qui lui est inhérente; alors, l'embole de ta nef suit le cours de la vague, qui me couvre et m'emporte. Et je rentre dans la nuit, la nuit des amours tristes, parce que revisitées, revenues; j'ancre dans ma mémoire les dessins que tu traces, et cette mécanique, que met en branle ton corps: je reprendrai bientôt le flambeau de la valse, quand mon amour pour toi ne sera plus qu'ellipses, quand l'entier de mon être fera de l'infini un recommencement. Là, seulement, je saurai que ces courbes que tu crées ne nous auront pas enfouis, mais unis. Que tu danses pour un mariage. Nos Noces. Celles d'une vie parallèle et d'une vie secrète: être une présence secrète, plutôt que de ne pas être, la question se pose-t-elle vraiment? La réponse, elle, est inscrite dans le temps, et si tu quittes la place, ta pâleur opaline laisse cette marque au sol comme un chiffre tracé, une anamorphose: ∝ ; il décide, et valide, de l'authenticité d'une rencontre. Il préside aux choses du temps. J'y suis, là, dans tous tes décalages et tes conspirations. Nous y sommes. Toi & Moi. Longtemps.

Laurent Cachard & Jean Frémiot extrait du portfolio "Ma nue à l'infini", Editions Pictura, 1999.

Photo de Jean Frémiot.

 


 

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27/10/2012

Et ça distrait ma vie.

IMG_1296.JPGPeut-être s’est-il dit que c’était mieux comme ça. Que la gloire l’aurait changé, qu’il aurait éprouvé, comme les autres, l’inquiétude de ne pas rester au sommet, d’être oublié, rabaissé, pire, pris pour quelqu’un qu’il n’était pas. Un des amis qu’il côtoyait à l’époque lui a un jour raconté qu’un journaliste lui avait demandé, pour la télévision, de s’habiller en chasseur, ce qu’il n’était pas. Il a obtempéré, par timidité, et s’est attiré les foudres d’une partie de son public comme ça, sur un malentendu. Son public à lui, ce soir, était clairsemé : loin de chez lui, dans une petite ville de province, un temps de Toussaint… Il les connaissait bien, pourtant, ceux qui venaient encore le voir : ils avaient, comme lui, vécu avec ses chansons pendant combien ? Trente, quarante ans ? Lui ne comptait plus depuis longtemps : quand on lui offrait la chance de vivre des moments comme ça, dans la douceur d’un théâtre à l’italienne, il fonçait. Ses dernières années avaient oscillé entre les croisières pour personnes âgées - avec bande-son pré-enregistrée - et les repas-spectacles pour des gens du même âge. Qui goûtaient la nostalgie quand lui ne s’y complaisait pas. Il avait soixante-dix ans, et alors ? Ceux qui venaient l’écouter trouvaient chez lui la même innocence candide qu’à ses débuts, quand Lucien Morisse lui avait lancé qu’il en ferait le nouveau Charles Trénet. Il est des prédictions qui deviennent des anathèmes, parfois, mais on lui avait glissé, un jour, qu’on s’ennuyait parfois ferme aux concerts de Charles Trénet, jamais aux siens. Parce qu’il donnait. Et parce qu’il donnait, on les avait enfermés, lui et son public, dans une catégorie bêtifiante, comme d’autres, souvent aux yeux bleus et à la voix douce. Son travail avec les enfants ? Une comédie musicale? Bah, la résurgence d’un passé mal digéré, pas d’intérêt, certainement (ce qu’on dit quand on n’a pas fait l’effort d’écouter). Sa renommée, toujours vivace, au Moyen-Orient, les belles chansons qu’il a écrites sur le Liban, l’ouverture d’esprit et des frontières vers le Maghreb de sa naissance, son goût quasi-oulipien (« en règle générale ») pour le bon mot, là où il faut ? Plus porteur, Coco, pas assez MEDIATIQUE… Alors, trente ans après les feux de la gloire, il se retrouve là, face à un parterre clairsemé venu comme au spectacle. Sans être par avance convaincu, sans plus avoir la force des standing-ovations qui réglaient les concerts de Barbara ou Reggiani, ses aînés dans la présence scénique,  le rapport aux autres. Moustaki, aussi, dans l’indolence poétique, avec une voix mâtinée d’intonations d’un Sud qu’il chante en permanence. En parlant de son enfance, de son père (quelle superbe chanson que « le Mistral », qu'il faudrait réorchestrer en acoustique), de ses terres. Il chante avec la pudeur des gens heureux qui refusent la complainte. Il chante les choses les plus simples, les ânes (!), la nature, l’amour et l’amitié. Il est sur les routes depuis trente ans avec des musiciens de moins en moins nombreux mais de plus en plus fidèles : un piano, une guitare, un accordéon, dans un théâtre, que demander de plus ? Surtout quand l’accordéoniste est passé du côté de Lemarque et Trénet, justement, que le pianiste passe du Rolland au Steingraeber avec le sourire de celui qui fait tourner le tout… Il chante plus de deux heures pour un public dont le nombre ne compte plus. Et pendant ce temps, chez le spectateur, s‘opère un drôle de bouleversement : comme si toute forme de scepticisme, de raillerie, de méfiance sur ce que vont penser les autres, disparaissait. Dans un monde de méfiance, le don de soi est toujours suspect, comme le bonheur. On lutte encore un peu, on se dit que non, quand même, pas après plus de trois cents concerts, pas avec toute l’intelligence cumulée…  Et pourquoi pas finir poète à Barbizon, pendant qu’on y est ? Quand il évoque Danel, Léonard et Georges Chelon, c’est à Lleprest, bizarrement, que je pense : qui sait, à part les initiés, que Hervé Villard a chanté « le Café littéraire » et pas seulement « Nous » ? Il faudrait parler moins, lire et écouter plus, la leçon est connue. Hier, un chanteur est venu s’excuser d’être heureux et a présenté plus d’une vingtaine de morceaux qui, reliés les uns aux autres, composent une existence, en pointillés. C’est le type de concert auquel il faut, tant qu’il est encore temps, emmener sa maman. Pour faire le lien, avant que ces chansons-là ne soient complètement perdues. C’est mon innocence et une partie de mon enfance, ravivée, qu’hier, en fait, Bernard Sauva(t).

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26/10/2012

Ecran noir.

On a l’impression, parfois, que l’existence n’est qu’un festival de petites coïncidences, heureuses ou malvenues. Dans le tourbillon de la vie, on se connaît, on se reconnaît, on se perd de vue, l’air, pour le coup, est (archi)connu. Et dans ces micro-symphonies, on rêve tous de conclure sur un dernier et flamboyant coup de cymbales, quitte à être catalogué comme l’homme qui en savait trop. Après le truffaldien l’homme qui aimait les femmes, la boucle serait bouclée, l’ultime petite bulle pourrait éclater. Et paf !

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25/10/2012

Helléniste et les garçons.

Je commence à me dire que le galeriste qui refusa jadis les toiles de mon ami parce qu’elles ne contenaient - selon lui - pas assez de bleu était soit de l’avant-garde schtroumpf soit l'oracle de ma propre nécessité.

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24/10/2012

Faire court.

220px-Socrates_Louvre.jpgUn mot, ce matin, sur ce qu’étaient, en somme, les quatre vérités d’une vie, ou les quatre vérités de la vérité elle-même, puisqu’on perd de sa singularité en se multipliant, c’est bien connu. La vérité, d’abord, comme l’énoncé tenu pour telle, coopté : le sens commun, en somme. Et puis, l’escalade, la révélation : l’expérience de la pensée, d’abord, la vérité qui s’éprouve, qui s’apprend (par l’échec, souvent, paradoxe à part), l’acte éthique, ensuite, la vie tendue vers sa recherche, son cheminement : un mode de vie. Et enfin, le télos absolu, l’essence même de la vie, l’aletheia grecque. La révélation, l’envolée : la découverte de la vérité, par parallélisme, se fait la vérité de la découverte, dit-on. Le malvoyant et malentendant ne s’attendait pas à ce que l’agence de voyages lui vende au prix d’un cours de Philosophie dans l’île d’Ulysse une simple boîte d’éthique et Ithaque.

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