Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

27/09/2019

Le roman d'Aurelia (89-19 14/15)

Resized_IMG_20190926_180044.jpegEt si Aurelia Kreit avait paru en 89, dans la foulée de la séparation du groupe ? Après tout, je me souviens avoir proposé à mon ami Vincent, dans la foulée du concert de Limonest, la veille de mon 18ème anniversaire, de faire un livre sur le groupe, lui à la photo, moi (déjà) aux textes. Une façon d’approcher le groupe, de m’en approprier une partie, j’imagine. Je n’ose imaginer ce qu’aurait pu donner une écriture de fan contrarié, mais j’ai suffisamment, dans mes tiroirs, de vieux manuscrits pour les remercier aujourd’hui d’avoir attendu trente-trois ans pour que le livre sorte… Il n’empêche, en 1989, on se serait demandé qui était le blanc-bec qui a osé poser des mots sur les leurs, on se serait moqué de son statut militaire (civil mais inavouable), de l’échec de ses études, les amis de l’école Victor Basch – je faisais la cantine et la garderie en maternelle, si, si - seraient venus par solidarité, Estève, avec qui je m’apprêtais à emménager, aurait eu la même présence discrète qu’elle aura samedi, mon père aurait sans doute trouvé une excuse pour ne pas venir (et une occasion pour me parler ensuite de mon vrai boulot), ma grand-mère m’aurait félicité en roulant les r de son accent chantant, la Clo-Clo n’aurait rien dit mais pas moins pensé ; les copains de la Persévérante auraient mis l’ambiance, je n’aurais pas osé aborder Stéphane Pétrier(j’ai attendu encore vingt ans), Christophe Simplex ne serait pas venu pour ne pas se trouver sur le territoire de Serge. On m’aurait demandé – était-ce Anne, déjà, à la librairie du Tramway, existait-elle, d’ailleurs, cette librairie, en 1989 – pourquoi ce choix, j’aurais répondu pour l’héroïne mais en vrai, je le concède, je n’aurais pas eu grand chose à dire. J’aurais dû situer (j’exagère) l’Ukraine sur la carte, répondre à des questions sur les soubresauts de l’époque, l’occasion en or, pour le pays, de s’émanciper de la tutelle de son écrasante aînée. Une goutte de sueur aurait perlé de mes tempes quand je me serais rendu compte qu’on écrit, sur des sujets pareils, qu’en dépassant une connaissance. Pas sûr que malgré mes appels silencieux, le groupe me serait venu en aide : pas leur rôle. Il faut se défaire de ses idoles pour en apprécier la portée réelle, je sais ça depuis longtemps. Mais j’aurais espéré, aussi, que Laurence Gonguet et Dominique Serrière viennent me voir en rencontre, même si je sais que seule Dominique serait venue. Peut-être aurais-je eu droit à une version acoustique de quelques chansons, trente ans avant qu’on y joue les miennes, dans cette librairie ? Au début de cette idée folle, de ce projet insensé, j’avais imaginé que le chanteur des Noz interprète, pour m’accompagner, un ou deux titres des Kreit, comme il les appelle. Parce que les avoir eux, au complet, était sans doute un rêve trop grand. Je l’aurais bien vu reprendre les jardins d’Ellington, comme à l’INSA, a capella, qui sait ?

Qui étais-je en 1989 que j’ai réussi à ne pas trahir trente ans après ? Ça n’est pas une question que Romain s’aventurera à me poser samedi, parce qu’on n’en aurait pas terminé… On avance tous avec nos paires d’accidents (phénoménologiques), dans nos vies chaotiques. Mais il y a parfois de ces failles spatio-temporelles, créées par l’intensité qu’on recherche en permanence, qui nous permettent, même si personne n’est dupe, de recoller avec celui qu’on était. C’est inestimable ; de quoi en reprendre pour trente ans : perpétuité dans l’émotion, avec peine de sûreté.

La photo est du jour, elle est signée Bougnat. Dix ans d'édition sur table, et dans la vitrine du Tramway.

Ces chroniques racontent la genèse et l’édition du roman « Aurelia Kreit », paru aux Editions Le Réalgar.

Présentation du roman le 28 septembre à 14h30 à la librairie du Tramway et à 20h à la MJC Ô Totem de Rilllieux, pour la reformation sur scène du groupe (couplée aux 30 ans du Voyage de Noz). Mais ne vous fatiguez pas, c'est complet.

07:15 Publié dans Blog | Lien permanent

Les commentaires sont fermés.