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21/04/2020

Je ne veux pas qu'on m'aime.

Contresens.jpgL’exercice paraîtra autocentré, c’est l’inverse. Ça consacre toute une vie d’écriture, n’en déplaise à l’autre imbécile d’ancien ami qui me retrouve sur FB pour me reprocher deux semaines après de me revendiquer écrivain. Sans rien savoir de ce que ça nécessite comme sacrifices et, dans mon cas du moins, comme pesanteur dans le rapport au temps. Et puis un jour, comme ça, gratuitement, on récolte. De grandes ou de petites choses, ça n’a, en l’état, que peu d’importance. Quand Aurelia Kreit, le groupe, me dédie « le cœur en croix » sur scène, le 28 septembre, c’est pour remercier le romancier d’avoir maintenu à flot trente ans d’une vie qu’on croyait perdue. Quand on continue de me parler de Tébessa, que des répliques musicales de l’Embuscade arrivent d’un peu partout, c’est parce que 50 ans de la mort d’un homme ont été bousculées par l’œuvre d’un petit roman, qui a marqué son temps, lui aussi. Alors, quand, dans ses sessions acoustiques du confinement, Balmino me réserve son « J’écris », j’ai mon petit cœur qui palpite et me rappelle mon suicide au long terme par succession d’émotions. Je veux depuis longtemps parler ici de cette chanson, dont les gens qui m’aiment pensent que je l’ai écrite, dont le moindre détail me parle comme peu d’autres le font. Evidemment, la mise en abyme est évidente, mais cette place, à l’arrière-plan de la rive gauche, cette beauté des perdants – qu’il me pardonne – le doute, les peines, les amours qu’on perd et qui inspirent, le temps qui passe, tout est dit dans cette chanson. Les fêlures, les accidents, la certitude non pas d’avoir raison, mais d’avoir conscience que la raison, la seule, est là, et qu’il faut qu’on le croie. À un contre cent, contre ces amis qui l’ont oublié, parce qu’il en disait trop sur eux, sans rien dire. Le rythme de la chanson recrée le tourbillon de l’acuité, et c’est ce qu’on attend des artistes. Même s’ils ne peuvent rien expliquer du phénomène, juste l’interpréter, à leur façon. Et celle-ci est prégnante. Rien d’étonnant, dans ses tours de chant, qu’on retrouve les Dimey, Leprest, Desjardins, Annegarn et autres losers magnifiques. Qu’il aille, parce que sa voix s’y prête, chez Cave, Waits, Cohen, Dylan, Springsteen. Sans le connaître, je m’y reconnais, c’est ce qui fait le lien. Et on est nombreux à les refuser avec lui, les règles du jeu que d’autres veulent fixer. Quand la vie aura repris, il sera temps d’aller boire un verre avec un type comme lui, balayer les malentendus que les tribus d’avant ont trop longtemps colportés, à tort, à raison, on s'en fout. Refaire le monde un moment, comme dans une vieille chanson de Renaud, qu’il a repris, récemment. Ressuscité, plutôt. J’ai juré à JC que je lui glisserai un mot de Fred Vanneyre : ce sera un façon supplémentaire de m’arranger avec la question de l’âme.

Contresens, le sublime album live, est toujours en vente ICI. Les artistes ont plus que jamais besoin de nous, mais moins qu’on aura jamais besoin d’eux.

13:11 Publié dans Blog | Lien permanent

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