05/02/2010
Chessex, Eicher & Hostettler
Je viens de terminer "Un juif pour l'exemple", il me fallait commencer par ce Chessex-là après avoir lu le "Jan Karski" de Haenel. Le lien historique se faisait de lui-même et, qui plus est, Chessex a eu les mots exacts pour dire cette fascination-répulsion qui nous pousse à chercher encore et encore les mécanismes qui ont fait qu'un jour, l'homme s'est de lui-même sorti de l'humanité pour n'en garder qu'un vague souvenir, pire, peut-être, un interdit de plus à transgresser. On parle de "crimes contre l'humanité" là où on devrait parler de crimes d'humanité, et lutter contre cette seconde nature qui s'est substituée à la première. Enfin, dans Chessex, le paradoxe est respecté: comme dans l'Allemagne nazie, on trouve toujours de très beaux théâtres naturels aux pires atrocités. J'en dirai plus bientôt, parce que j'écrirai sur ce monsieur que je n'avais pas lu avant de connaître les tristes circonstances de sa mort et de me rendre compte que j'allais bientôt être invité chez lui, dans son Valais natal. Justement là où il a perdu la vie. Une fois n'est pas coutume, pendant le voyage, je me mettrai des écouteurs dans les oreilles et je me laisserai bercer par les chansons de cet homme que j'ai aimé depuis le tout début de sa carrière pour sa simplicité qu'il ne me semble avoir délaissée que très peu de temps, le temps d'un égarement. On pardonne à un homme tous ses écarts quand il a su en revenir. Jeune, j'aurais tué, pas pour être Stephan Eicher, mais pour avoir comme Djian un homme à qui confier mes chansons. Maintenant, quand j'écoute "Eldorado" dans sa version trio, noir et blanc, très épurée, je me prends à rêver de ce que pourrait donner "Au-dessus des eaux et des plaines", d'Eric Hostettler, dans cette même configuration. Et je ne me réveille pas parce que je ne rêve plus, elle arrivera, bientôt, elle est déjà en place dans sa version récital, qui commence le lendemain d'Yverdon, à Evian. La veille de Vougy. Parce que dans un mois, je pars en tournée pour trois jours. Et même si ça devait être la dernière fois, ça aura été la première. Satisfaction? Non. Je reste un machadiste convaincu et viscéral et je porte en moi depuis plus de vingt ans la maxime selon laquelle il n'est pas un homme "pleinement satisfait de lui-même" qui soit "pleinement un homme". Et puis il y a Chessex. Pour qui pourrais-je bien me prendre quand je le lis et quand je sais que je vais règler pour un soir mon pas dans les siens? Je ne ferai l'injure à personne du jeu de mots sur mes trois suisses actuels, je le remise donc par devers moi.
23:17 Publié dans Blog | Lien permanent
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