Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

13/12/2015

Cachao.

"Non, mais il faut que vous compreniez : rien que l’apporter jusque ici, c’est une épreuve physique ! Vous avez tous des moments de fatigue, surtout en fin de semaine, non ? Eh bien moi c’est pareil, mais c’est là qu’on me demande de venir jouer, ou même, les rares fois où je suis invité chez des amis, qu’on me dit tu viens avec elle, hein ? Si je refuse, je passe pour un aigri, et pire, je deviens inintéressant à leurs yeux. Du coup, je les ai perdus un à un, mes amis, parce que j’anticipais leur demande et que je répondais que j’étais pris, ce soir-là. Et je me retrouvais en tête-à-tête avec elle, seul. Elle était dans son coin, tranquille, je ne la regardais pas, ne la touchais pas non plus, mais nous étions ensemble, liés l’un à l’autre. J’en arrivais à mettre la télé à fond, devant n’importe quelle crétinerie, pourvu qu’on n’en retrouve pas une. Ça n’est pas compliqué de trouver des crétineries à la télévision, surtout le samedi soir, mais on croise encore quelques orchestres et là, il faut anticiper sur le plan large, savoir si le morceau, la chanson en nécessite un et, dès qu’il est lancé, zapper, vite, sur n’importe quoi, une pub, un extrait de Derrick, mes enfants de la télé, NRJ 12… NRJ12, c’est bien, on est sûr qu’on en verra aucune, pas le genre de la maison. Evidemment, ça fait longtemps que j’ai banni de mon bouquet les chaînes classiques, ou celles de jazz, de musique latine, de chanson française aussi. J’ai toujours une appréhension de voir s’afficher la moustache de Pierre Nicolas, dès que j’allume mon téléviseur ! Depuis trente-cinq ans que Brassens est mort, reconnaissez que ça fait beaucoup ! et c’est sans compter Barbara, Brel, Trenet, Lemarque… De tous ceux-là aussi, elle m’a privé. Et vous voudriez que je fasse comme si de rien n’était, que je partage la scène avec elle ? Vous partiriez en vacances avec votre pire collègue de bureau, vous ? Eh bien moi c’est pareil."

Extrait de "Psychanalyse du contrebassiste", travail en cours.

15:17 Publié dans Blog | Lien permanent

Les commentaires sont fermés.