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23/01/2014

Jacasseries.

On ne me demande rien, mais j’ai la solution pour lutter contre l’antisémitisme ambiant : qu’on oblige toutes les personnes qui véhiculent à peu près n’importe quoi à destination de n’importe qui à écrire un roman dans l’Ukraine de la fin du XIXe siècle. Ils en sauront assez pour au moins arrêter de parler.

12:38 Publié dans Blog | Lien permanent

22/01/2014

Le temps qui reste.

photo-1.jpgIl faudrait d'abord se souvenir que la veille de son arrivée, j'ai passé deux heures et demie dans le coma, avant de me réveiller à l'hôpital, avec un bon pour une opération le lendemain de sa venue. Pas commun, pour un père, d'aller voir son fils nouveau-né, dans le bâtiment d'en face, en pyjama, la perfusion à la main. Mais psychanalytiquement, ce serait trop compliqué, alors je ne le ferai pas. Pas plus que je ne parlerai des ces clichés-là, vous savez, le temps qu'on n'a pas vu passer, le souvenir qu'on a encore de soi à son âge. Les quelques regrets qui parsèment forcément le parcours, les maladresses dont on a fait preuve, les oppositions qu'on n'a pas su prendre tranquillement. Mais elles furent rares, et  ne ternissent rien : rien de la sensation d'avoir été là, d'avoir assumé jusqu'au bout et, mieux encore, d'avoir provoqué une relation de celle qu'on aurait aimé avoir, même si les époques, les contextes, les structures familiales n'étaient pas les mêmes. Il y a ce prénom, aussi, impérieux, qui a peut-être déterminé des conduites, ces étapes dont on se souvient, l'inquiétude des parents face à la capacité d'adaptation d'un enfant introverti dans un univers hostile, qui les avait inquiétés eux, déjà, quand ils durent y faire face. Les marches gravies une par une, avec leur système de prévention, de répétition, une autonomie toujours plus grande et revendiquée. Jusqu'à l'extrême, jusqu'au refus, de l'aide, du soutien, de l'entrisme. Cette personnalité qui se construit, s'affirme et se structure, jusque dans ses réactions : au système scolaire, à l'autorité, à la contrainte. Les inquiétudes sont toujours là, elles se sont juste déplacées. Mais l'étape d'aujourd'hui est symbolique, et signifiante : la majorité de son enfant ne signifie pas son abandon, loin de là, mais le regain, ou pas, de la confiance qu'on lui fait pour qu'il mène sa vie sur un juste chemin. Dans mon cas, celui de sa maman aussi, on ne la maintient pas, cette confiance, on la décuple, pour qu'il choisisse bien, pour qu'il vive bien. Qu'il se réalise comme nous n'avons peut-être pas - ou trop tardivement -  osé le faire.

L'émancipation a déjà eu lieu : quand il est parti, l'année dernière, trois mois dans ce pays dont il aime la langue et la culture, quand il nous a signifié qu'il n'était pas nécessaire qu'on vienne le voir. Pour des raisons qu'il a énoncées brillamment en commentaire de ce que j'avais écrit là, à cette occasion. On a cru, moi surtout, que le monde s'écroulait, dans un premier temps, avant de reconnaître qu'il continuait et qu'on y respirait mieux en le sachant bien. Un pacte anticipé, valable pour les prochaines décennies, avec pour contrepartie au fait qu'on le laisse vivre qu'il ne nous oublie pas, qu'il s'impose, de temps à autre, quelques contraintes. Dans l'ordre, chronologique, mais pas exhaustif : travailler un minimum pour avoir son Bac, allumer son portable, de temps à autre, répondre aux messages avant trois jours et p..., mais p..., fermer correctement cette bouteille de lait avant de la mettre dans la poubelle de tri! J'écris aujourd'hui la lettre indirecte que je voulais lui écrire il y a huit ans : je le crois davantage en âge de comprendre, même si un de ses fidèles amis m'a un jour demandé si je m'étais inspiré de lui pour « la Partie de cache-cache ». Au nom de cette maturité précoce, ce regard avancé qu'il peut avoir sur les choses tout en restant tellement candide sur d'autres. On a tout traversé, jusqu'à maintenant, des annonces, des angoisses, une fugue, même, un jour, pour de si mauvaises raisons. Jusqu'à ce qu'il revienne, un peu honteux, toujours inquiet de nous avoir déçus quand nous l'avons aimé, ce jour-là plus qu'il était possible de le faire. Sauf le jour où je me suis retrouvé à suivre un camion de pompiers qui l'emmenait dans l'urgence d'une méningite, quand nous le supplions intérieurement de ne pas nous laisser d'une part, d'accepter de pleurer pendant la ponction lombaire de l'autre... Trois jours après, c'était le retour, sans plus d'inquiétude, et c'était le jour de Noël : il n'y avait rien de prêt, mais c'est la seule fois, depuis bien longtemps, que je compris ce qu'un jour pareil devait signifier. Des fous-rires, aussi, la boîte à rien, les fautes d'orthographe volontaires dessus, les biloulous, déjà ravivés, le petit manteau bleu et la vogue des marrons. Où je suis retourné avec lui, récemment, pour que je mange une gaufre et qu'il attrape des montres, là où je n'ai jamais rien attrapé de toute mon enfance. Peut-on seulement parler d'enfance, encore, quand chez les deux sujets, la conscience du temps qui passe est telle ? A la différence près, c'est que le temps qui lui reste est entièrement ouvert, pas le mien, même si... Mais on ne jalouse pas son fils : le mien est beau comme un Dieu grec et a une personnalité peu ordinaire. J'aurai plaisir à le regarder grandir, encore et encore. Jusqu'à la fin. La mienne. Après, il sera temps pour lui de les lire, mes livres, plutôt que de prétendre pouvoir les raconter. Même avec succès. Ça lui apprendra à avoir dix-huit ans un mois après mes deux fois et demie.

 

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21/01/2014

A nous deux!

Qui se soucie du drame de l’unique habitant de la commune de Roucheforchat, dans la Drôme, qui ne serait qu’un épiphénomène pour journal de Jean-Pierre Pernaud s’il n’était pas, à la fois, bègue, comédien schizophrène et candidat à sa succession aux élections municipales ?

20:21 Publié dans Blog | Lien permanent

20/01/2014

Contrition.

Je dois concéder que sur les 44208 mots qui composent à ce jour le premier tiers, bientôt achevé, de mon "Aurélia Kreit", quatre ont été empruntés à Nathalie Sarraute:  "cochon rose" et "girafe blanche". Si. J'y voyais comme un hommage, mais la judiciarisation de l'époque me pousse à une extrême précaution: je pense à un avertissement au lecteur.

18:09 Publié dans Blog | Lien permanent

19/01/2014

Altitude.

Chez le skieur croyant, la foi dispense du port du casque, mais pas du plan des pistes.

14:50 Publié dans Blog | Lien permanent

18/01/2014

Making-Of.

J’ai enlevé la photo de l’article d’hier, parce que si elle ma source unique d’inspiration, elle ne correspond pas au passage que j’ai donné. Qui n’apparaîtra peut-être jamais, par ailleurs. J’ai eu une émotion d’écriture, aujourd’hui : mes deux groupes de personnages, qui ont vécu des aventures diverses en quittant leur ville de Krementchouck, les uns pour Kiev et les autres pour Kirovohrad, se sont rejoints : plus de narrations croisées, plus d’espoir de retrouver les femmes et les enfants d’un côté, les hommes de l’autre. La deuxième jonction, c’est pour bientôt : un événement grave se déroulera à Odessa, la ville qu’ils souhaitent atteindre pour quitter l’Ukraine. Ce passage-là, je l’ai déjà écrit, pour savoir si j’étais capable de le faire, tant l’exercice demandait des forces que je ne me soupçonnais pas. Ce qui fait que mon récit avance et que je vois, sur l’écran, le chapitre sans numéro avec lequel la première partie se terminera, dans une vingtaine de pages environ (une semaine d’écriture) : ça donne du courage et le vertige à la fois.

17:42 Publié dans Blog | Lien permanent

17/01/2014

Obsessionnel.

Anton avait éludé la question. Tant qu’il ne serait pas là-bas, il voulait garder tous ses sens en éveil et ne céder ni à l’espoir ni à la déception. Les scènes de Kiev, le fait qu’il  ait voulu, deux fois, que Dachkovytch fût là et qu’il le fut, l’en avaient convaincu : on ne se construit que par les actes dont on mesure, quand on le peut, les incidences et les incidences qu’aurait eu l’inverse du choix. Lui ne se projetterait pas, mais l’image mentale qu’il s’accordait, c’était Aurélia, devenue grande, seize, dix sept ans, posant droite devant une table fleurie, un livre ouvert devant elle, cheveux longs jusqu’aux coudes, robe côtelée noire et chemise à fleurs fines, fixant l’objectif de ses grands yeux sombres, esquissant un drôle de sourire, à la Mona Lisa. Cette image, Anton devait la tenir d’un portrait - rare -  de sa mère enfant, mais dans son esprit, quand il s’abandonnait, c’est Aurélia qu’il voyait comme ça. Où cela se situerait-il ? Les fleurs sur la table, le confort d’un mobilier bourgeois, tout cela, si la vision s’avérait prémonitoire, prouvait qu’ils auraient réussi, puisque Aurélia était à la fois le risque majeur qu’ils prenaient et le gage de l’obligation qu’ils avaient de réussir. Cette vision rassurait Anton, puisque sa fille était en vie et souriait, mais la question de Nicolaï appuyait un peu plus les doutes qu’elle ravivait : que serait-il advenu d’eux, durant ce laps de temps ? Feraient-ils encore partie du tableau, en arrière-plan, ou le sourire d’Aurélia ne serait-il qu’éphémère, le temps du cliché ?

18:43 Publié dans Blog | Lien permanent

16/01/2014

Inventaire.

Ce petit carnet retrouvé dix années plus tard, que dit-il de moi que je ne suis pas devenu ? J’y retrouve une variation écrite la fois d’après la dernière fois dans le Musée Rodin, quand les statues de Camille y étaient encore en nombre. Des projections sur les personnes à solliciter pour la sortie de Tébessa : certaines qui ont œuvré pour et qui sont restées, d’autres qui ont œuvré, d’autres qui ont disparu. Parmi ces dernières, certaines dont je n’aurais jamais imaginé qu’elles disparaîtraient. Des indications notées à la va-vite pour trouver sans trop me tromper cette librairie au nom évocateur qui m’invitait, sans que je sache que j’allais y retourner souvent, puis plus, puis qu’un jour elle n’existerait plus non plus. Des numéros de téléphone sans nom, que je n’ose pas rappeler. Des projets qui ont abouti – je suis pugnace et plutôt bon, en projets ! D’autres qui n’ont pas dépassé le cadre des notes qu’on prend, sans que je me rappelle si, au moment où je les prenais, j’y croyais encore ou déjà pas. Heureusement, là, dans un coin, en bas, à droite, la liste des courses.

17:47 Publié dans Blog | Lien permanent