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22/05/2010

Massacre à la tronçonneuse

Image 5.pngIl y a des moments dans l'écriture où la honte de vous-même vous submerge. J'ai souvent parlé, lors des rencontres Lettres-Frontière, de ce "livre-monstre" écrit dans la douleur entre mes dix-sept et mes vingt-quatre ans, qui voulait révolutionner la littérature mais qui n'était, sans que je le susse alors, qu'une logorrhée prétentieuse,  déjection interminable d'un amour de soi que seul le conditionnement subi autour de l'autofiction doubrovskienne, dans mon adolescence, peut encore excuser. Je garde une grande affection pour ce manuscrit qui m'empêche, ai-je répété, de ne pas reproduire les erreurs passées. Du moins le pensais-je jusqu'il y a peu. Parce que la relecture de ma "partie de cache-cache" m'a obligé à dresser le même réquisitoire : incohérences narratives, digressions permanentes, psychologie à la Barbara Cartland, approximations structurelles, j'ai tout retrouvé (hélas!). "Dom Juan" - et ses imperfections - aurait dû, déjà, me ramener à ma condition d'auteur laborieux mais non, passer le cap, terrible, de la deuxième partie n'a fait qu'ouvrir, plus encore, les vannes de la facilité. Que j'ai eu le tort de valider au 15 mars, pour des questions, dérisoires et terriblement honteuses désormais, de possibilité d'une plus grande diffusion... J'aurais pu tout envoyer paître, laisser l'écrit à ceux qui savent faire, mais, après cette période d'hébétude, je me suis accroché et j'ai fait comme tout le monde: j'ai travaillé. J'ai biffé, condamné, raturé, reconstruit. J'ai fait des calculs (si, si...), à partir d'une date donnée, j'ai restructuré, sorti la machine à points, rayé les derniers adverbes qui restaient (merci, Christelle, encore), détruit les "je crois", "je pense", blah blah blah. Mon manuscrit a subi une cure d'amincissement dont je rêverais moi-même d'en connaître la moitié: les statistiques que j'ai publiées dans ces pages il y a quelques temps n'ont aucune commune mesure avec celles que je n'ai même pas pris soin de consulter après ma séance d'hier, dix heures d'un stretching littéraire ininterrompu. J'ai arrêté de m'écouter écrire, je l'espère définitivement. Et voilà que cet exercice prend la forme que Tébessa a connue, voilà que, sans prévenir, un mouvement s'enclenche, une affection aussi. Je me remets à trouver belle une histoire que j'avais enlaidie. Je ne sais pas si celle-ci, néanmoins, gagnera la foi de l'éditeur, à qui j'ai demandé, hier, deux faveurs: la première, c'est de détruire, physiquement et mentalement, le manuscrit envoyé il y a deux mois; la seconde, c'est de renoncer au contrat que nous avons signé s'il juge que ce roman, simplement, n'en vaut pas la peine. Chleuasme? Je crois qu'il la vaut, désormais, qu'il saura déranger sainement, sans agresser par la façon dont il est écrit, au moins. L'annulation de St Maurice m'aura permis ça, ironie du sort: au prix d'un mal de dos tenace et d'une migraine atroce, je me serai attaché à mon fauteuil et j'aurai travaillé, point. Dans l'ordre chaotique de ma vie, je vais écrire, maintenant, une variation poétique sur la chouette de Dijon, me nourrir de vrais écrivains à Roanne et à Saint-Etienne, redoubler de rigueur à la relecture de la comédie musicale lycéenne, travailler sur "l'insecte et le sacré", avec Jean Frémiot. Il sera temps, après, de voir si l'automne m'a apporté tout ce que je lui ai demandé. Et de commencer un "Aurélia Kreit" qui m'a déjà prévenu qu'il ne supporterait aucune approximation. Me voilà averti.

PS: image non contractuelle, comme on dit dans les milieux autorisés.

09:17 Publié dans Blog | Lien permanent

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