Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

15/06/2010

Le roi du pays de rien

deucepochette.jpgDifficile de faire l’exercice critique d’une œuvre qu’on a déjà annoncée comme étant une merveilleuse régression dans l’époque rock’n’roll des années Starshooter et Téléphone. Que je n’ai pas connue comme telle, dois-je m’empresser de préciser, et que je ne peux qu’apprécier que ce pour ce qu’elle a été. Un disque, en 2010, c’est déjà un signe vers le passé, alors un disque de rock, en français, il faut être inconscient pour tenter l’expérience, ou alors ne rien en attendre d’autre que la satisfaction d’un travail (très) bien fait. Ce qui est le cas de [S]ex Machina, dont j’ai déjà parlé ici pour la chanson que j’ai écrite pour eux, « Je connais mes limites ». Il me restait à écouter la galette dans son intégralité, ce que j’ai fait plus d’une fois depuis hier, entre l’écoute incomparable de la voiture et le test probant de mes Cabasse (je ne donne pas la marque de mon ampli, on va se croire dans Belletto, après !). Je ne vais pas dire que j’aime tout et, afin d’éviter l’argumentation à concession partielle, je vais commencer par les mais plutôt que par le oui. Sachant que mes restrictions d’auditeur sont dans le cahier des charges d’un groupe de rock : qu’on mette les instruments en avant, que la balance des concerts se retrouve au mieux dans l’enregistrement studio. C’est le mixage qui rend le arbitrage et si l’album de Deuce est d’une facture absolument professionnelle à ce sujet, il n’en reste pas moins qu’à mon goût, la structure des morceaux est un peu répétitive, sauf dans les morceaux surprises de [S]ex Machina. Sans que je puisse arguer d’un vocabulaire technique suffisant, les ponts musicaux et les deux guitares sont, à mon sens, trop récurrents. Le ton est donné d’emblée, d’ailleurs, dans les enchaînements, de « Velvet sea » au très entêtant « Coup de théâtre ». A mon oreille de brassensophile, c’est un peu « too much » (class for the neighbourhood, moi aussi, j’ai quand même un peu de Lettres dans ce domaine !), mais « ça envoie le bois » et c’est bien là l’essentiel. Et le son, le mastering, pour le coup, est dantesque, c’est un fait : mention particulière, chez moi, au « Roi du pays de rien » - attention les rockers, la cinquantaine approchante vous micheldelpechise !- et à « Démobilisé », qui seront en concert des faits d’armes absolus. Le final, par définition, de « Coup de théâtre », est aussi un petit bijou (« Tombé du ciel, venu de l’au-delà, Ô Deus ex machina »), de ces airs qui rentrent et qui ne quittent plus… J’accroche moins à « Sitting Bull », à moins que les « Run, run, run » m’aient plongé dans une trop grande nostalgie post Aurélia Kreit, qui sait. Avec Stéphane Pétrier, je l’ai déjà écrit ici, comme lien entre ces deux époques. Christophe Simplex, le chanteur de Deuce, m’a expliqué à quel point sa collaboration avec Pétrier comme directeur artistique de l’album, l’avait poussé dans des retranchements qu’il ne se soupçonnait pas. Ça s’entend, ça se respire, ça met [S]ex Machina plus loin qu’il aurait jamais espéré aller, sans doute. Et les chœurs du monsieur ne gâtent rien, en plus de ça… Ses sentences (« fais pas ton Johnny », « je m’ennuie ») non plus. Les insertions d’un quatrain de Tim Staffell dans « Velvet sea » et de – me semble-t-il – Daniel Mesguich en arrière-fond dans « Coup de théâtre » montrent à quel point cet album a été pensé, préalablement et dans l’action.

Bref, c’est bien. C’est aussi l’occasion de se plonger dans l’écriture de Christophe Simplex, qui dit beaucoup plus qu’il veut bien le laisser entendre. Qui se protège parfois derrière quelques artifices thématiques de rocker mais qui a donné, avec « Marius Beyle », une dimension de lui qu’il n’avait pas encore explorée par disque : c’est à un tempo bien plus lent que ça se passe, via une voix délivrée du moindre effet avant que les instruments viennent la soutenir de façon plus marquée : c’est bien au dessus, dans l’écriture, des deux tributes à Gainsbourg (« la marche arrière », « Couleur cappuccino ») que je trouve en retrait dans l’album. On ne peut pas aligner dix chefs-d’œuvre dans un disque non plus et [S]ex Machina a choisi de frapper fort dès le départ. Il vaut mieux ça que l’inverse… L’écriture de Simplex, c’est un festival de R.C.C.C (références culturelles collectives cachées), Marilyn, les Beatles via Maharishi, Hitchcock, Verlaine, même, doublé de petits clins d’œil perso à des textes précédents, à d’autres époques encore (« Quel bel avenir », « la vie, c’est pas du cinéma »). C’est dire beaucoup et sous-entendre plus encore. Alors, évidemment, quand on n’est pas rock’n’roll, on peut aussi se demander ce qu’il donnerait sans plus aucun effet, plus de wo-o-o-o-o, de sha !, de mmmmmmmmm. Mais ce n’est pas le sujet. Et j’avais dit pas de « oui, mais » : un mais oui !, assurément.

Avec l'accord de l'Inox, "le roi du pays de rien". 

podcast

14:00 Publié dans Blog | Lien permanent

Les commentaires sont fermés.