10/12/2013
Le syndrome de Yoko Ono.
Elle convainquit son écrivain de l'épouser, prit son nom, commença de se mêler de ce qu'il comptait écrire, lui souffla tel mot, telle action, tel dénouement. Il trouvait ça mauvais mais n'osait le lui dire. Elle pestait de son manque de succès, du succès des autres, hurlait au complot phallocrate quand on lui suggérait que peut-être, elle devrait le laisser faire. Quand son ex à lui, qu'elle ne supportait pas, obtint le Prix Goncourt, elle entreprit un dénigrement systématique des grandes maisons d'édition, jurant à qui mieux mieux que tout cela était truqué. Il lui confia un soir qu'il s'était lancé dans une fresque familiale et rurale, qu'il écrirait dix volumes; elle imposa d'en faire les préface et postface, de signer l'œuvre des deux noms, mieux, hurla-t-elle, d'en être l'éditrice, et l'agent littéraire! Elle monta sa structure, se heurta au scepticisme de tous. Il tenta de la prévenir mais elle s'entêta, jugeant qu'elle s'occuperait mieux de sa carrière qu'il le faisait. Quand il se suicida, il fut surpris, en tant qu'athée, de se retrouver dans une grande maison silencieuse, entourée de grandes étendues d'herbe: un endroit idéal pour écrire, pensa-t-il. Le temps de la voir arriver au loin: elle l'avait suivi dans la mort, ne supportant pas sa perte. Quand elle vit l'endroit, le bureau, la machine à écrire, elle se frotta vivement les mains puis s'écria: bon, là, maintenant qu'on a du temps, on va pouvoir s'y mettre!
10:08 Publié dans Blog | Lien permanent
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