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09/09/2011

Un bout de roman avec des dialogues dedans.

Extrait du Dîner, un roman qui existe et que je reprends de temps en temps, quand ça me chante. Ou quand j'ai faim. Dans ce roman, la maîtresse de maison confie à ses invités - qui ne se connaissent quasiment pas entre eux - qu'elle a le fantasme de suivre quelqu'un dans la rue jusqu'à en savoir plus sur lui. Ce qui n'est pas au goût de certaines de ses amies. Il me manque une fin à cette histoire: je ne l'écrirai que quand l'envie de mêler le vécu et l'écrit et, par conséquent, de trucider un des personnages dans d'atroces souffrances, m'aura passé.

 

Fallait-il qu’elle l’aime, sa Laure, Julie, pour avancer à sa place des choses auxquelles elle ne croyait pas ! Julie, qui aurait remonté le cours du temps pour revoir, une seule fois, le visage de cet homme qui ne l’avait trompée que pour la mort, absurde, violente, subite, à laquelle elle ne s’était jamais résolue parce qu’on ne peut se résoudre à l’injustice. A l'impression d’en prendre pour perpétuité. Julie que le sujet ne concernait en rien et qui aurait justement pu trouver matière à rester silencieuse. Qui ramenait le curseur de l’embarras sur moi quand je l’avais déplacé sur Laure et qui, consciente que sa  parole avait du poids, s’était un peu plus enfoncée dans son fauteuil pour me laisser lutter seul : l’axe latéral de la table avait parlé.

- La banalité, oui. Mais après tout, Laure n’a pas parlé d’aborder la personne, non ? Alors, ce n’est pas celui ou celle qu’on suit qui a de l’importance, ce sont les projections qu’on lui prête, c’est tout ! Il faudrait ne rien savoir de ceux qu’on est prêt à aimer, ça éviterait d’être déçu.

- Ça me rappelle un film avec Robert de Niro et Meryl Streep, je crois… dit Ana, qui fit mine d’ignorer l’attaque

- « Falling in love !», sursauta Gaëlle, comme si elle avait répondu à un jeu télévisé.

- Falling in love with whom ? , plaisanta Adrian, en verve.

Je me souvenais de ce film, un des premiers que j’ai vus avec De Niro, quand j’ignorais même qu’il s’agissait d’un des plus grands acteurs du siècle et que ce n’était pas ce film-là qui allait en témoigner. Une bluette sur la lassitude du couple, la façon dont un inconnu peut réveiller tout ce à quoi vous avez renoncé… Une allégorie de l’éternel retour, en fait, l’illusion qu’à n’importe quel moment, votre vie peut recommencer. De ces choses auxquelles on croit longtemps quand on a aimé, mais que l’existence ramène à leur juste valeur : Julie sait qu’elle ne peut pas dire qu’elle aime son disparu autant qu’elle l’a aimé puisqu’il n’est plus là pour qu’elle l’aime ; Ana sait qu’elle ne doit pas aimer Esteban parce qu’elle a renoncé à sa famille pour le suivre mais justement parce que sa famille ne l’a pas aimée suffisamment pour qu’elle le suive ; de Gaëlle, on peut imaginer que la légèreté avec laquelle elle aborde la question cache des manques, sous l’ironie ; de Adrian, on peut tout imaginer. De Laure, par contre, je ne savais guère plus à cet instant que ce que je connaissais d’elle dix ans auparavant, sinon qu’elle savait désormais choisir le vin et qu’elle mangeait moins de gâteaux. Mais sur Vincent, rien, à part son évocation insistante par Julie. Pourquoi n’était-il pas là, pourquoi, d’ailleurs, aucun des conjoints n’était-il présent, c’était la question… Etait-ce une condition pour que le sujet fût abordé en était une autre.

13:21 Publié dans Blog | Lien permanent

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