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07/06/2012

Le syndrome de Perdican.

Il est  incroyable qu’une des plus grandes définitions du mystère amoureux soit attribuée à un faussaire de génie ! Alfred de Musset a sans doute rêvé d’écrire ce qu’il fait dire à  Perdican dans « On ne badine pas avec l’amour », mais ces mots-là, il les doit à George Sand qui les lui a adressés, dans une lettre. Rendre public ce qui devait rester privé, c’est un des privilèges de l’écrivain puisque par son prisme,  les réalités se transforment en fiction, voire en dialogues. Il n’empêche, la dichotomie homme/femme que Perdican assène à Camille qui minaude, c’est encore du romantisme, mais c’est un romantisme à l’épreuve, puisque tous ces adjectifs qui s’opposent puis se complètent rejoignent l’antiphrase – autant que la malédiction, du proverbe.

Hommes

Femmes

Menteurs

Inconstants

Faux

Bavards

Hypocrites

Orgueilleux

Lâches

Méprisables

Sensuels

Perfides

Artificieuses

Vaniteuses

Curieuses

Dépravées

On pourrait même penser que Musset fait preuve de galanterie en n’octroyant que cinq défauts aux femmes contre neuf aux hommes, mais puisque la tirade vient de Sand, la charge est rude, et l’argumentation à venir partielle : on ne peut considérer ces réquisitoires indépendamment de ce qui fait basculer la tirade, « l’union de ces deux êtres si imparfaits et si affreux », qui réfute les défauts rédhibitoires pour  les éclairer de leur compatibilité. Pour être plus clair, on peut, au regard de l’autre, équilibrer ses propres défauts en lui permettant de valoriser ses qualités. Ainsi, le charme agit, et l’on en oublie assez vite qu’il s’agit d’un ensorcellement : le syndrome de Perdican, c’est de vouloir se convaincre qu’un choix délibéré peut lutter contre l’évidence. Il aime Camille mais veut se persuader qu’il aimera Rosette autant qu’il aime Camille. L’édifice du mensonge est en place et les incidences qui suivront seront toutes marquées de cette auto-conviction. Jusqu’au bord de la tombe, alors, pour une ultime damnation, ou jamais, mais alors pour les salauds (en sens sartrien, parce qu’ils n’ont rien fait de mal !).

18:05 Publié dans Blog | Lien permanent

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