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19/03/2010

Batman à la Servette!

batman-96980.jpgLes rencontres de Lettres-Frontière rendent aimable. Il m’a bien fallu ça pour surmonter une heure d’errance en voiture dans Genève et un taux d’énervement très supérieur à la moyenne, juste avant que j’arrive à la Bibliothèque de la Servette, qui m’accueillait hier. Gabrielle Amaudruz-Cazenave, professeure d’Université chargée d’animer la rencontre, m’attendait bien plus tôt pour évoquer les différents sujets à traiter, nous n’aurons eu qu’un petit quart d’heure pour ça, mais je la rassure dès le départ : je peux aborder tous les sujets, de quelque façon que ce soit. L’assemblée est parsemée, ce sont toujours les hôtes qui s’en excusent, je les rassure aussi : la question du nombre est devenue rituelle. Ils sont dix ici, ils seront trente, ou plus, ailleurs. Peu importe : j’ai décrété en amont de profiter au mieux de cette expérience d’écrivain, je veux donner en retour tout ce qu’on a apporté à Tébessa. Désacraliser, encore et toujours, le statut de l’écrivain, redire que ce qui est important, c’est ce qu’il écrit, pas forcément ce qu’il dit derrière. Parce que j’ai tout du bon client : je parle d’autres livres que des miens, j’avoue mon admiration pour des auteurs qui ne sont pas moi. J’aurai cité, une fois encore, Belletto, Bertholon, Bukoswki, Chavassieux, Char, Delaloye, Garnier, Nizan, Roché, Sandoz, Vanneyre, dit ce qu’ils m’ont apporté en tant que lecteur. Un lecteur que je reste, doublé du critique que je suis. J’aurai décliné la double étiquette professeur de Lettres / écrivain, la pire à mon sens : on n’écrit bien que de l’intérieur, je l’ai suffisamment dit, mais pas celui de la tête. Je parle, Mme Amaudruz me laisse faire, elle me dira après coup qu’en être protéiforme, je sais sans doute m’adapter à toutes les situations. Je lui réponds que quand en plus elles sont fraternelles, je peux aller plus loin encore que ce qu’on peut attendre de moi… Pour préparer les rencontres, elle ne veut rien savoir de particulier sur l’auteur, simplement se demande-t-elle s’il coïncide avec ce qu’il écrit. Elle m’a reconnu de suite, du dedans de la bibliothèque, quand j’étais encore dehors, malgré mon pas pressé. Je développe le lien qui me relie au personnage, ces correspondances qui font sens plus que matière. Les lecteurs qui sont là ont tous lu Tébessa, qui reste un très bon souvenir de lecture pour eux. On parle des lieux, des canevas d’écriture. De la fausse fin de Gérard : Nicolas Costa, chargé de sa première animation pour la Servette, défend l’idée – juste – que Gérard ne meurt pas dans le roman. Sauf dans la quatrième de couverture. Je parle de mon rapport au temps, de la mécanique des places, j’essaie, comme à chaque fois, de l’expliquer sans passer pour l’inadapté que je suis. Je lis le premier paragraphe du premier chapitre de « la partie de cache-cache », dans sa reliure flambant neuve à laquelle il manque la p°69 : contre toute habitude d’insatisfaction chronique, je reconnais à l’oreille que la musique est là ; ça tombe bien, comme d’usage depuis le saut dans le vide de Bloye, Eric Hostettler me rejoint, il joue les trois chansons qui m’accompagnent dans mes sorties, « l’embuscade », « Quand mes filles seront parties », « Au-dessus des eaux et des plaines ». On discute encore longuement autour d’un apéritif, j’ai l’immense bonheur de compter d’ores et déjà des lecteurs d’un roman pas encore sorti. A Genève, on attend même notre comédie musicale avec moins de circonspection qu’en France, remarque-t-on, Eric et moi. Le restaurant est très agréable, nous sommes quatre, plus une excellentissime bouteille d’un Rioja qui restera : la conversation est déliée, on en apprend chacun un petit peu plus sur l’autre. Il est près de minuit quand nous nous séparons, le lendemain, aujourd’hui, c’est un jour de travail, il vient à peine de s’achever, d’où le délai de cette chronique. Chaque rencontre de Lettres-Frontière rend aimable, tout en me rapprochant de la dernière. Mais je n’ai ni n’aurai aucune inquiétude à ce sujet. Comme le dit Nicolas en allant fermer une fenêtre laissée ouverte – pour que la chauve-souris venue fureter dans les romans puisse repartir – il est des noms et des rencontres qui restent dans un coin de la mémoire et activent des alertes, quand le moment est venu. A très bientôt, alors.

 

20:42 Publié dans Blog | Lien permanent

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