Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Murat

Palabras de Nada

C’est Leprest qui écrit « tout c’qu’est dégueulasse porte un joli nom. ». J’y pensais en furetant, oxymore oblige, du côté du Desdichado de Nerval, avec son pendant féminin que Caetano Veloso susurre avec mélancolie dans un « Cucurrucucu » qui, à tous, nous a paru ridicule jusqu’à ce que Almodovar le filme. C’est beau, comme mot, Desdichado, c’est entre déchu, dépité et abandonné, ça tient à rien, à un silence, seulement. Dans la course effrénée des mots dans ma tête, ça vient jusqu’au « Maladjusted » de Morrissey, bouscule le « déambuler » du « Quand reviendras-tu ? », dépasse, presque, « l’Irrégulière » de Murat. Dans mon cerveau dérangé, finalement, il y a plus de mots dans leur musicalité que d’images : ce n’est rien, l’image, c’est fugace et puis on voit trop que certains ferment les yeux de peur qu’on attrape leur âme.

Ce soir, je rencontre des artistes et des écrivains qui participent à un projet pour le "Printemps des poètes". Je sais d'ores et déjà qu'ils tiennent à ce que soit diffusée, dans le cadre d'une exposition sur le thème "Enfances au carré", la petite vidéo de bric et de broc que j'avais fabriquée pour la sortie de "la partie de cache-cache". Bon, ça reste de l'image mais j'en reparlerai.

Lire la suite

02/02/2012 | Lien permanent

Et à part ça?

Mon éditeur m'a récemment asséné que j'étais inutilement fébrile. Il a raison sur deux points: le premier, c'est que la réception de "la partie de cache-cache" devrait bien se passer, au vu des premières réactions. Elle ne plaira pas à tout le monde, mais j'ai évité l'écueil du mauvais livre, c'est déjà ça. Le deuxième est plus embêtant pour tous ceux qui attendent de le trouver: il ne sera pas référencé avant fin octobre, donc pas disponible, en amont, sur le réseau des libraires. C'est dans un peu plus de quinze jours et il va falloir être patient. Ou venir la trouver en avant-première aux "3 Gaules" le 20 octobre.

A part ça, en ce jour de revendications, je m'apprête à aller retrouver, ce soir à Villefranche, un des hommes qui a le plus, sans un bruit, marqué ma vie: de deux de ses rôles, du cycliste des "Je me souviens" au H2 (ou H1?) de "Pour un oui ou pour un non" de Nathalie Sarraute, Sami Frey a envoûté ma vie d'homme de sa voix reconnaissable entre mille. Si je pouvais aller jusqu'à l'atteindre, ce soir, je ferais bien ce que j'ai fait à Jean-Louis Murat l'année dernière à la même époque: lui rendre en catimini un millième de tout ce qu'il ne sait pas m'avoir apporté.

Et faut-il que je l'aime, ce comédien, pour que je joigne ici un lien issu de la chaîne à tradition délinquante!

 

Lire la suite

12/10/2010 | Lien permanent

Paroles & Musique (4/7).

Je ne peux pas dire combien de fois j’ai écouté cette chanson, les compteurs de mes ordinateurs successifs ayant renoncé à les chiffrer. Une chanson écrite à la première personne du singulier, mais en mode féminin, par un élégant « surprise », un « régulière » antinomique, au vu du premier titre du morceau, initialement composé pour Jeanne Moreau, sans doute en réponse, plus de trente ans après, à son « Tourbillon de la vie ». Le ménage à trois, celle qui est choisie, pas seulement aimée (la nuance est de Gide, qui n’y connaissait rien en femmes, mais en amour, oui), c’est le thème sous-jacent de la chanson, qui trouvera un titre définitif « à la Murat », puisque « la chanson de Dolorès » n’est justement pas sur l’album du même nom. C’est sur la scène qu’il l’a chantée, en 1998, jamais – ou rarement – depuis (c’est drôle, je sais qu’en écrivant ça sur ce blog, des alertes vont sonner chez des Muratiens qui s’empresseront de répondre et de corriger…). Il n’empêche, ce morceau devenu mythique du répertoire du Bougnat est un sublime équilibre de mots simples et rebattus, qui fonctionne : peut-être parce que les oiseaux derrière (qui remplacent le public dans « live in Dolorès ») signalent à ceux qui écoutent ça qu’il faut aimer, parce que tout ce qui est éphémère dure, dans ce domaine. A ce

Lire la suite

10/03/2015 | Lien permanent

La notion de la dévotion.

Obsédante chanson sur le couple que ce « Pour être deux », de Rose, une artiste à qui je dois mon « Ciao Bella » - qui ressortira sous une forme musicale l’année prochaine – à qui je l’ai emprunté, pour être plus juste. Et idéale façon pour moi de reprendre mes chroniques muratiennes, moi qui ai été privé de ses concerts cette année, parce qu’on n’a pas su se croiser, parce que le « Babel » tant attendu n’a pas sur moi l’effet qu’il semble avoir eu sur certains journalistes dont on se demande si, par effet miroir, ils ne cherchent pas à plaire à Murat plutôt que l’inverse. Et voilà que le bougnat accepte de chanter en duo avec une femme issue de la « variété », qui plus est une chanson qu’il n’a pas écrite. Parce que, selon ses dires rapportés par Didier le Bras, il a trouvé le texte d’une justesse absolue (en ses termes « pas niais pour une gonzesse », il y a de la volupté dans le fait de se faire détester), si juste qu’il n’a pas vu comment il aurait pu ne pas le faire. Si tant est qu’on m’aime… Vingt-quatre ans après le duo avec Mylène Farmer que certains ayatollahs de la Muratie ne lui o

Lire la suite

17/06/2015 | Lien permanent

Va, ma mémoire est inflammable.

IMG_0908.jpgÀ force d’avoir laissé le temps passer par derrière – en vision sartrienne – on a fini par oublier que ça fera bientôt 30 ans de scène partagée avec Jean-Louis Murat. Je m’entends : je suis toujours resté sagement à ma place, dans la fosse comme hier, aux Abattoirs de Bourgoin-Jallieu, 10 ans après que je l’ai vu là-bas, déjà, comme partout ailleurs, principalement dans les petites salles de la couronne lyonnaise, les Transbordeur et autres Salle Rameau n’étant plus qu’un vieux souvenir pour lui et son public de sexagénaires ou presque. Jean-Louis Murat, je l’ai dit souvent, c’est l’histoire d’une anomalie musicale, depuis longtemps : un premier 45t mythique, au titre prometteur (« Suicidez-vous, le peuple est mort ») et puis ensuite, la volonté des maisons de disque d’en faire un concurrent à Julien Clerc, à base de chansons qu’elles n’ont pas comprises et de zooms sur les yeux bleu délavé, et la moue boudeuse. Ensuite il y eut la phase provocation permanente et outrance à foison. Jusqu’à ce que, depuis une petite dizaine d’années, il décide de ne plus faire que ce qu’il sait faire, jouer avec ses potes, sur scène comme à la maison. Ne plus se soucier du public qu’en lui donnant ce qu’il est venu chercher, de la musique. Pas celle qu’il s’attend forcément à entendre, mais ça, c’est lui qui décide. Et l’homme étant prolifique, et guère porté sur la nostalgie, on ne s’illusionne plus depuis longtemps d’entendre les vieux titres que les fans portent comme d’imbéciles privilèges, parce qu’ils les ont entendus. Je le sais, j’en suis. Pour autant, hier, aux Abattoirs, c’est en quatuor que le Bougnat s’est présenté, avec les fidèles Denis Clavaizolle aux claviers, Fred Jimenez à la basse et, nouveauté de la tournée, Yann, fils du premier nommé, à la batterie, en lieu et place – ce qui ne veut rien dire, en musique – de Stéphane Reynaud. Clavaizolle (Denis) de retour, c’est plus de nappes, forcément, et un léger recul de Jimenez, revenu de Johnny (et pour cause), mais c’est une session rythmique qui pose des spectres gros comme ça avant que le patron, dont on se demande s’il ne lance pas des accords de guitare avant même de savoir ce qu’il va jouer. Une fois les intros posées et le groupe en place, il extrait de son pupitre les textes qui paraissent secondaires, et fondés, en refrain, sur les Ouh Ouh Ouh et les Yeah de tout Bluesman qui se respecte. Voix plaintive ou de tête, Bergheaud chante son dernier album, la vraie vie de John Buck, et remonte quelques titres de ceux d’avant, de Baby Love à Morituri. Presque enjoué, sifflotant et esquissant quelques chorégraphies assises, il enchaîne sans parler, les trois musiciens jouent des chœurs réguliers et féminins, on passe du Blues trainant (Jean Bizarre, La Princesse of the Cool, Cine vox…) à des morceaux presque dansants, comme le tubesque Chacun sa façon ou le gervaisien Franckie et quand on connaît l’énergumène, on se laisse aller à croire qu’il est bien, là. Qui change même l’ordre de la set-list en disant qu’on a l’air sympa et qu’on va leur jouer quelque chose de cool. Un temps, le cœur s’arrête et on se dit qu’il va sortir un Troupeau, ou l’Irrégulière, histoire de boucler une boucle de vingt-cinq ans et d’un week-end pascal. Apprends à t’aimer, chante-il, a capella d’abord, puis repris par la troupe. Clavaizolle se positionne au piano solo, et ramène, de Taormina, le sublime Chemin des poneys, ou bien ma mémoire a-t-elle confondu des titres, et ramené le peine d’amour, peine toujours, peine de cœur à la surface. Peu importe, il arrive toujours ce moment où l’on regarde Jean-Louis et qu’on se dit qu’on a toujours eu besoin de lui et que si j’ai toujours combattu l’espèce de béatitude qui règne chez ses fans, il pourrait bien chanter le bottin, me glisse l’ami Olivier retrouvé là-bas, ça ferait l’affaire, encore et encore. Je me revois me morfondre sur l’anthologique Maîtresse du live de 93, et là, trente ans après, c’est un très beau septuagénaire aux éternelles allures d’ange déchu (yeux fermés, sourcils nourris, taille affinée, beau t-shirt Budapest) qui se risque – après un long Battlefield -  à « plomber la soirée » en chantant, toujours en piano-voix, le sublissime Arc-en-Ciel, son refrain qui perfore : Je suis devenu un coucher de soleil Je parle comme les feuilles d'avril Je vis enfin dans chaque voix sincère Avec les oiseaux je vis le chant subtil. Murat, ça n’est pas la madeleine, c’est l’étal complet du boulanger. Il peut finir sur un Taormina (le titre) dantesque, comme il finissait jadis par le jour du jaguar ou, plus en avant encore, la fin du parcours, étalant le morceau et ses reprises jusqu’au bout de la nuit berjallienne. Bergheaudienne. En quittant les Abattoirs, je me demande s’il y sera encore en 2032, si je serai dans la fosse, encore. Pour plus de précautions, je serai à Montpellier, en septembre. Après chaque accident – fût-il phénoménologique – il faut se palper, vérifier qu’on est bien en vie toujours. C’est à ça que me sert un concert de Murat, tous les ans ou presque : la pharmacienne d’Yvetot ne saurait rien me prescrire de mieux.

Lire la suite

16/04/2022 | Lien permanent

Le Superbe.

23505_375173398460_306532413460_3824160_7221971_n.jpgBenjamin Biolay, comme Murat, souffre du décalage entre l’image publique qu’il donne et celle qu’il réserve à ceux qui vont le voir en vrai jouer de la musique, ce qu’assurément il fait le mieux. Enfin, il souffre, à dire vrai, il s’en fout plutôt, ce qui renforce l’antipathie chez ceux qui ne comprennent pas qu’on peut à la fois donner dans la cour des grands, assumer, dans la diction comme dans la tabagie, le lourd héritage gainsbourien et ne vouloir, at the end of the day, que faire des chansons. Jouer de la trompette, puisque c’est ainsi qu’il s’est révélé musicalement au Conservatoire de la colline qui prie, qui surplombe le « Lyon presqu’île » qu’il s’est enfin, de ses exils bruxellois ou parisiens, décidé à chanter. Il y a deux ans, pour les nuits de Fourvière, son plaisir était réel, palpable, son émotion aussi. Hier aussi, au Transbordeur. « Plus pudique que la pudeur », ce BB-là, aux airs de Nick Cave translucide, a donné un concert de deux heures aux différentes facettes, rock, acoustique, presque disco par moments. Un premier tiers maladroit quand il doit se contenter de faire le chanteur, aux gestes mal assurés, alors que ses musiciens font ce que lui fait en studio. La voix, sujet de débat, fait davantage penser à Daho qu’au Cave sus-cité, mais il donne, s’engage, remercie le public d’être venu aussi nombreux, présente sa « Superbe », l’album de la décennie qui porte le mieux son nom – quand le dernier Murat joue, lui, l’antiphrase. Il alterne le parler avec les montées sur lesquelles il peine, mais le son des musiciens est lourd, prégnant. Le deuxième temps, au piano solo, commence avec « ton héritage », ce texte qui fait penser à tous ceux qui écrivent que cet homme-là n’est pas ordinaire. « Il va falloir faire avec, ou plutôt sans »…

Cinq morceaux, une petite demi-heure seul au piano, il est peu d’artistes capables d’une telle prestation. Ça permet en plus aux autres de se reposer un peu et de revenir poser du très gros Il a beau chanter « assez parlé de moi », « dans sa Merco-Benz » - dans des postures queeniennes qui permettent de se dire que ce garçon est sans doute plus drôle que sa mélancolie l’indique - tout renvoie chez lui au conflit de l’amour qu’on lui porte et celui qu’il ne s’accorde pas lui-même: padam, padam, padam, pam pam. Pourtant, au fur et à mesure qu’il enchaîne ses morceaux, on se rend compte qu’il y en a plus d’un qui a déjà marqué le paysage français de la chanson qui dit un petit peu plus qu’elle ne le laisse croire : chez Biolay, on peut parler d’une « commode dans l’entrée qui n’est pas noire mais bleue », de post-it laissés sur le frigo ou sur le guéridon qui résument un amour de sa genèse à son agonie.

Je savais que c’était dans le dernier rappel qu’il jouait « Les cerfs-volants », qui l’a fait connaître après qu’il a « ressuscité » Salvador. Je l’ai écrit déjà, je tiens cette chanson pour une des plus belles jamais écrites. Par quiconque. Je la garde en tête en sortant, comme un des vieux films qu’on s’impose de revoir régulièrement, pour ne pas oublier qu’on est ce qu’on sera. On reste Dieu merci à la merci d’une aventure…

 

Lire la suite

27/03/2010 | Lien permanent

Comme un Lego.

Pendant qu'on travaille, on a toujours un peu la crainte d'être oublié: c'est ce travers-là qu'il faut combattre, dans l'exercice artistique. Mais quand on a quelques retours, de temps à autres, de personnes qui vous disent qu'elles pensent toujours à vous et attendent patiemment la suite de l'histoire, eh bien, ça fait chaud au coeur et c'est agréable de le partager, parfois. Alors, évidemment, sur le moment, dans d'autres lieux,  on cabotine, mais c'est là, c'est écrit, et ça donne le courage de continuer. Et c'est en réaction à cette belle et dernière chronique de François Morel, sur Inter, aujourd'hui. Vous y trouverez des noms prestigieux, d'artistes et de personnages, d'autres moins connus dont j'ai déjà parlé ici, d'autres encore dont je parlerai bientôt (demain). J'aurais pu mettre les mots de Françoise, mais elle ne parlait que de mes livres, alors je transmets ceux de Malika, qui m'incluent :

"Ma France à moi, c'est pleurer en écoutant du Léo Ferré parce que ça me rappelle mes grand parents, c'est "Ma France" de Jean Ferrat, c'est écouter Jean-Louis Murat, découvrir Miossec en concert, me régaler en lisant des BD comme "Petites Eclipses", "Les vieux fourneaux", c'est découvrir des auteurs épatants comme Christian Chavassieux, Laurent Cachard, Hervé Bougel, c'est être touchée par un tableau de Franck Gervaise ou Isabelle Cheddadi, c'est tomber en pâmoison devant une photo de Pierre Gable, c'est parcourir tous les festival de jazz de la région, me retrouver sur une barque traversant les canaux de Sète pour rejoindre à la nuit tombée le théâtre de la Mer, c'est couler une larme sur le "Comme un Lego" de Bashung accompagnant la tirade de fin du "Cyrano de Bergerac" de Philippe Torreton, c'est avoir la banane en ressortant des spectacles de Fellag, c'est écouter religieusement Jean-Louis Trintignant lisant du Desnos, du Vian au Cloître Sainte-Trophime d'Arles, c'est partir dans l'au-delà en étant entourée des chevaux de Calacas, ma France à moi, ce sont mes deux voisins bien de souche qui se sont donné le mot ce matin à 7 heures pour démarrer leur tonte avec leurs engins de compétition qui font autant de boucan que ceux qui tondraient le stade de France et puis heureusement, ma France à moi, c'est écouter tous les vendredi matin François Morel sur france Inter, aujourd'hui la dernière de la saison ."

Lire la suite

27/06/2014 | Lien permanent

0 (LIFT OFF).

Voilà, le CDT, c'est terminé. Après 13 années d'existence, dont 8 avec une note quotidienne, comme cette année, avec quelques ratés, forcément. Je ne retiendrai évidemment que les bons moments, ces élans qui m'ont donné confiance en l'objet-livre, les invitations autour de Tébessa, les chroniques écrites au petit matin quand elles n'étaient pas écrites en plein concert, je retiendrai les centaines de pages noircies à propos de Fergessen, du Voyage de Noz, de Jean-Louis Murat, qui a fait connaître l'article que j'ai écrit sur sa venue à la FNAC, il y a bien longtemps. Je retiens aussi les comptes-à-rebours, sur mes 50 ans, sur la (re) naissance d'Aurelia, sur mon arrivée à Sète. Le temps a passé, des choses ont changé et si j'ai pu blesser quelqu'un à travers mes mots, et s'il me lit encore, alors je m'en excuse (sauf un). Un blog qui meurt, c'est un peu triste, surtout que je sais qu'il y en a encore pour venir chercher la note tous les matins. Je l'ai fait moi-même pour des blogs-amis, je sais de quoi je parle. J'en ai eu, des suiveurs, j'en ai rencontré certains, en ai fui d'autres, on me demandait parfois d'être moins noir, j'ai de temps à autres obéi à certaines commandes. Je me suis fait black-lister de certains festivals du livre, j'ai impressionné d'autres organisateurs, tellement qu'ils ont préféré ne plus m'inviter. Mais rien de grave : je vais entamer 2022 en compagnie du virus, à l'isolement, ça ne me pèse pas. Je reviendrai ici de temps à autre, sans plus m'obliger de rien : le pire, pour un blog, puisque seule compte la fréquence. Je ne m'arrêterai pas d'écrire, pour autant. Tout à l'heure, comme je me l'étais fixé, j'enverrai à mon éditeur la première version relue de mon AKII, prévu, s'il s'en souvient, pour janvier 2023. Entre temps, je vais travailler à un roman intermédiaire, comme je l'ai toujours fait. J'aurai, comme vous, le réflexe, le matin, d'aller donner des nouvelles numériques, mais je ne le ferai plus. 

À ceux qui ont vu de la prétention dans l'exercice, qu'ils comprennent enfin que c'était tout l'inverse. 

On verra le sort que le Net réserve à ces journaux de bord qui n'ont aucune empreinte dans la réalité. C'est un peu comme dans la vie, en somme, on laisse les traces qu'on mérite.

Prenez soin de vous, tenez-vous à l'écart des haines ambiantes, disait l'autre.

Avec amour. LC

 

Lire la suite

31/12/2021 | Lien permanent

Rester en vie.

balançoire.jpegC’est toujours surprenant, la concomitance des sensations, le bouleversement que peut entraîner la réception d’un message au moment même où on en a terminé avec une vague d’amour et de bien-être, dans le beau cadre de cette Balançoire qui vaut à elle seule – et sa propriétaire - qu’on y retourne et qu’on s’habitue à elle. Dur de ne pas soupçonner une intention malveillante, quand un mot qui se prétend informatif fait l’effet d’un coup de poignard dans le dos. Mais c’est le lot des rapaces, je les ai suffisamment décrits, dans leur lâcheté et leurs petites victoires que je ne les laisserai pas me voler les instants que j’ai vécus autour de la Girafe, à Lyon. Dans cette ville qui est la mienne et dont Franck Gervaise, quand j’étais dans le train, m’envoyait des clichés, déjà, lui qui la découvrait un peu plus, encore. Il y avait du monde, des visages connus, en masse, d’autres que je découvrais. Des qui, depuis la mi-aôut, avait lu le livre, d’autres qui se montraient intrigués, par le titre, par les débats que ce personnage-là a commencé à susciter. Est-elle vraiment velléitaire, Clara Ville, subit-elle son existence ou, au contraire, en reprend-elle le cours, une fois son père retrouvé, autant de questions auxquelles je n’aurai pas répondu – il faut laisser le lecteur à sa réception du roman – mais en en subissant d’autres. Samantha Barendson a excellé – l’effet micro de Madonna, sans doute – dans le rôle de l’intervieweur, à l’entretien préparé – biographie, bibliographie, thèmes de la Girafe et d’autres ouvrages – et à la juste circulation de la parole entre Franck, moi – et même mon éditeur qu’elle a interrogé sur la ligne éditoriale et artistique du Réalgar. Franck et moi racontons comment nous nous sommes rencontrés, autour de Murat et de Ouessant, comment notre amitié a fini par engendrer cet ouvrage commun. On suppose encore, et c’est très bien, que c’est lui qui tient les propos du peintre, il les confirme à demi-mots, raconte comment les dessins sont nés, comment un paysage s’est inscrit dans le propos, aussi, d’une île à l’autre. Samantha conteste la distanciation, fait un parallèle avec Tébessa, parle de bienveillance envers le personnage. Qui reçoit plus de soutien qu’elle n’a provoqué d’agacement, en somme, mais de tout cela, je m’en amuse. Comme je souris à l’idée qu’on puisse trouver à ce roman une part d’autofiction alors même qu’il en est l’exemple inverse. On parle de musique, d’inspiration, on s’étonne du nombre d’artistes qui m’entourent et avec qui j’ai besoin de poser des projets et des ouvrages, comme marque d’éternité et de permanence. Les visages connus le savent, je n’oublie jamais rien, et ceux qui ont été portraiturés le savent doublement. J’explique le procédé, la petite centaine d’exercices déjà faits en quinze ans : de la fonction référentielle pour en savoir suffisamment sur celui dont je dresse le portrait, une fonction expressive forte et psychologisante, l’impression de rentrer dans l’intimité d’un être tout en gardant une distance analytique forte. De tous ceux qui m’écoutent, je me rends compte que tous n’y sont pas passés, que ça me prendra du temps, qu’ils n’en prennent pas ombrage. La Balançoire fait salon littéraire, j’utilise le mot de faussaire, encore, pour désigner le travail de l’écrivain, en insistant sur le mot : lire des livres dans lesquels je n’apprends rien équivaut à du temps perdu. On parle d’Aurélia, à demi-mot, parce que c’est la prochaine étape de ma vie d’auteur, la dernière, peut-être. Franck et sa voix douce sont rassurants, à côté de moi, il traite de la difficulté de l’exercice, de sa fatalité dans l’instant saisi. Immortel. Eternel, malgré l’antiphrase en exergue. On craint un début d’incendie dans l’appartement du dessus, mais c’est bel et bien de l’incandescence du souvenir et de la mémoire dont traite la littérature. Ça tombe bien, pour la première fois, Jean-Christophe Géminard interprète trois de mes chansons, ressorties de l’oubli dans lequel mes précédents musiciens les avaient laissées. Il joue « le Mont sans souci » de Murat pour Franck et moi, enchaîne avec des versions remaniées du « Café des Ecoles » et de « Au-dessus des eaux et des plaines ». Il est fragile, tendu, se rate un peu, reprend, mais on est dans l’émotion, réelle, qui atteint son paroxysme quand il interprète « l’Embuscade », la chanson de Tébessa, de Gérard et de la Croix-Rousse. Un baptême du feu, pour lui, dans ces conditions, un beau cadeau pour l’assemblée. Et pour moi.

D&M.jpegJe repense au chemin parcouru, me dis que ceux qui étaient là au départ ne se posent plus la question de savoir si je suis un écrivain ou pas, quels que soient les obstacles qu’on met sur mon chemin. Ils ne pourront jamais être plus vils que ce qu’on a voulu m’apprendre hier, pour désenchanter l’instant. La vie-l’instant. La fin de soirée avec Mareva, Franck et Joël, la Balançoire rien que pour nous. Que se seraient-ils dit, les rapaces, s’ils avaient su que le lendemain, alors même que les dates nous avaient offert une mauvaise coïncidence, j’allais retrouver Fergessen à la Casa Musicale, le lendemain de leur concert, pour une soirée magique et privée, au cours de laquelle le duo a sorti les guitares pour accueillir Franck dans le grand manège, lui chanter une bonne dizaine de leurs chansons et quelques autres (dont une au biniou en verre, une autre en mode Stade de France, et quelques solos de basse à faire pâlir Roman Gervaise, allez comprendre). Quatre spectateurs, c’est maigre en recettes, mais celles des pâtes au beurre et de la rosette lyonnaise feront office.

Le Beau, le Vrai, l’esthétique finissent toujours par l’emporter : je crois en une justice immanente, un rééquilibrage des forces. Ou à leur damnation. Je rentre rasséréné. Clara Ville est dans la place.

Lire la suite

23/09/2018 | Lien permanent

99.9F° et plus.

photo-12.JPGAu moins les lecteurs que la régularité des compte-rendus de concert de Murat ou Fergessen agace se réjouiront-ils : elle, je la vois tous les trois mois chaque vingt-sept ans. Elle, qui est venue poser son chapeau claque et ses Converse noires sous le froid chapiteau du Palais des Spectacles de Saint-Étienne, vendredi, une salle coupée en deux, gradins hauts et fosse démesurée. Je restais sur l'intimité partagée à Brooklyn, chez elle, et craignais que la jauge fût trop haute, mais la première surprise fut de trouver un batteur, forte valeur ajoutée au projet : cela libère Gerry, le lunaire guitariste, des boucles de programmation, et puis pardon, mais quel batteur! Doug Yowell impressionne les musiciens qui m'accompagnent, qui se régalent de le voir démonter ses charleys en plein morceau pour trouver d’autres sons. Ceux qui en étaient restés aux titres entendus dans les 80’s s’étonnent de la capacité de ce brin de femme à occuper l’espace de sa voix reconnaissable entre mille. J’ai déjà dit à quel point Suzanne était aussi intemporelle que ses chansons, à quel point le rouge de ses cheveux ramenait le bleu à l’âme et à la mémoire. Elle peut, avec la batterie, rajouter les choeurs sur « Jacob & The Angel », poser la guitare sur davantage de morceaux qu’elle le faisait, même si c’est bel et bien quand elle en joue seule qu’on mesure qu’une chanson qui reste, c’est une voix sur une mélodie. Combien de spectateurs, encore, ont du se dire « Ah, mais c’est elle qui chantait ça », toutoutoudoutoutoutoudoutoutoutoudoutoutoudoudou? La mise en abyme est parfaite, avec le t-shirt Bob Dylan - au début, avec le bandana qui le cachait, j’ai cru à Lou Reed, hommage new-yorkais - trente ans après, c’est la folk-singeuse qu’on imagine un peu casanière en dehors des horaires de tournée, en accord avec la Reine qu’elle vient présenter, venue du tarot, cette Queen of Pentacles, reine d’un monde matérialiste, aussi gentille qu’elle peut être acariâtre : qu’a-t-elle pensé de Saint-Etienne, au lendemain d’un fonds de scène aussi féérique que celui du Facteur Cheval? Mais la question ne se pose pas, puisqu’elle donne un concert complet et généreux, plus long qu’à New-York, avec des moments aussi intimistes - les remerciements pour l’anniversaire qu’on lui souhaite, les quelques mots de français bredouillés - que les deux chansons sur son amour de jeunesse, cet homme de Liverpool (« Gipsy ») qui doit se demander ce qui lui est arrivé pour qu’il laisse partir un amour qu’on chante encore des décennies plus tard. Cette a-temporalité, tout entière contenue dans l'« Horizon » dont je parlai hier avec paresse, elle est venue me la signaler, alors que j’avais déjà fait le deuil du fait qu’elle la chante, cette chanson. Il y a une route, oui, derrière celle que nous empruntons, chacun de son côté, avec l’assurance, parfois vertigineuse, qu’on est tous appelés à se retrouver. « Luka »  fait cet effet, d’un temps non écoulé, ou passé en parallèle. Elle finit son concert par « Rosemary", sous-titrée « Remember me ». Quelle ironie, pour quelqu’un qu’on n’arrive pas à oublier. Elle nous fait promettre en partant de lui donner, via Facebook, des nouvelles de nos vies et de nos chiens. Je n’ai pas de chien, mais j’ai de la mémoire.

Lire la suite

13/07/2014 | Lien permanent

Page : 1 2 3 4 5