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10/11/2020

Infréquentable.

Il arrive parfois que la réalité dépasse la fiction, et qu'aucune explication ne tienne face à des enchaînements de malentendus, ou de déceptions, faut-il dire. Qu'une image renvoyée semble ne pas correspondre du tout à celle que l'on peut avoir de soi mais satisfait les autres dans celle qu'ils se sont faite : autant ne pas lutter et, à son tour, lâcher prise sur tout. Et faire le dos rond en attendant des lendemains dont on sait, en ces temps aléatoires, qu'ils n'arriveront jamais. 

Un constat bien sombre contrecarré par l'exercice que Dan Burcea, une nouvelle fois, m'a demandé de faire pour Lettres Capitales. C'est ICI.

20:54 Publié dans Blog | Lien permanent

05/11/2020

AURELIA CROÎT.

Après avoir abordé une première fois le fait historique avec son premier roman, « Tebessa, 1956 », récit subjectif à la première personne d'un jeune soldat enrôlé pendant la guerre d'Algérie, Laurent Cachard revient, onze ans après, avec cette fois-ci un roman historique, « Aurelia Kreit ». Un ouvrage racontant les prémisses de la première guerre mondiale à travers le destin de deux familles juives-ukrainiennes émigrées. Ou quand la petite histoire rencontre la Grande. Une réussite.

couv-Aurelia-Kreit-550x803.jpgUkraine 1904 : deux familles dont les paterfamilias, Nikolaï et Anton, oeuvrent sur un site sidérurgique, fomentent en douce un plan pour échapper aux pogroms qui menacent de jour en jour leur judéité. Ukraine 1904 : deux hommes, à l'humanisme universel, parcourus par un altruisme naturel et ouvert sur d'autres cultures, voient également leur identité ukrainienne menacée par la Grande Russie de l'. époque, voisine de quelques kilomètres. Une Russie que n'a de cesse un certain Vladimir P. de vouloir remettre au goût du jour. Mais c'est une autre histoire. Quoique...

Anton Kreit, un homme bon et juste, suscite les jalousies, les rancoeurs et la suspicion depuis qu'il est passé contremaître. Du fait de ses origines juives, aussi.

Sa fille, Aurelia a donné le titre à ce roman fleuve, passant du mutisme de ses premières années d'enfance à l'affirmation d’un espoir renaissant, telle une clarté lumineuse déchirant le ciel obscurci, et à vrai dire réjouissante au sortir quasiment de deux décennies traversées par l'abjection et la barbarie qui déboucheront sur la première guerre mondiale au seuil de laquelle prend fin le récit. Nous sommes en mai 1914.

Une « Grande Guerre » dont on sent tout au long du récit les frémissements, l'avènement implacable. Une tragédie à laquelle participeront le père et la fille, chacun à leur façon, après avoir traversé le Continent et différents pays pour finir en France, patrie des droits de l'homme. Et plus particulièrement dans la Région Rhône-Alpes, haut-lieu de la production d'armement de l'époque. Après avoir subi, aussi, des tragédies intimes, humaines comme la mort de l’un d’entre eux, sauvagement assassiné, en pleine rue ; elles n'altéreront pas leur jugement.

                                                                  Un roman russe

Vous l'aurez compris, le roman de Cachard, qu'il voulait « russe », mêle la petite histoire à la Grande. A la façon donc de ces romans dont la portée universelle a marqué des générations de lecteurs. Ce à quoi pourrait bien prétendre celui d’un Croix-Roussien, parti avant la « gentrification » de ce quartier jadis populaire, au sens noble du terme.

La Croix-Rousse, dont l'auteur de ces quelques lignes partage modestement les origines : terre des Canuts et haut-lieu de l'industrie de la soie, des métiers à tisser, dont plusieurs pages du roman nous rappellent d'ailleurs la beauté méticuleuse. C'est d'ailleurs une des spécificités du roman que de nous confronter aux métiers manuels, à leur dureté mais aussi à leur technicité et à leur artisanat délicat, au gré des villes traversées par les familles, au travers le destin d'Anton. Ce dernier aura été tour à tour ouvrier dans la sidérurgie à Iekaterinoslav, puis dans une imprimerie à Vienne, ensuite dans les métiers à tisser à Lyon, enfin dans une usine fabriquant. des armes à Sainté. A chaque fois, on sent la pâte de l'auteur, lui-même méticuleux, attaché aux détails sans que cela ne soit pesant à la lecture. Un bel hommage en vérité au prolétariat.

A l'image du travail effectué sur le plan historique, des recherches accomplies concernant la découverte des diverses capitales comme Odessa, Vienne et Lyon et dont on ressent l'historicité, le vécu des populations, et dont on hume la fragrance âcre au vu de la montée de l'antisémitisme, en particulier dans la première partie ukrainienne assez stupéfiante par son rendu. 

Il ne faudrait pas cependant oublier que « Aurélia Kreit » est également un roman à suspens. Pas au sens du « thriller » policier mais à celui de « page turner ». En effet, la petite histoire, celle de ses deux familles émigrées fuyant l'oppression est haletante. On suit avec passion et effroi leur destin sans cesse remis sur la table des grandes destinées dont le symbole ultime sera la décision prise à la fin du roman par Aurelia de panser les plaies de la guerre et dont il nous faudra combler les trous de notre imaginaire, le récit s'arrêtant aux prémisses de ce nouveau départ, empreint d'humanisme, le poing levé à la face des belliqueux. RVB

16:53 Publié dans Blog | Lien permanent