25/04/2010
Les bretelles et le Psychopompe
Je rentre à peine des Canaries, où j'ai trouvé un îlot magnifique de latinité; je reparlerai du Teide et de sa présence omnisciente, mais je dois, pour l'instant, refaire mes valises et repartir, dès demain, pour les Pays-Bas et, entre autres, le musée Van Gogh que je n'ai encore jamais vu. Pour vous faire patienter et pour démentir, une fois de plus ici, l'idée que les auteurs sont - seulement - égocentrés, je fais circuler cette vidéo présentant le Psychopompe de Christian Chavassieux, que j'espère trouver chez mon libraire dès mon retour. D'ici là, encore une fois, ne m'oubliez pas: j'aurai des choses à dire sur "la partie de cache-cache", d'ici peu.
Christian Chavassieux "le psychopompe"
envoyé par avp_diffusion. - Films courts et animations.
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14/04/2010
De Mesmaeker & moi.
J'ai assez redouté l'épreuve de l'éditeur sur cette page pour ne pas me réjouir de l'accord trouvé entre nous sur ce qu'il fallait à "la partie de cache-cache" pour exister sous forme livresque. Quelques vingt-cinq feuillets, à vue de nez, et un enterrement plus tard, les exigences de ce premier des lecteurs m'apparaissent beaucoup plus clairement qu'auparavant. J'ai reçu, également, la consigne de ne pas m'empresser, ce qui est la première des conditions qu'un éditeur doit fixer à son auteur. J'ai trois mois - comme prévu, en fait - pour trouver l'équilibre, les ruptures, pour ramener la situation sur le devant de l'écriture. J'ai posé "Belle du Seigneur" sur mon bureau, comme un garde-fou. C'est donc en juin que je rendrai ma copie terminée, en septembre que le livre sortira.
Je peux partir rasséréné aux Canaries, vendredi, prendre un peu d'avance sur les retombées de cette année tendue.
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11/04/2010
L'anamnèse de Mégevette
Théorème de la rencontre Lettres-Frontière : plus la commune est petite, plus le nombre de participants aux groupes de lecture est important. A Mégevette, dans le cœur de la vallée, il y a quelque chose comme 400 habitants, dont un peu plus de 6% s’est déplacé dans la salle du presbytère reconvertie en bibliothèque. Et heureusement. Parce qu’il y a eu quelque blasphème de prononcé dans la soirée. Une soirée magnifique, entamée (après une sieste réparatrice à l’auberge du village) vers 18h30 et terminée vers 23h30, après un after – comme disent les jeunes – qui fera date dans l’histoire, généralement feutrée, des rencontres littéraires. Une petite salle comble, un auteur acculé à des étagères bien garnies, une micro-arène que je préfère affronter debout et les débats qui commencent, qui abordent les questionnements habituels, et d’autres qui ne font pas dans la complaisance : on me demande si j’ai considéré le droit moral d’aborder un tel sujet, on me fait part de débats passionnés sur le sujet. Je réponds, je ne me défends pas, j’explique : je reparle de la part épistémologique propre à l’exercice, du rôle de la fiction dans le travail de mémoire. J’aime aller au combat, ça tombe bien, mais la bataille est d’ores et déjà gagnée, tant ces lecteurs là, si avisés, ont été conquis. Par Gérard, ça, je le savais. Par moi, il me restait à le prouver. Puisqu’il est acquis parmi les organisateurs que je suis un auteur bavard, je ne démens pas, je me lâche, après tout, c’est ma dernière sur le sol français. J’aurai existé comme auteur une fois, même si, évidemment, j’aspire à revenir, à recommencer, à convaincre avec un autre roman, moins consensuel. D’ailleurs, puisqu’on s’intéresse à ce que j’ai fait, à ce qui a précédé Tébessa, à ce qui va suivre, je les soigne, quitte à passer pour l’incontrôlable de service, au vu de mes activités diverses : parolier, dramaturge, romancier et, désormais, auteur d’une comédie musicale qu’il va bien falloir livrer, puisqu’elle a suscité des attentes.
On me dit que le début de Tébessa correspond exactement aux souvenirs d’un père, d’un oncle, d’un parent qui lui est revenu. Je réponds, m’appuyant sur le Des hommes de Mauvignier, qu’on peut être revenu d’Algérie et y avoir laissé sa vie, même en n’y mourant pas. Yves Peyrani, vice-président de Lettres Frontière, venu pour l’occasion, me fait l’amitié de me dire que Tébessa lui a permis d’envisager autrement ce qu’il a vécu, lui, en Algérie. C’est touchant, et ça valide, dans le même temps. Il me reste à débattre, quelque part avec lui, de ce rapport entre le vécu et la fiction, avec grand plaisir.
La soirée s’est déroulée, mais il manquait sans doute quelque chose pour qu’on la recommence : Eric a livré deux autres chansons de « l’Eclaircie », plus une autre chanson de la comédie. « Le café des écoles » m’émeut au plus haut point, j’écoute cet homme-là interpréter mes mots sans me rappeler une seule seconde que c’est moi qui les ai écrits : ça me permet de les trouver formidables. Il paraît que je dois reprendre la parole ; une idée me traverse l’esprit, pour que l’instant soit immortel : je lis « Ouessant » à même mon téléphone portable – miracle de la technologie -, je pense avec un amour infini à Fred Vanneyre, systématiquement parmi nous. Je lis aussi – alors que j’avais pensé « au choix » - quelques passages de « cache-cache », avant de renoncer, la mort dans l’âme, à prolonger la conversation. Comme on reste parfois toute une nuit à parler et à refaire le monde parce qu’on sait que ces instants-là sont très largement supérieurs à ceux qu’on vit sous la contingence.
Monsieur le conseiller général, député suppléant, dira de moi, et me dira en face, que j’ai le charisme et l’éloquence pour faire de la politique : je lui réponds par dédicace interposée que la rhétorique et la passion ne sont pas que politiques, et que je n’aurai pas forcément besoin de concéder pour « réussir ». Réussir quoi, au juste ? Le tout n’est-il pas déjà réussi, au-delà de mes espérances ? Je termine mon « Never Eding Tébessa Tour » en ayant fait bouger quelques lignes, en ayant un poil brusqué les habitudes : le vice-président confirme. Je reparle de mon décalogue, je n’aurai pas manqué de dire l’admiration que j’ai pour des auteurs de ma « promotion », Chavassieux, Sandoz, d’autres. C’est terminé, vraiment ? Non, je vais aller à St Maurice au mois de mai, à un horaire inhabituel (12h30) : c’est là-bas que je libérerai ce roman qui m’aura emmené là où je n’aurais jamais osé espérer aller. « Les lilas blancs de mois d’avril », déférence gardée envers mon impéritie horticole – qui en aura gentiment choqué plus d’un – ne sont pas près de faner, dans ma mémoire, et pas seulement.
l'école buissonnière (L.Cachard/E.Hostettler)
envoyé par cachardl. - Regardez la dernière sélection musicale.
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Samoëns : Prométhée, Tantale, Sisyphe & Starmania
Balade alpestre dans la commune de Samoëns, ce samedi matin, pour mon antépénultième rencontre Lettres-Frontière. Déjà près de deux ans que Tébessa est sorti, mais l’envie d’en découdre avec la réécriture de la « partie de cache-cache » ne gâte pas le plaisir que j’éprouve à rencontrer des lecteurs. La rencontre de ce matin s’est déroulée dans une atmosphère détendue, mes hôtes ayant compris désormais qu’il suffit de me laisser parler pour que tout s’enchaîne : les renvois au livre, aux livres – jamais autant parlé d’Hamlet autour de Tébessa, tiens ! – à la matière biographique, aux lieux etc. On parle de philosophie, entre deux insanités sur Aragon (ma spécialité, désormais), de ce qu’est un homme, au bout du compte. Pas à la moitié du temps donné, comme le chantera juste après Eric Hostettler, mais au tout début, dans la jamais si bien nommée fleur de l’âge. J’ai déjà si souvent dit qu’il fallait que je laisse ce livre vivre sa vie que je sais d’avance qu’il reviendra, porté par les vagues d’affection que les lecteurs lui portent. Comme souvent, même si la nuit a été courte, je donne tout ce que j’ai pour que les personnes présentes me gardent un peu en mémoire, autant qu’ils garderont Gérard. Je décrète officiellement le recomptage des voix du coup de cœur de LF 2009, tout en défendant Delphine Bertholon. Je me décrète Roi du pays de rien, à mon tour, puisque je n’ai pas non plus été retenu par la Région pour l’adaptation cinématographique, pas plus que « cache-cache » le sera pour le Prix des lycéens, puisqu’il leur faut, paraît-il, des romans gais. Je leur explique que je n’existe pas encore comme écrivain dans ma ville, que même la Croix-Rousse ignore le chant d’amour que je lui ai consacré à travers ce roman. Je m’en amuse, eux s’en offusquent. Voilà des personnes, encore une fois, qui attendront ce que je vais sortir, qui m’aligneront, une fois rentrés, dans la bibliothèque à côté des Fusaro, Chalandon, Bégeaudeau, qui m’ont précédés dans la petite bibliothèque en sous-sol, au cœur du dédale. Je lis quelques passages du roman, je veux montrer à Piou-piou que les auteurs savent aussi lire en public, pas sûr que j’y sois parvenu. Je digresse, comme d’habitude, je parle de mon sens inné de l’horticulture, des manèges de la Vogue de la Croix-Rousse, de cette fameuse promenade que je ne manquerai pas de refaire bientôt. Je parle des correspondances et de la permanence, mes soucis d’être humain. De ce qu’on a déjà réalisé, avec Eric, qui nous laisse parfois hébétés, comme dans la voiture en venant : j’annonce une comédie musicale sur laquelle il va falloir qu’on se penche, maintenant, tout en ne mâchant pas mes mots sur ce genre dont je déteste ce qu’on en a fait. Je le leur dis, qu’un de mes représentations de l’enfer, c’est d’être obligé d’écouter « Starmania » sans issue possible : un vrai supplice. Je vanne un peu, mais pour une fois que je m’attaque à des chanteurs morts, ce n’est pas si grave.
J’ai parlé une heure et demie quand on en attendait une, je laisse la place à Eric, qui chante la trilogie du « Never Ending Tébessa Tour », pour l’avant-dernière fois : il ne sera pas de ma dernière en Suisse, fin mai. Mais comme dans Tébessa, pas de tristesse et des lilas blancs du mois d’avril annonciateurs : il se substitue à Pauline et chante pour la première fois en public « l’école buissonnière ». C’est beau, primesautier et beaucoup moins léger que ça en a l’apparence. Après un repas très agréable, nous quittons Samoëns pour Mégevette, d’où j’écris cette chronique : ce soir, un écrivain est attendu au village, dans le cœur de la vallée verte. Oui, Weyergans, moi aussi.
NB : Christelle, la Kathe de Jules ou de Jim (« C’est vous, Jules ? - Non, moi, c’est Jim !
- Jim et Jules alors ? - Non, Jules et Jim ! ») aura donc assisté à deux fois plus de représentations d’Eric que Martine, qui nous aura préféré les quais du Polar. Et moi je sais maintenant comment éliminer les adverbes.
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07/04/2010
Opus Deuce
Jolie balade musicale cet après-midi avec les Deuce en studio. Deuce, le groupe de l'Inoxydable, l'épistémologue de la scène rock lyonnaise et au-delà. Jour des prises de voix, ça tombait bien. A la Casa musicale, l'élévation est telle qu'on trouve en haut celui qui va pousser la chansonnette et en contrebas les manants de la technique, néanmoins aux manettes... Le choeur est en haut, alors et les conseils du directeur artistique sont fermes et délicats: il s'agit d'aller chercher le coffre, pas la gorge. Quand on enregistre en studio, fût-ce pour soi, on se trouve en face d'une opération délicate, celle d'arrêter le temps. Si j'osais reprendre une expression déjà ancrée elle-même dans le marbre d'une quatrième de couverture, comme si le temps lui-même avait le culot de s'arrêter. Quand il chante "le pays du Roi de rien", quand il trouve un ton soudain grave dans "Démobilisé" (Tout m'indiffère dans les journaux, la radio, la télé", belle antiphrase), il doit chercher l'intention davantage que la sonorité. Sous l'égide très personnelle d'un Freddy Mercury aux Ray-Ban dantesques, l'Inox reprend, il ne lève pas toujours les bras pour que l'air emplisse ses poumons. Le directeur artistique l'assiste en haut, ils mènent un étrange ballet tous les deux, l'un chante et l'autre est chargé de saisir si l'estomac est dans les vibrations. Qu'il capte parfois à même le sol, en s'agenouillant. Le reste sera une question de mixage, de mastering, un juste condensé des oreilles qui écoutent, en bas. C'est une belle expérience, à la fois similaire à ce que j'ai déjà vécu avec Eric Hostettler mais différente aussi par son abord, celui du groupe. J'ai l'agréable honneur d'entendre la prise de "Je connais mes limites", ma petite participation à l'exercice: il aura fallu ce temps pour que nos univers se rencontrent et, ma foi, ça m'a l'air plutôt réussi. J'aurai donc fait un petit peu plus pour les Deuce que de préparer les mojitos pris sous la verrière, dans ce bel endroit qu'est la Casa. C'est toujours un peu intrigant de pénétrer une famille en pleine préparation des noces à venir. J'en écrirai un peu plus quand l'opus sera là. Il sera temps alors de faire entrer l'Inoxydable dans mes portraits de mémoire, ceux des musiciens, après les écrivains. D'ici là, dès lundi, j'aurai entrepris cet exercice de réécriture dont je feins d'ignorer qu'il sera sans nul doute le plus éprouvant que j'aurai jamais connu.
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05/04/2010
Rewriting
Terme hideux de journalisme branché, mais terme important, enfin: l'exercice de réécriture de "la partie de cache-cache" commencera la semaine prochaine, en face-à-face avec mon éditeur qui aura annoté ce qui ne lui convient pas et ce qu'il convient donc de refaire. Il a cité Camus quand je pensais Guilloux, ne saisit pas la fin quand moi je la perçois absolument. Ce n'est qu'au prix de notre entente sur le sujet que le livre verra le jour, mais il y a une éclaircie, incontestable. La première dépression - post partum - est donc terminée, mais le plus dur n'est pas passé pour autant. Oui, c'est si justement dit, le livre dévore son auteur, avant, pendant, après...
09:37 Publié dans Blog | Lien permanent