24/06/2023
N'aie pas de regrets*.
Quand on va voir deux fois consécutivement un artiste se produire sur scène, il y a deux écoles : un, on remonte le temps – pas grand-chose, dix, onze ans - et on retrouve le Boss sur la scène de Bercy, les 4&5 juillet 2012 pour deux shows de plus de 3h30 et de 30 chansons dont…10 identiques, seulement. Deux, plus fréquent, on se souvient de Kent sur la scène de la Croix-Rousse ou de Barbara à Mogador et on assiste au même spectacle, millimétré, jusque dans les répliques intermédiaires. Heureusement, Biolay en joue lui-même, ça n’est pas un grand communiquant et sa façon de le démontrer est chaque fois différente, quand les set-lits s’enchaînent et ne varient pas. De fait, là où on s’est placé, on peut s’attendre à l’entrée sur « la Superbe » et, peut-être, regretter qu’elle ne soit pas jouée avec autant d’intensité que quand elle clôt le spectacle. Un peu plus en hauteur que la veille, c’est l’assurance de voir la mer davantage, en partie intégrante du spectacle, mais c’est aussi prendre le risque d’être au cœur d’une assistance un peu mollassonne qui ne permet pas de suite d’entrer dans le concert. Et de regretter, plus que la veille, des choix de chansons moyens. C’est la liberté de l’artiste dans sa création, et j’ai accepté le principe depuis longtemps. Mais il y a un Biolay qui m’indiffère (dans ses textes) et un que je vénère absolument, que je retrouve dans « les cerfs-volants », dans « Ton héritage », évidemment – surtout quand son enfant vous rappelle à quel point tout est systématiquement fragile – ou dans « Comment est ta peine ? ». Même dans le choix des titres du dernier album, il manque, singulièrement, « Ton Ravel », même s’il a ajouté « Tes joues roses » à la liste de la veille - ainsi qu’un ou deux autres morceaux, dont un atrocement dispensable, pourtant joué sur la fin. Est-ce parce que le théâtre de la mer est (désormais ?) composé de personnes qui passent leur temps à se déplacer ou à parler entre elles, quand elles ne filment pas ? Est-ce parce que deux soirs de suite, quand on teste encore ses limites physiques, c’est un peu trop ? Il reste que deux de mes proches sont descendus dans la fosse, comme j’espère pouvoir le refaire, un jour, et qu’ils ont trouvé le concert exceptionnel quand moi je l’ai trouvé un poil fade. Jusqu’à douter de l’authenticité du garçon, qui peut répéter Sète tout le temps mais n’a finalement rien fait d’exceptionnel pour les deux soirées censées célébrer in situ un album qui porte une partie de son nom et de son imagerie. A Fourvière dans quelques jours, il dira aussi qu’il est chez lui, et terminera également, qui sait, sur « Saint-Clair », même si hier il y a ajouté « Numéros magiques », pour clore. Moi j’ai trouvé qu’il était encore tôt, mon camarade de la fosse m’assure qu’il a plus joué que la veille. C’est le jeu des concerts en série, le prochain chassera celui-ci, et l’équilibre se fera peut-être de lui-même, entre les titres.
PS : fantasmer de mois sur le « + invités » indiqué sur la place, imaginer qu’on reverra, avec lui, les Poupaud, Mastroianni & Co passés chanter Parc Simone Veil et finir avec deux premières parties très moyennes, dont la pathétique et horripilante Alice & moi, hier, n’aide pas à une meilleure perception d’ensemble, c’est certain.
*Et pendant ce temps, au stade des Ténèbres, à Lyon, le visage de Jean-Louis Murat illuminait l’écran géant du concert de Mylène Farmer…
PS2: la superbe bassiste de BB s'appelle Nathy Cabrera et son acolyte (aux claviers) Sheba. Nathy joue bien mais ça n'empêche pas Almosnino de s'emparer de la Hofner pour accompagner "Ton héritage".
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23/06/2023
Deux heures et des poussières.
Je disais récemment que j’aurais beaucoup de mal à dépasser le stade du 22e concert de Benjamin Biolay, pour ne pas avoir à (me) dire que je l’ai vu plus que Jean-Louis Murat, qui doit rester, sinon immortel, l’artiste de ma vie en concerts. De fait, j’ai dû reprendre mes listes pour savoir combien de fois j’avais vu le Calado-sétois en live et ça n’était finalement que la 11e fois que j’allais à sa rencontre, ça laisse de la marge. J’y suis allé en claudiquant, confrontant mes vertiges, pour la première fois, à l’épreuve d’un grand rassemblement, et j’ai profité autant de mon statut – pour éviter la file d’attente – que des épaules de mes amis pour ne pas perdre l’équilibre. Opposer à la fatigue plus rapide la joie de revenir à ce qui fait l’essence de mon existence, ces musiciens qui entourent l’artiste aussi fragile et généreux sur scène qu’il s’efforce de paraître puant à ceux qui ne le connaissent pas. Et qui, depuis son premier 45t, en 2001 – « les cerfs-volants » - aligne les standards comme d’autres les chemises à motif, comme la noire qu’il arborait hier en hommage à Elvis, coupe de cheveux comprises. Voilà un homme capable d’ouvrir ce premier des deux concerts tant atendus, dans la ville à laquelle il a consacré son dernier (double) album, « Saint-Clair », par le sublime et générationnel « la Superbe ». Il a le trac, il le dit, mais il se détend parce qu’il sait qu’il va passer « une bonne soirée ». Et tout est fluide, jusqu’à ses petits pas de danse de boxer un peu pataud. Il a une nouvelle formation qui ne va pas arranger sa réputation trufaldienne, avec deux sublimes musiciennes sud-américaines, aux claviers et à la basse (comment retrouver leurs noms sur Internet, pas simple…) et les fidèles Jaconelli, Almosnino & Entressangle aux guitares et batterie pour bétonner un son solide, résolument rock pour sortir des ballades qu’il concède. Il y a une première surprise avec l’arrivée de Marie-Flore pour chanter en duo cette superbe chanson de la première : « Je sais qu’il est tard ». La set-list est originale, il y a des titres de la première heure, des morceaux qu’il n’a pas joués depuis longtemps, « Si tu suis mon regard », un « Parc fermé » sans Adé mais qui fait (déjà) se lever un théâtre (déjà) acquis. Évidemment, quand on amène un synthé et que Almosnino se met à la basse Hofner pour accompagner, en formation complète, le panthéonesque « Ton héritage » (peut-être parce que chacun se l’approprie, cette chanson), ça donne déjà un concert que personne n’oubliera, et certainement pas lui. Il ne peut plus qu’achever la foule dès les premières mesures de « Comment est ta peine ? », reprise ad libitum – il faudrait qu’on apprenne à vivre avec ça-a-a-a-ah – jouer un peu de lui-même avec les Sète répétés pour montrer (il est filmé) qu’il est aussi chez lui aussi et que ça signifie quelque chose quand on a écrit dix-sept titres sur l’île singulière et sa colline sacrée, St Clair. Qui clôt le dernier rappel et le premier concert des deux. Triomphalement, même avec un dernier refrain chanté avec un micro muet. Cinq heures et des poussières, Saint-Clair Six heures et des poussières, Saint-Clair Sept heures et des poussières, Saint-Clair Huit heures et des poussières, Saint-Clair, ça reste en tête, jusqu’au lendemain. Ça tombe bien, il revient. Et moi aussi : je n’ai pas failli ne plus jamais le revoir pour ne pas en profiter pleinement. Même assis, en titubant.
PS : pas revu Bruno après le concert, mais à sa moustache quand BB a chanté « les amoureux des bancs publics », pas certain qu’il ait été dans son élément, hier.
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09/06/2023
Murat & I (10/10)
Évidemment, on pense à la fin du parcours, cette version du Transbordeur 93 immortalisée dans un inédit Murat Libé live parce que, officiellement, la version était trop longue pour figurer sur l’album. Sans doute aussi faut-il aller chercher du côté d’une guitare volontairement désaccordée par ses potes, pour faire une blague, mais peu importe, cette première longue chanson aura étrenné la tradition de terminer ses concerts par une épopée, sans chronologie, Nu dans la crevasse, les jours du jaguar et récemment – hier, encore – Taormina. La fin du parcours – Oh assis sur un banc, j’attends– alors même qu’il ne faisait que commencer, l’ironie muratienne n’est jamais loin, comme d’annoncer, d’entrée, que tout est dit (ça reviendra) dans mes chansons. Qu’ont-elles pensé, le 25 avril, les endimanchées, ces deux femmes qu’il a interpellées parce qu’elles quittaient la salle, avant l’heure, ce soir de premier concert ? On a parfois des existences inversées, pour un rien : j’ai failli ne pas y aller, à ce concert, parce qu’un ami m’avait prévenu de la nature bougonne de l’individu. Je ne me suis décidé que parce que ma compagne m’a annoncé qu’elle y allait, avec une amie. J’ai entamé ce soir-là un parcours de vie qui ne s’est finalement fini que récemment, en septembre. C’est mon dernier bal, disait-il il y a 30 ans. C’est bien, ces adieux qui prennent trois décennies, ça donne l’impression d’avoir eu le temps de se préparer, même si ce n’est pas vrai. Elles, les deux, là, ne sont sans doute jamais retournées le voir, sont passées à côté, à autre chose. Mais personne ne les a oubliées. Même en négatif, elles appartiennent au lien défait, cette antiphrase qui fait qu’on n’en aura terminé avec JLM que quand on sera passé du même côté de lui. Adieu, ami, bye-bye. C’est la fin de mes chroniques*, de ces mots qu’il fallait poser sur sa perte. Ma façon – jusque dans la potacherie du titre – de m’approprier, juste un moment, cet homme qui a fait partie de ma vie et que j’ai croisé 23 fois, au total, avec qui j’ai échangé, rapidement parce que je n’aime pas ça, deux-trois mots, à qui j’ai confié un livre et qui a apprécié. Le reste, les hommages, les complaintes, le quant-à-soi, je l’ai dit, ça ne me concerne pas. Je lui ai fait mon petit décalogue impromptu, je peux le laisser partir.
* c'est curieux, je l'écris, mais quelque chose me dit que ce n'est pas vrai.
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08/06/2023
Murat & I (9/10)
C’est absolument dérisoire, mais s’il fallait en choisir une, ce serait celle-ci. Une autre dans une heure, je l’ai déjà dit, mais quand même. C’est – là aussi – un OVNI dans la production de JLM, puisqu’issue d’un DVD – Parfum d’acacia au jardin – et jamais parue sur CD, ou sur une compilation, ai-je le souvenir. « Plus vu de femmes », c’est l’acmé d’une séance d’une journée au studio Guillaume Tell de Suresnes, en noir et blanc, dans une ambiance des 50’s avec une seule prise, en live, entouré de Fred Jimenez & Stéphane Reynaud, toujours, avec la guitare de Christophe Pie comme invitée et la présence irradiante de Camille aux back vocals. Elle est d’une telle sensualité, Camille, dans son déhanchement (bien saisi le plan d’avant) qu’à 2’52, le barde auvergnat se déride, se départit de son sérieux et de son anachronisme pour… sourire*, et immortaliser un instant rare, chez lui. Un an après Lilith, Camille devient LA femme, de celles dont il regrette de ne plus les voir. Telles quelles ? Nostalgie d’un amour courtois – Tout me revient au souvenir d’icelle, glisse-t-il dans Elle avait le béguin pour moi – ou surprise à peine feinte devant la place qu’elle prend, dans la chanson comme ailleurs. Faire autant fi des lois de l'hymen, alors, vraiment ? Ça justifie à lui seul, ce sourire, ce malentendu éternel, et ça fait écho au culot de la jeune fille, déjà, en 2004. Seul aux commandes de la tendresse, croit-il, mais en fait, non. Elle est face à trois gaillards, en studio, et c’est elle qui tient les rênes. Et la magie opère.
* "Avaient-ils jamais rencontré ce sourire ?
- Jamais
- Que feraient-ils s'ils le rencontraient un jour ?
- Ils le suivraient ."
14:17 Publié dans Blog | Lien permanent
07/06/2023
Murat & I (8/10)
Il y a toujours des chansons qui sont liées à des instants précis, je ne vais pas revenir sur la réminiscence, mais en 2002, pour ce qui est pour moi le meilleur album de Murat – à chaque fois que je dois choisir, je repense à ce gag de Greg dans lequel Achille Talon explique qu’il reçoit un courrier de lecteur pour dire à chaque sortie d’album que ce n’est pas le meilleur de la série… - je suis dans ma ZX vert Hurlevent magnifiquement dotée d’un auto-radio CD et c’est ainsi, en sortant de la FNAC où je m’étais arrêté, que j’ai écouté l’album pour la première fois, conquis d’entrée par la session rythmique, le duo Fred Gimenez & Stéphane Reynaud qu’on ne peut pas dissocier de l’auvergnat. Aime-moi, ça n’est pas la première fois que JLM use de l’impératif – le seul verbe avec lire qui ne le supporte pas – mais l’entrée dans l’album et dans le morceau est dantesque et simple à la fois. Ouvrira sur une tournée dont on ne saurait qu’après qu’elle fut marquante chez Murat parce qu’elle lui a permis de s’autoriser comme guitariste, et que malgré l’immense respect qu’il faut avoir pour Clavaizolle, le trio s’avèrera suffisant et très marquant. L’immense Fred Gimenez, le compositeur du sublime Bird on a Poire*, l’homme qui dut quitter Jean-Louis pour les 80 concerts garantis de la tournée de Johnny, qui revint, tranquillement, quand l’aventure s’est terminée, Fred, l’homme grand et massif aux costumes sombres qui passa la dernière tournée plus en retrait que quand on découvrit Gimenez/Murat/Reynaud sur la même ligne, en scène, et qui aligna des morceaux qu’on n’attendait plus. L’amour qui passe n’a rien d’une grande chanson de Murat par le texte, mais ses Oh Oh font fureur et il y aura toujours lieu de s’interroger sur les magnifiques chevaux, qui sait ceux de la fontaine de Trévi, puisque c’est le jour (clin d’œil). Fred aura perdu Johnny, Stéphane aura eu une vie marquée par les deuils et il y a de quoi être très triste pour eux, aussi. Parfois une existence s’interrompt comme la chanson le fait d’un riff de guitare.
* Monsieur a donc cessé de craindre les demoiselles, mais qu'en pense la sublime Jennifer?
17:03 Publié dans Blog | Lien permanent
06/06/2023
Murat & I (7/10)
Le cliché qui veut que l’imagination, la sensibilité, la capacité d’exprimer une émotion relèvent du côté féminin n’a jamais été si éloquent que sur cet inédit, en face B de « Sentiment nouveau » sur lequel, chose curieuse, je n’arrive pas à mettre la main depuis la date fatidique du 25 mai. Pour la bivalence de son propos, la femme à laquelle on pense, la femme qu’on est en partie quand on dit le manque et l’abandon. Il y a la même dualité quand la vigueur du corps est évoquée, le joug, également, autant d’attributs virils qui disent la domination de l’autre sexe à celui ou celle qui est resté(e) sensible. Il y a tout Murat dans ce titre, dans sa façon de faire traîner la diction, dans le mélange des langues et des perceptions. Dans l’énoncé de l’amour vulgaire, également, le même rejet de la vulgarité qu’on retrouve dans l’Irrégulière. Il y a la nappe de synthé, les propos murmurés en entrée et surtout cet octosyllabe du diable, « Va ma mémoire est inflammable », la phrase qui ponctue mes « Portraits de mémoire », par ailleurs. Il pourrait parler d’une mère, d’une amante, d’une déesse initiatrice*, au livre de Job -Souviens-toi que tu m'as façonné comme de l'argile ; Voudrais-tu de nouveau me réduire en poussière? - et au vase du même nom. La place des femmes est essentielle dans le travail de JLM, comme chez tous les créateurs mâles à l’âme tendre : l’entrée de la batterie le martèle, on ne se sort jamais du charme sous lequel on est tombé (une des rares chansons d’un autre qu’il a reprise, celle de Louise Féron…). C’est un morceau hypnotique, pour le coup, qui renvoie savamment à l’homéostasie, la recherche permanente de l’équilibre. Un masculin-féminin tempérant, chevaleresque, entre le guerrier et le gentilhomme, le savant et le poète.
* Lilith, ce démon féminin issu de la tradition juive, considérée comme la première femme d'Adam, avant Ève?
17:48 Publié dans Blog | Lien permanent
05/06/2023
Murat & I (6/10)
À qui s’adressent les chansons, pas sûr que l’auteur lui-même le sache. Pensait-il à Marie Chantegreil,, fille du braconnier Chantegreil, nièce d'Eulalie Rébufat, la femme du méger du Jas Meffren quand Jean-Louis Murat a écrit celle-ci, « Nous nous aimions tant » - la diérèse a son importance – jamais enregistrée nulle part et exclusivement dans le souvenir de ceux qui ont assisté à cette tournée, en 2000, pour moi la meilleure. À qui s’adresse-t-il, dans un langage suranné, au passé simple, quand il écrit cette cantilène plaintive ? Quand il se met à la place de Silvère - Miette, dans les Rougon-Macquart*, meurt dans la fusillade de Saint-Roure - conduit à l’échafaud (Voilà l'instant cruel, amour oh mon aimée Déjà siffle déjà la lame du bourreau). Silvère Mouret, dans les Rougon, est mort à dix-sept ans, la tête fracassée, d’un coup de pistolet, par un gendarme… Il n’y a donc pas de dédicace directe à ce texte magnifique, juste l’aveu, anachronique, d’un amour rendu impossible par l’époque, les familles, les conventions. Il fallait l’enrober d’un côté violent, à la guitare, d’un refus crié (Oh non non NON !). Il faut nous séparer, c’est l’impératif catégorique en soi, mais les roses trémières renvoient à l’immortalité des amants, puisque Murat, de son propre aveu, est condamné au verbe « aimer », comme « esclave » des mots "ange", "âme", "amour", disait-il. Ça n’est – même – pas une face B, ni un des inédits qu’il a distillés sur son site pendant des années : ça a été un rendez-vous, en début de siècle, avec une histoire telle qu’il s’en passait deux siècles avant. Et qui est resté.
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04/06/2023
Murat & I (5/10)
C’est toujours fascinant, la vie des chansons, surtout quand on en est l’auteur, au sens propre, et qu’elle ne vous appartient plus quand elle a été composée, puis interprétée. C’est une drôle de sensation, de penser qu’elle est à vous alors même que ceux qui l’écoutent l’attribuent à celui qui se l’est appropriée. L’étalon-mesure reste d’ailleurs d’oublier qu’elle sort de vous et de l’écouter comme vous écouteriez quelque chose qui vous plaît et vous est étranger… Mais c’est une autre histoire encore que celle du « Charme », dont je me suis rendu compte qu’elle n’existait pas en ligne. Je l’ai donc uploadée, puisque c’est le terme, en restituant à qui l’a écrite et composée les droits moraux et intellectuels, 31 ans après sa sortie*. Un disque resté anonyme, épuisé depuis longtemps, mais un morceau qui prête à confusion, depuis. Alain Bonnefont, c’est un vieux compagnon de route de Murat, peut-être pas aussi proche et assidu que le fidèle Denis Clavaizolle (dont les mots qu’il ne sait pas dire sont les plus justes lus depuis une semaine), mais membre de Clara, le groupe de la première heure, et musicien occasionnel sur des tournées, dont Muragostang, aux claviers. C’est surtout un song-writer surdoué, des musiques écrites pour JLM (Le venin, les hérons, le fier amant de la terre…) et donc les paroles et musique du Charme, dont Murat s’est emparé, chose rare chez lui, qui se les sert lui-même, avec assez de verve, mais ne permet guère qu’un autre les lui serve. Elle apparaît en dernier titre dans le disque-Ovni, « Mademoiselle personne », BO d’un film jamais sorti, éditée en disque bonus de l’album Live 95, qui comprend également le sublime « Amour zéro » (dont la moleskine se retrouve dans « le Café des Écoles », pour ceux qui suivent). Elle est tellement muratienne, cette chanson, qu’on se jure que c’est JLM lui-même qui l’a écrite ou inspirée (la tendresse du poney, le cordonnier, les grands flots dans les veines…), mais elle est celle d’un autre auvergnat, qui aura donc vu, trois ans après, sa chanson aller, épurée, ralentie, vers quelqu’un d’autre et devenir une espèce de mythe.
* en 1992, Son album "Amaretto" est paru en 1992 sur le label belge "Les disques du crépuscule" (Pale Fountains, Marie Audigier...) et n'a jamais été distribué en France.
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