04/12/2011
Mémoire vive.
Puisqu’il s’avère que c’est mon mode d’expression et le pacte que j’ai passé avec moi-même très tôt dans ma vie, j’essaie ici de restituer quelle a été la soirée d’hier, pour la sortie officielle de « Trop Pas ! ». Passons sur la question du nombre, souvent évoquée dans ces colonnes, à chaque rencontre de librairie ou d’ailleurs : sans atteindre, puisqu’il y tient, les quatre-vingt dix personnes accumulées dans les lieux par les Deuce de l’Inoxydable, il y avait bien entre soixante et soixante-dix personnes hier au soir. Des gens qui sont venus de loin, géographiquement ou temporellement : j’ai retrouvé des personnes que je ne voyais plus depuis trop longtemps, les visages connus et fidèles à chaque rendez-vous, des musiciens de grand talent, des chanteurs itou; des amis d’Eric ont fait le voyage en nombre, nous qui nous inquiétions du vide avons dû gérer le plein et c’est déjà formidable. Tout le monde s’est entassé dans la petite salle de l’étage, là où, jour après jour, Xav’ Lord Desprat a sonorisé chacun des instruments qui ont participé de la petite musique d’Eric. Arrivés en fin de matinée, nous avons poussé les sièges, installé le vidéoprojecteur et l’écran de projection, réglé les micros, choisi notre place. Et répété : Fred n’ayant pas participé à la séance du 11.11.11, il a fallu trouver les intentions justes, reprendre chacun des morceaux jusqu’à ce qu’ils « racontent » quelque chose, de recréé par rapport à la version disque, plus instrumentalisée. Le combo dobro-lap steel, guitare acoustique, basse/guitare électrique ne fonctionne que dans ce sens-là : la séance s’allonge, entrecoupée du repas, c’est un travail à temps plein, parfois tendu quand on n’y arrive pas. Gérard et Fred se positionnent, Eric doit rentrer dans les morceaux, jouer droit pour qu’ils jouent mieux. Et ça joue, comme on le dit dans les milieux autorisés : en répétition ou en concert, Gérard est dans sa musique, il a un son à lui et des mimiques qui lui sont propres. A table, quand Lyne lui fait remarquer qu’il ressemble à Romain Duris, je lui réponds qu’il a la chance d’être un prognathe séduisant, et ça se voit : c’est toujours sourire en avant qu’il vit ses morceaux. Pour tout dire, même ses ratés sont magnifiques : qu’il oublie de tourner un page de son pense-bête et qu’il attaque un autre morceau que les deux autres ne suffira même pas, dans la soirée, à entamer son crédit. D’une part parce qu’il est bon, d’autre part parce que ce qu’il émane sur scène lui autorise tout. Et pas seulement auprès des filles. De l’autre côté, Fred D., Herr Direktor, tient son rôle : yeux perçants, mâchoire serrée, c’est le pendant noir du trublion d’en face. Mais ça roule, ça descend, ça crée un cercle dans lequel les autres s’expriment. Au milieu, il y a les Hostett’, pour la première fois en vrai. Pauline qui m’a bluffé l’après-midi, quand j’ai compris qu’elle avait appris les paroles et qu’elle n’aurait pas besoin de pupitre. Qui répète assise, en chaussettes, et qui profite dès qu’elle le peut du portable de son père puisqu’il l’a privée du sien. Pour une sombre histoire de moyenne en français : j’établirais bien un droit d’immunité pour cette jeune fille capable de dire mes textes à la perfection, mais j’en connais qui chevaucheraient l’haridelle… Pauline et Eric réunis, le père protecteur, juste derrière. On a échappé à la catastrophe en privilégiant l’acoustique plutôt que le play-back initialement prévu sur « l’Echelle de Richter ». Je ne la quitte pas des yeux du concert, sur ce morceau, elle a les intonations de Françoise Hardy dans « Message personnel ». Pauline qui alterne les genres dans le show-case, sans doute trop court aux yeux du public, mais juste à sa dimension, encore. Elle bouge (un peu) plus sur le ukulélé de Gérard, cherche son père sur les morceaux plus complexes, le vanne en beauté sur le beau duo final… Et convainc, deux fois, avec le morceau qui, le premier, semble sortir du lot : « l’inverse du choix ». Eric est tendu, il a le double souci de sa musique et de sa fille, c’est beau à voir et je tuerais si on me disait que ce que nous avons fait ensemble, je l’ai rêvé. C’est l’état dans lequel je suis aujourd’hui, après une courte nuit. J’ai fait laborieusement le narrateur, je sais que je peux affronter un public sur mes écrits, mais pas les spot lights, pour lesquels je ne suis pas fait. Ça m’a permis, au moins, d’être aux côtés de Gérard et de le regarder faire. J’aurai vécu ça, aussi. Dans la salle du bas, après le concert, c’est la détente, je vois des gens heureux de ce qu’ils ont vu et entendu, des enfants, aussi, avec des étoiles dans les yeux. Je croise des regards qui en disent long, des mains qui se frôlent pour dire merci et plus encore. Evidemment, tout le monde attend la suite, la mise en scène, les Bercy que j’ai promis avant de revenir à la Casa, ou à Mégevette. On l’espère autant qu’eux, qu’ils le sachent, et qu’ils fassent leur part du travail : diffuser, oser, offrir, en parler, renvoyer au site, aux films, à des connaissances… On m’a souhaité aujourd’hui, que ce projet ne soit pas un suicide économique : j’ai répondu que le suicide, là-dedans, était émotionnel, et de mort lente. Que l’aventure ne fait que commencer. Et que la devise d’Eloïse Prod., désormais, était celle d’Astor Piazzolla, trouvée dans une papillote, dans une librairie, à Cluses.: « N’attendez pas que les choses arrivent, faites les arriver ».
NB: j'attends les photos et vidéos (celles qui ne sont pas prises de trop près...) avec impatience, maintenant que j'ai fait fonctionner la mémoire.
14:42 Publié dans Blog | Lien permanent
03/12/2011
En vivo.
Je regarde les musiciens préparer le set de ce soir, je suis aux anges. A force de se dire avec Eric qu'on en est là, on a fini par y être vraiment et si je me demande toujours quelle est ma place dans la version vivante, je sais qu'en terme d'écrits, l'histoire se tient, qu'elle est touchante et que j'espère que les auditeurs s'y intéresseront aussi. La pression monte, Pauline y est décidément insensible, tant mieux.
12:51 Publié dans Blog | Lien permanent
02/12/2011
Veillée d'armes.
C'est demain soir à la Casa Musicale que "Trop pas!" sera présenté au grand public. Viendront ensuite les retours critiques, les éloges et les réserves, le ballet habituel. J'éprouve une grande fierté d'être allé au bout de ce projet insensé et lui souhaite une autre vie que les livres que j'ai écrits, qui restent confidentiels. Il faut à chaque fois surmonter une déception, avaler quelques couleuvres (retour à la case plein temps l'année prochaine?) et se projeter sur autre chose. Dès lundi, je prends ma plume et sollicite des éditeurs pour mon projet Camille. Quand on est à fond et qu'on se demande si on ne va pas dans le mur, l'important, c'est d'accélérer, encore.
J'attends le plus grand nombre d'entre vous demain. Si les 5146 personnes qui sont passées par ce site le mois dernier font chacun l'effort de commander le livre-disque (avec le Larrouquis en prime?) pour Noël, eh bien, nous serons dans la mouise parce qu'il faudrait retirer, mais on le fera avec plaisir! Et on pourra en commander d'autres, des badges comme celui-ci, que Bruno & Sophie, mes bienveillants des 3Gaules, m'ont offert hier. Avec une carte de "la Valse", histoire que la boucle soit bouclée.
Ci-joint l'article du "Pays", qui flatte l'auteur "local". Ce que j'adore qu'on dise de moi à la Croix-Rousse, dans le Berry, en Béarn bientôt?
18:20 Publié dans Blog | Lien permanent
01/12/2011
L'offre et la demande artistique.
Je m'interroge. Sur les réseaux sociaux, je vois fleurir les demandes de souscription, voire les sites consacrés au pré-financement de projets artistiques. Du genre "si vous donnez de l'argent et si on arrive à la somme requise, le projet verra le jour". Outre la culpabilité que cela fait peser sur la personne qui reçoit ce message et se sent presque obligée de participer au mouvement, cela interroge les comportements et la position de ceux qui proposent l'oeuvre. Sans aller jusqu'à la fatalité de misère pesant sur l'artiste, je préfèrerais toujours celui ou celle qui montre ce qu'il a fait et qui en réclame le juste prix plutôt que cette recherche de fonds. Une question de choix et de priorités, sans doute, dont j'imagine qu'elle nourrira quelque malentendu: je ne suis pas fortuné, loin de là, et les enjeux de "Trop Pas!", pécuniairement, sont énormes. Quoiqu'à relativiser. Si l'on ne trouve pas de distributeur ni de producteur, il nous restera le goût d'un travail bien fait et quelques micro-dettes (exclusivement entre nous) dont le total n'égalera jamais, de toute manière, la valeur du temps que nous avons passé à le réaliser.
Myspace, déjà, est mort de cet aveuglement consistant à solliciter les artistes pour d'autres projets artistiques que le leur. A grand renfort d'auto-satisfaction et d'auto-promotion sur la page des autres. Je l'écris ici, je ne débourserai plus 15€ pour un CD seul, sans autre support. Le prix de notre "objet" a été calculé à perte, pour rester abordable: on accepte, en les touchant, les limites de l'auto-édition. J'en rapprocherai les conséquences de celles de la petite édition, dont Christian Chavassieux (encore) parle bien ici. C'est en amont qu'il faut y penser. Il n'empêche, sur ma cheminée, notre coffret "à la française" a belle allure. Il supporte même le voisinage de "la Valse" et, pas loin, de "Bonne-Espérance", c'est dire.
16:19 Publié dans Blog | Lien permanent