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06/07/2021

178.

Les ruelles de Collioure sont d’étranges labyrinthes concentriques dans lesquels les badauds aiment à se croire perdus. Même à cinquante mètres de là où ils logent. Ça leur importe peu : s’ils sont là, à la frontière, entre deux cultures, c’est qu’ils veulent s’inscrire, dans le temps, les lieux, la durée. L’histoire, aussi, la leur, la grande. Si Machado – souviens-toi, est-il un homme pleinement satisfait de lui-même qui soit pleinement un homme – dort ici, c’est justement parce que le temps peut s’y arrêter, qu’on peut s’y promener comme s’il n’avait d’enjeu ni en amont ni en aval. Au-dessus des eaux et des plaines, si l’amitié s’est arrêtée, c’est sans doute à l’amour de reprendre le flambeau. Même si, là aussi, on en a peur, même si les retenues, les contraintes, les assurances trop tôt énoncées. À moins de cent mètres, à gauche, il y a la mer, de toute manière, celle qui retient tout et ne trompe jamais personne. Qui sait distinguer la réplique de l’absolu. Dans les mains croisées, les regards qui se perdent, il y a la crainte que tout recommence, à commencer par la lassitude, l’habitude, tout ce qui nous happe, au quotidien. Mais quand les couples, là-bas, n’ont pas de poussette, c’est qu’ils ont déjà vécu et qu’ils sont prévenus. Que tout peut se réinventer, sans que ça n’ait aucune commune mesure avec ce qu’ils ont déjà connu. Les enfants, souvent, jouent à « Cap ou pas Cap ? », mais ce sont eux, ces anciens gamins, ces parents aguerris, qui devraient jouer à retrouver leur innocence, le sérieux qu’ils mettaient dans leurs jeux d’enfants, disait l’autre. Collioure est une espèce de citadelle qui ne laisse personne ni entrer ni sortir indemne. On peut se contenter d’y avoir passé quelques jours, mais il y a d’autres enjeux, qui se vérifieront longtemps après, quelles que soient nos réticences à entendre parler de nous. Par les murs, les étoiles et les communautés d’âmes. Le Clair de lune n’a pas fini de les illuminer, les amants de Collioure.

07:46 Publié dans Blog | Lien permanent

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