18/12/2012
Retour au collège.
Comme Laurence Tardieu me l'a suggéré, j’ai quelques anges-gardiens dans mon parcours d’écrivain et Marie-Claude Douot ainsi que Cécile Dérioz en font partie. Je leur dois, à l’Espace Baudelaire de Rillieux, ma première invitation, en 2008, annulée pour des raisons qui leur ont échappé. Mais elles sont pugnaces et indépendantes et tiennent à le faire savoir : après m’avoir reçu en janvier pour « le Poignet d’Alain Larrouquis », elles m’ont invité de nouveau pour que je rencontre, dans leurs locaux, la classe de 3ème de M.Carnet, professeur de Lettres du Collège Paul-Emile Victor, autour de « Tébessa, 1956 ». Fabrice Carnet à qui je dois d’être entré de mon vivant dans le Bordas, cette année, ai-je donc appris cet après-midi. J’étais donc en territoire conquis et plus encore quand j’ai vu que la petite vingtaine d’élèves avait remarquablement préparé la rencontre en amont, par groupes et sous forme thématique : le premier groupe a découpé la première scène du roman en plans de cinéma, réfléchi à son adaptation, à sa bande-son, aux mouvements de caméra. Le second a fait pareil pour le théâtre, collé quelques didascalies dans le monologue du personnage, qu’ils avaient biffé pour le rendre plus vivant encore. Après, j’ai eu droit à la réécriture de l’embuscade côté algérien, à un article du « Progrès » la racontant le lendemain. De beaux exercices, réellement, à l’imagination débordante. Chacun d’entre eux, en plus de ça, avait écrit une lettre à l’auteur, quelques-unes me furent lues par les plus audacieux, il y avait un côté hors du temps de voir ces jeunes gens parler de privilège alors que le seul privilège m’était réservé de savoir qu’ils m’avaient lu et apprécié. Sylvain Bolle-Redat, qui m’a accompagné, a fait sa première lecture publique du texte, lui qui ambitionne, à moyen terme, d’en programmer une dans d’autres instances. Une première, donc, avec ses approximations, mais le plaisir dense de réentendre la musique des mots et de savoir que cette voix sera la sienne, pas une autre. Je crois que les adolescents ont apprécié la rencontre, je les exhorte de ne rien retenir de leurs capacités créatrices, surtout avec l’enseignant qu’ils ont, qui sait la transformer, obtenir d’eux ce qu’ils n’auraient peut-être pas donné ailleurs. Je sors heureux d’avoir vécu ça au moins une fois encore, surpris de n’avoir subi aucune réticence, curieux de ce qu’ils allaient en faire eux, de cet après-midi. Lire ces lignes là au plus vite ? S’approprier le seul auteur vivant qu’ils aient peut-être jamais vu jusque là ? En tout cas, « Tébessa » poursuit son chemin. Peut-être reviendra-t-il chez Baudelaire, d’ailleurs, si Sylvain poursuit l’expérience ? J’ai vu que M. Carnet avait noté avec gourmandise la parution prochaine de mon recueil de nouvelles, quand j’ai annoncé que parmi elles figurerait un « retours d’Algérie » qui vient de loin, lui aussi. Que tous ces jeunes aient une vie formidable, en tout cas. Et que celui qui m’a dit que me lire lui avait donné envie d’écrire le fasse : le monde ne s’en portera que mieux.
17:10 Publié dans Blog | Lien permanent
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