09/06/2016
Poste restante.
Daniel Damart, l’éditeur inventif du Réalgar, ouvre une nouvelle collection, des « Lettres ouvertes » au format allongé (10,5X41cm), le même, tiens, que le Réversibilités que Christian Chavassieux et moi-même avons publié il y a trois ans. 24 pages à l’adresse d’un interlocuteur, défini ou pas qui sera, de toute manière, plus large qu’il le sera jamais : c’est à la jeunesse que Lionel Bourg écrit la sienne, « à ceux dont les lendemains chanteront peut-être », en ravivant la sienne, rimbaldienne, idéaux, voyages et concessions comprises. Dans une verve poétique qu’il ponctue de ses dégoûts pour ce que le monde est devenu, il s’interroge sur ce qui fait qu’on est tant à vouloir qu’il change et que rien ne se passe. Il fait le lien entre les post-adolescents de Nuit debout et la Commune - via Walter Benjamin - ou les Canuts, qui me rappellent ici d’où je viens, toujours. Revisite le Roman (et ses tilleuls verts) de son histoire personnelle, la livre aux jeunes en s’excusant de ses propos de « vieille barbe », dit-il. C’est puissant, référencé, ouvert et mélancolique, juste à point. Isabelle Flaten, elle, dont j’ai dit, ici, tout le bien que je pensais de l’œuvre met dans sa lettre ouverte « à un vieux crétin incapable d’écraser une limace » un ton bien différent en exécutant publiquement tous ceux que leur vie pusillanime a empêché d’oser, d’aimer ou de se révolter, ceux qui se contentent de l’illusion qu’elle leur renvoie, qui font confiance aux diplomates tout en pensant que « dans le temps, on ne tergiversait pas ». Elle exécute à la Kalach de ses mots tous les adultes que nous sommes devenus, qui ont gardé de leur enfance « la petite nature » mais pas les rêves. C’est drôle, piquant et ça fait mouche. La troisième lettre, les habitués du blog la connaissent, même s’ils ne la retrouveront pas : depuis qu’elle est éditée, j’ai effacé les dix notes qui, en janvier dernier, constituaient ma « lettre ouverte d’un vieux nizanien à son fils de vingt ans ». Si vous voulez la lire ou la relire, il faudra la commander, et prendre les deux autres, au passage : c’est ainsi qu’on fait vivre la belle et petite édition, et c’est ainsi qu’on fait circuler des œuvres tellement inutiles qu’elles en deviennent absolument essentielles. D’autres lettres suivront, qui continueront une adresse publique un poil désenchantée, mais touchante, de celles qui la provoquent toujours, l’impalpable petite nostalgie.
NB: On m'a confié, et c'est le mot le plus juste, l'avant-dernière lecture d'un manuscrit tellement travaillé, déjà, qu'on n'est pas loin de la version qui sortira, d'une oeuvre dont vous entendrez parler, bientôt. Un de ces livres sublimes à côté desquels il ne faudra pas passer et qui en plus de ça, à trois siècles d'intervalle, corrobore la touche personnelle que je mets dans ma macaronade. Mais chut.
15:14 Publié dans Blog | Lien permanent
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